Algérie

«Il y a une volonté de tuer dans l uf le tourisme saharien»





- Pourquoi, selon vous, le décret régissant l’activité des agences de tourisme et de voyages et promulgué au mois de juillet dernier porte-t-il atteinte aux activités des professionnels du tourisme saharien '
Les dispositions de ce décret sont mortelles pour le tourisme saharien. Elles ne répondent pas au mode d’exploitation, à l’éthique et à la mentalité de la culture locale. Nous activons dans une région spécifique, qui diffère totalement des régions du Nord ou des Hauts-Plateaux. Ses guides n’ont rien à voir avec ceux qui activent ailleurs.
Ce sont des locaux qui, en dépit du fait qu’ils ne sont pas instruits, connaissent comme leur poche tous les coins du désert, sa faune, sa flore et son histoire. Ils n’ont pas de diplôme, mais sont excellents dans leur métier de guide qu’ils ont appris sur le terrain. Comment peut-on leur exiger un titre, alors qu’ils n’ont jamais mis les pieds à l’école ' Il y a quelques années, nous avions demandé aux autorités de leur dispenser une formation orale, mais cela n’a pas été pris en compte. Le tourisme saharien n’a rien à voir avec le tourisme de masse. C’est une activité très particulière et le décret qui vient d’être promulgué ne peut être appliqué. Si les pouvoirs publics avaient impliqué les professionnels du tourisme dans l’élaboration de ce texte, il ne serait pas dans sa version actuelle. Ce décret prévoit le retrait de la licence si une agence ne travaille pas durant une période de six mois. Or, au Sud, la saison touristique s’étale du mois d’octobre au mois d’avril. Les autres six mois, il n’y a rien du fait du climat. Allons-nous tous nous retrouver sans licence ' Plus grave, ceux qui ont rédigé ce texte n’ont prévu comme sanction que le retrait définitif de licences quelle que soit la faute. De plus, ces licences ne sont même pas transmissibles aux enfants, alors que dans la région, l’activité est plus familiale qu’individuelle. Nous apprenons à nos enfants le métier et les connaissances y afférentes, pour qu’ils les prennent en charge une fois que nous ne seront plus de ce monde.
- En tant que professionnels du tourisme, avez-vous été impliqués dans l’élaboration de ce décret '
Jamais. A aucun moment nous n’avons été sollicités. Sa promulgation a été une grande surprise pour nous. C’est toute l’activité qui est en danger. De toute façon, nous sommes en pleine saison blanche.
- La saison s’annonce-t-elle blanche à cause de ce décret ou à cause de la situation sécuritaire '
Il est vrai que la fermeture inexpliquée de nombreux sites du Hoggar et du Tassili, le cœur même du tourisme à Tamanrasset, a porté un sérieux coup à l’activité. L’argument sécuritaire n’est pas convaincant, d’autant que depuis 2003, il n’y a jamais eu d’incident dans la région.
 Nous aussi sommes responsables de la sécurité de nos invités. Nous ne pouvons risquer leur vie. Nous savons que des décisions de ce genre ne pouvaient être prises sans l’avis des professionnels des agences de tourisme, dont l’activité fait vivre tout un pan de la société. Cela n’a pas été le cas et nous avons subi de plein fouet les réactions brusques des services de sécurité qui ont transféré des groupes de touristes par hélicoptère des sites touristiques à la ville, sans aucune explication, et ont fermé carrément la route reliant Djanet à Tamanrasset. Il y a comme une volonté de tuer dans l’œuf le développement du tourisme saharien. C’est une catastrophe pour la région et plus de 120 agences de Ghardaïa, Tamanrasset et Djanet vont mettre les clés sous le paillasson
- Qu’allez-vous faire maintenant que ce texte est promulgué et que dans un délai de trois mois, toutes les agences doivent être conformes aux nouvelles dispositions '
Nous effectuons actuellementdes démarches pour exposer nos préoccupations aux plus hautes autorités, à commencer par le ministre du Tourisme, puisque c’est sur rapport de ce dernier que le texte a été élaboré.
Une concertation avec les associations de Tamanrasset, Djanet et Ghardaïa est en train de se faire pour présenter un rapport commun aux autorités. Nous pensons que celles-ci vont être attentives et répondront favorablement à nos préoccupations pour sauver la saison qui s’annonce morte après les annulations de certains tour-operators, suite à la prise d’otages de Arlit, au nord du Niger.      
 


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)