Le torchon brûle entre les pilotes de ligne et le PDG d'Air Algérie,
Wahid Bouabdallah. Hier, un rassemblement a été organisé par le collectif des
pilotes de ligne représenté par les deux syndicats autonomes (SPLA) et celui
affilié à l'UGTA, à l'aéroport d'Alger, pour s'insurger contre ce qu'ils
appellent « le scanner de l'humiliation ».
Depuis quelques jours, un climat
délétère envenime les relations au sein d'Air Algérie. L'installation d'un
scanner pour contrôler les pilotes et les supposées déclarations du PDG d'Air
Algérie publiées par le journal arabophone Ennahar, qui justifiait
l'installation du scanner par « des vols de denrées alimentaires et de
bouteilles de vin qui sont commis par les pilotes de ligne », ont soulevé le
tollé de ces derniers, qui ont décidé d'engager un mouvement de contestation.
Les déclarations de l'employeur ont mis le feu aux poudres et ont poussé les
concernés à sortir de leurs gonds.
M. Chabi, président du SPLA
(syndicat des pilotes de lignes algériens), que nous avons contacté, a qualifié
ces propos « d'indignes ». Même son de cloche du côté du syndicat des pilotes
de lignes affilié à l'UGTA. « Nous ne comprenons pas ce comportement de la part
du PDG, qui n'a pas cessé de nous haranguer depuis qu'il est à la tête de la compagnie
», a estimé M. Boukhari. Dans un communiqué rendu public, le collectif des
pilotes de lignes déclare que « suite à la dernière sortie médiatique du
président directeur général de la compagnie nationale Air Algérie dans les
colonnes du quotidien Ennahar et dans lesquelles nous avons été traités de
voleurs et de pilleurs d'avions, nous, représentants du collectif des pilotes
de lignes d'Air Algérie, tenons à marquer notre indignation par un
rassemblement de protestation dans un premier temps ».
Par ailleurs, le collectif «
s'interroge sur les réelles motivations d'une telle campagne de dénigrement à
l'encontre de notre corporation et surtout pendant une période aussi cruciale
que la saison estivale». «Nous insistons encore une fois, précisent les rédacteurs
du document, sur le fait que nous sommes les premiers garants des intérêts de
la compagnie.
Nous nous réservons néanmoins le
droit de recourir à toutes les voies légales afin de rétablir notre honneur si
nous ne recevons aucune excuse adressée par le premier responsable de la
compagnie à notre corporation, ainsi qu'un démenti dans le même quotidien que
celui dans lequel ces propos ont été publiés, et ce dans les jours qui suivent
».
La sécurité, un préalable
Sur un autre chapitre et concernant le malaise socioprofessionnel qui
caractérise la corporation des pilotes de ligne, dans un entretien à bâtons
rompus que nous avons eu avec le président du SPLA, les deux décrets exécutifs
promulgués récemment pour réglementer la profession sont mis à l'index.
« Les deux textes, notamment
celui réglementant la durée de travail, nous a expliqué notre interlocuteur,
ont été élaborés sans que nous soyons consultés ». Il poursuivra : « Et
pourtant, nous avons adressé des correspondances et avons demandé audience au
ministère de tutelle, sans résultat. Nous avons également demandé une entrevue
avec le ministre du Travail, mais nous avons été reçus par le directeur des
relations du travail. Nos doléances sont restées sans suite. Ce que nous
reprochons à la tutelle, c'est de ne pas nous avoir associés ».
M. Chabi explique que le décret
exécutif n° 09-205 du 11 juin 2009, complétant le décret exécutif n° 02-89 du 2
mars 2002 relatif à la durée de travail au titre du régime spécifique des
relations de travail du personnel navigant professionnel de l'aviation civile,
est suranné. Pour rappel, ce dernier stipule que « dans le cas d'une
exploitation avec un équipage renforcé composé au moins de deux commandants de
bord et d'un copilote et où l'exploitant met à la disposition des membres
d'équipage de conduite des facilités de repos séparées du cockpit et isolées
des passagers, la limitation de temps de vol est de douze heures, sous réserve
que la période de service de vol ne dépasse pas seize heures si la facilité de
repos est constituée d'un siège inclinable, et dix-huit heures si la facilité
de repos est constituée d'une couchette. Les membres d'équipage de conduite
doivent se reposer pendant au moins une heure trente minutes en continu au
cours du temps de service de vol. Le temps de service de vol au-delà des
limites fixées ci-dessus ne peut être prolongé que par l'obtention d'une
autorisation délivrée par l'autorité chargée de l'aviation civile.
Concernant les vols non
réguliers, dans le cas d'une exploitation avec un équipage renforcé composé au
moins de deux commandants de bord et d'un copilote et où l'exploitant met à la
disposition des membres d'équipage de conduite des facilités de repos séparées
du cockpit et isolées des passagers, la limitation de temps de vol sera de
douze heures, sous réserve que la période de service de vol ne dépasse pas
seize heures si la facilité de repos est constituée d'un siège inclinable, et
dix-huit heures si la facilité de repos est constituée d'une couchette. Les
membres d'équipage de conduite doivent se reposer pendant au moins une heure
trente minutes en continu au cours du temps de service de vol. Le temps de
service de vol au-delà des limites fixées ci-dessus ne peut être prolongé que
par l'obtention d'une autorisation délivrée par l'autorité chargée de
l'aviation civile ».
«D'abord, nous dit le président
du SPLA, ces dispositions sont en contradiction avec les directives de
l'Organisation internationale de l'aviation civile (OIAC) - dont l'Algérie est
membre -, qui recommande de limiter les heures de vol à cause du stress et de
la fatigue qui peuvent être fatals pour la sécurité de l'équipage et des
passagers ». Pour ce qui des griefs, notre interlocuteur avance un argument
technique. « Les dispositions du texte sont flous, fait-il remarquer. Que
signifie siège inclinable et quel est le degré de l'inclinaison ? Va-t-on être
isolé par un simple rideau ? Nous avons demandé, révèle-t-il, qu'on nous
installe des crew rest, des cabines isolées qui protègent des nuisances
sonores, notamment pour les long-courriers. D'ailleurs, c'est le long-courrier
Alger-Pékin qui est à l'origine des désagréments, vu que rien n'a été préparé
pour y faire face. Sans oublier que les temps de repos n'ont jamais été
appliqués ».
Un autre point de discorde
concerne la période de service de vol (PSV). Celle-ci commence une heure avant
le décollage du vol programmé et se termine une demi-heure après l'arrivée du
vol. « Les retards, affirme-t-il, sont souvent enregistrés quand ils
n'incombent pas au pilote.
Ils sont d'ordre commercial et
technique (bagage manquant, absence du personnel naviguant commercial, panne
technique, etc.) ».
L'autre écueil est lié à la prime
de productivité qui encourage, selon M. Chabi, « le mercenariat : elle augmente
au fur et à mesure qu'augmentent les heures de vol. Elle peut atteindre jusqu'à
250.000 dinars ! Nous avons demandé sa suppression, car elle constitue un réel
danger pour la sécurité ».
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Posté Le : 18/07/2009
Posté par : sofiane
Ecrit par : M R
Source : www.lequotidien-oran.com