«Il y a une volonté délibérée de nuire aux moudjahidine»

Entretien réalisé par Tarek Hafid
Combattant dans les rangs de la Wilaya IV historique, Dahlouk Ali a connu le commandant Lakhdar Bouregaâ en 1957. Aujourd'hui secrétaire national de l'ONM, il dénonce la campagne de diffamation orchestrée par l'ENTV contre l'officier de l'ALN. Pour lui, c'est l'ensemble des moudjahidine qui est visé.
Le Soir d'Algérie : Le commandant Lakhdar Bouregaâ a été placé en détention provisoire et fait l'objet d'une campagne médiatique qui vise son passé révolutionnaire. Pourquoi cet acharnement, selon vous '
Dahlouk Ali : Nous sommes face à une situation dramatique. Le commandant Si Lakhdar est un des officiers qui ont marqué la Wilaya IV historique par ses faits d'armes et par son sens du commandement. Il est originaire de la localité de Omaria, une région aux 3 200 martyrs.
Ceux qui remettent en doute son passé révolutionnaire sont des ignares. Le commandant Bouregaâ, comme beaucoup de jeunes Algériens à l'époque, a effectué son service militaire au sein de l'armée française avant de rejoindre les rangs de l'Armée de libération nationale en 1956.
Personnellement, quand j'ai pris le maquis en 1957, après le massacre de mes parents par l'armée française, je ne savais absolument rien à la chose militaire. C'est grâce à des hommes comme lui que les moudjahidine ont appris le maniement des armes et les techniques de combat.
Aujourd'hui, certains se permettent de l'insulter et de jeter le discrédit sur son parcours d'officier de l'ALN. Il suffit d'aller dans les plus petits villages du centre de l'Algérie pour trouver des traces du passage de Si Lakhdar.
J'ai eu l'honneur de connaître le commandant Bouregaâ lorsque j'étais membre du commando de la Wilaya IV, Zone 4 dans la région de Médéa. Si Lakhdar était alors à la tête de la célèbre katiba Zoubiria qui a infligé des pertes énormes aux unités d'élite de l'armée française.
Un des symboles de la Wilaya IV est actuellement en prison pour des propos tenus contre le chef d'état-major de l'ANP. Est-ce que vous comprenez qu'il subisse une telle sanction '
Je n'ai nullement l'intention de critiquer une décision de justice. Mais revenons aux faits : le commandant Bouregaâ est accusé d'avoir fragilisé le moral de l'armée. Sincèrement, je ne comprends pas comment un homme de son âge pourrait être accusé d'un tel délit.
Le commandant Si Lakhdar est un moudjahid, un homme qui a toujours été engagé pour les causes justes. Certes, il ne mâche pas ses mots. Mais c'est surtout un grand patriote qui respecte au plus haut point les institutions de la République et surtout l'Armée nationale populaire.
Il a toujours affiché sa grande fierté de l'armée de son pays. Il est incapable de porter atteinte à l'ANP.
J'espère qu'ils prendront en compte son engagement et son combat afin qu'il puisse retourner parmi les siens. A 86 ans, sa place n'est pas dans une cellule.
Comment expliquez-vous le déchaînement de l'ENTV contre le commandant Bouregaâ '
C'est une campagne très dangereuse. Elle ne vise pas uniquement Si Lakhdar, mais l'ensemble des moudjahidine. C'est pour cette raison que l'Organisation nationale des moudjahidine a décidé de déposer plainte contre ce média public. Il y a une volonté délibérée de nuire aux moudjahidine.
Ceux qui ont orchestré ces attaques médiatiques ne vont pas s'arrêter là, il faut s'attendre à de nouvelles campagnes mensongères contre d'autres symboles de la lutte contre le colonialisme. Il faut s'attendre au pire.
Mais je suis rassuré en voyant la réaction de la société et de la majorité des médias qui soutiennent Si Lakhdar. Les insultes de l'ENTV ont provoqué l'effet inverse.
Les insultes proférées par Naïma Salhi contre la moudjahida Djamila Bouhired entre également dans ce cadre '
Parfaitement. D'ailleurs nous avons décidé de porter plainte contre cette personne. Nous allons également faire réagir le ministère des Moudjahidine qui est resté silencieux depuis que ces attaques ont débuté. Il n'y a eu aucune réaction du ministre, alors qu'il aurait dû être le premier à réagir pour défendre les moudjahiddine.
T. H.