Algérie

Illégitimité et rationalité



Après avoir bâclé et expédié la loi sur les hydrocarbures, l'amendement de la loi organique des lois de finances et la loi de finances 2020, le gouvernement des affaires courantes semble vouloir, à nouveau, prendre le taureau par les cornes, en affichant une ferme volonté de dégraisser le mammouth des subventions. Un sacré challenge. Le pari est peut-être un peu trop osé pour un gouvernement qui, en un laps de temps de quelques semaines seulement, passe de la gestion des affaires courantes à l'expédition des dossiers les plus sérieux et les plus complexes. Encore une fois, le problème n'est pas dans la refonte elle-même de la politique sociale de l'Etat mais dans ceux qui doivent penser et mener cette réforme.Autrement, la réforme s'imposera tôt ou tard car, dans ce dispositif de subventions généralisées, il y a à boire et à manger, tant il est vrai que le soutien aux prix profite à la fois aux pauvres, aux riches, aux pays voisins, aux marchés spéculatifs, etc. Si le soutien aux prix des carburants profite beaucoup plus aux riches qu'aux pauvres, les produits de base, subventionnés à l'importation et à la production, alimentent aussi bien le marché domestique que les pays voisins à travers le trafic et la contrebande aux frontières Est, Ouest et Sud. Le trafic de carburants coûte, lui, environ 2 milliards de dollars annuellement. Une véritable saignée due, en partie, au bas prix des carburants ? le pays arrive d'ailleurs au 5e rang mondial des pays pratiquant les plus bas prix des carburants ? mais aussi à la passivité de l'Etat face à un fléau aussi préjudiciable.
Du reste, c'est un secret de Polichinelle que de dire que la politique du logement sert à alimenter le marché spéculatif plutôt que de répondre aux besoins des petites et moyennes bourses. Le logement capte, bon an mal an, environ 4,7 milliards de dollars de subventions, alors que le soutien aux familles et aux produits de base coûte à l'Etat environ 4,5 milliards de dollars par an. Aussi bizarre que cela puisse paraître, l'Etat subventionne le sucre et le blé tendre à coups de milliards de dollars, alors que les deux produits posent un sérieux problème de santé publique. Toutes ces questions posent, certes, des enjeux à la fois budgétaires et socioéconomiques, mais il serait politiquement incorrect qu'un gouvernement illégitime et/ou mal élu puisse toucher à une telle réforme, aussi nécessaire soit-elle.
Pour l'instant, l'Exécutif préfère rester dans le flou et ne pas dévoiler ses cartouches. Une posture qu'il n'a pas appliquée au sujet des autres réformes, dont la loi sur les hydrocarbures, l'endettement extérieur, la loi organique des lois de finances, etc. C'est que les subventions touchent directement au pouvoir d'achat des ménages et des entreprises. Ce serait comme souffler sur un brasier social dont le brûlé peut se propager à vive allure et se révéler inextinguible.

Ali titouche


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)