Algérie - Revue de Presse

Il y a quinze ans, l’attaque du poste frontalier de Guemmar



La préparation de l’attaque 2ème partie Reprendre dans le détail les différentes étapes de la préparation de l’attaque du poste frontalier de Guemmar, à l’heure actuelle, est quasiment impossible du fait de la rareté de l’information rendue publique. C’est surtout sur la base des déclarations lors du procès des auteurs et de certaines indiscrétions qu’une certaine reconstitution, qui reste à compléter d’ailleurs, est possible. Il en ressort que la préparation de cette attaque a commencé, en fait, à Biskra où un noyau de militaires infiltrés avait commencé à agir dans la discrétion au sein d’une école spécialisée de l’armée et d’où il a opéré un contact avec Tayeb El-Afghani de son vrai nom Aïssa Messaoudi qui a été le cerveau de l’attaque de Guemmar et qui sera le dernier à être arrêté lors des opérations de recherches qui ont suivi cet acte terroriste. Selon des indiscrétions, pour le moment, c’est tout juste s’il est question d’un adjudant du nom de Tahar, affecté dans une école militaire de Biskra, mis au parfum par un lieutenant, Noureddine, qu’une organisation armée liée au FIS était en voie de constitution. Il est appelé à préparer un plan de vol d’armes et de munitions dans son école avant qu’il ne soit instruit de faire partie d’un commando chargé d’attaquer une unité de troupes spéciales basée à Biskra dans le cadre d’un plan touchant l’ensemble du pays. Son plan arrêté devait recevoir l’aval de Saïd Makhloufi à Alger et à Biskra même, celui de Tayeb El-Afghani.Un sergent, Nacer, est désigné pour assurer la liaison entre ces deux derniers et pour Alger avec un «imam», Abdelhamid, qui officiait dans une mosquée de Meftah (Blida) où se réfugiaient Makhloufi et Chebouti. Cet «imam» avait l’avantage de bien connaître l’Algérois où il résidait et la région de Biskra-El-Oued où il a fait son service militaire dans l’école des forces spéciales où d’ailleurs il officiait dans la mosquée de l’unité. On saura par la suite, par un «repenti» affirmant (El-Watan du 4 juillet 1998) que c’est au maquis qu’il a appris comment s’est déroulée cette attaque, que Tayeb El-Afghani avait besoin d’une «fetwa» pour légitimer son action armée. Selon lui, il avait demandé la tazkiya (assentiment religieux) à El-Bouti (Saïd Ramadhane El-Bouti, mufti syrien, ndlr) qui a refusé, à Abassi Madani qui a répondu: «Je ne refuse pas et je n’accepte pas», et à Hekmatyar (le chef de guerre Afghan, ndlr) qui a donné son accord. Et c’est sur cette base que la préparation est lancéeLors du procès de cette attaque qui aura lieu en avril-mai 1992, les membres du groupe de Guemmar arrêtés sont unanimes pour dire que leurs préparatifs pour le passage à l’action armée ont commencé à l’issue de la grève insurrectionnelle de mai/juin 1991, sur instigation de Tayeb El-Afghani et d’un autre «Afghan» et membre du SIT, Mohamed Dehane dit Abou Sihem, dit Abderrahmane, originaire de Sidi Khaled (Biskra) où il est né en 1957. Et ce ne sera qu’en 2006 que l’on saura par un «émir» du GSPC, toujours dans le maquis, Mokhtar Benmokhtar dit Khaled Abou El-Abbès, dans une interview à la «commission information» de cette organisation terroriste, publiée sur son site Internet, qu’Abou Siham avait couru le «front afghan» pour inciter les Algériens qui y étaient à rentrer pour lancer le «djihad» dans leur pays. Les préparatifs Les apprentis terroristes se sont divisés en trois groupes qui se sont retirés, dès juillet 1991, pour s’entraîner au maniement d’armes dans des palmeraies dont celle d’un de leurs membres, Abdelhak Boudjelkha. On ne peut, ne pas s’interroger sur son lien de parenté avec Mohamed Tidjani Boudjelkha, le chef de file de la djaz’ara, à partir de la faculté centrale de l’université d’Alger au début des années 1970 qui, non seulement porte le même nom de famille que lui, mais aussi, comme lui, est originaire de Guemmar. Un autre membre du groupe prénommé Djamel, fait partie de cette même famille. Le plus criminel dans cette opération a été, selon les déclarations d’un membre du groupe, Abdelhakim Chenna. le recrutement de jeunes adolescents parmi les désœuvrés, sur consigne de Mohamed Seghir Mahmoudi par qui, il a été lui-même, recruté et chargé de constituer son propre groupe. Ainsi, il a formé un groupe de jeunes âgés entre 17 et 19 ans, tous originaires de Guemmar, parfois membres des familles des terroristes comme Djamel Rouissi, Smaïn Bari (ou Baghli), Abderrahmane Chefah, Noureddine Souid, Bachir Gouba, Ali Gahaf et Laïd Laïb. Et dans le même esprit, Mohamed Ali Lada, un autre membre du groupe, a recruté six jeunes, avant que les deux groupes ne fusionnent et se mettent aux entraînements dans des palmeraies jusqu’au jour de l’attaque. C’est sans doute à cet aspect que Chouchane a fait allusion en réduisant l’attaque à «24 adolescents qui ne savent même pas manier les armes». C’est dans la palmeraie de Boudjelkha que les trois groupes se sont regroupés (deux de Guemmar et un de Belila dont la liaison était assurée par Mohamed Zakaria) dans la nuit du 28 novembre 1991. Ils étaient sous l’autorité de Mohamed Dehane qui les a mis en confiance en leur apprenant que le plan de la cible était fiable du fait qu’il a été élaboré par Mohamed Rouissi qui y avait fait son service militaire et que la reconnaissance des lieux avait été faite et confirmée par Abdelhamid Baghli et Mohamed Seghir Mahmoudi dit Salim. Il est à noter que ce dernier ainsi qu’un autre membre du groupe, Ali Sennouga, sont des anciens militaires qui ont fait leurs classes dans les forces spéciales et ont fait l’Afghanistan. C’est en «émir» que Mohamed Dehane a pris la parole. Il présente les différents chefs de groupes à tous les présents et les informe qu’ils venaient de mettre sur pied ce qu’il appelle le Mouvement islamique armé (MIA) qui, selon lui, est déjà constitué dans huit wilayas et qu’il était en cours de formation dans le reste du pays. Il les a assurés que l’attaque va s’opérer simultanément et à la même heure, à Alger, Djelfa, Laghouat, Tlemcen, Sidi Bel-Abbès, Tébessa et Batna. A coups de versets coraniques, il les harangue de dépasser la peur dans l’attaque projetée, la même nuit, en leur assurant que toutes les conditions de réussite étaient réunies. Les terroristes furent alors répartis en quatre groupes chargés respectivement de l’attaque du poste de police (Soltane Mahmoudi et Ahmed Osmane), de l’incursion dans le magasin de l’armement (entre autres, Salim Mahmoudi, Toufik Mahmoudi, Abdellah Taraâ, Khaled Kazouz, Mohamed Rouissi), de la soute à munitions (Kamel Rokh et Abdelhak Boudjelkha) et de la récupération de véhicules pour le transport des armes volées (Messaoudi Aïssa dit Tayeb El-Afghani et deux autres terroristes). Le repli et la protection étaient assurés par le reste du groupe dirigé par Mohamed Dehane. Ainsi cette attaque va révéler à l’opinion publique que les menaces récurrentes de «proclamation du djihad» que brandissait le FIS, depuis sa création, ont fini par être exécutées. La nature monstrueuse des crimes perpétrés cette nuit-là, a confirmé que les surenchères du discours intégriste étaient loin de se limiter à un jeu qui ne dépasserait pas, tout au plus, le stade de l’intimidation des forces hostiles au projet du FIS qui allait embraser le pays. Cette nuit-là, les «Afghans» Mohamed Dehane dit Abou Sihem et Aïssa Messaoudi dit Tayeb El-Afghani, sont à la tête d’un groupe d’une quarantaine de terroristes. Parmi eux, des cadres locaux, élus et militants du FIS et du SIT (son organisation syndicale), dont le maire de Guemmar lui-même, Amar Lazhar, qui est également un ancien officier de l’armée -qui n’a pas hésité à faire participer son propre fils, Ali- et le chef du bureau exécutif local du parti, Abdelhamid Baghli. Il faut souligner qu’ils avaient la partie facile dans cette nuit du jeudi 28 au vendredi 29 novembre où plusieurs soldats étaient en permission de week-end. Précurseurs en matière d’attaque contre des infrastructures militaires, ils ont basculé, corps et âme, dans l’attaque du poste frontalier qui était mitoyen également d’une unité de la défense aérienne. Un poste qui n’avait, en fait, que le nom. C’est à peine s’il avait tout un côté clôturé, tout juste, d’une haie de roseaux ou branches de palmiers. C’est sans doute ce qui a encouragé son attaque. A suivre...


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