Il arrive que l'ENTV fasse ?uvre utile. Pas forcément pour les raisons qui motivent ses programmations, pas parce que ses responsables ont des passages inspirés mais simplement parce que dans ce qu'ils considèrent des ?uvres «sans risques», il y a quand même des moments de... dépoussiérages paradoxaux au vu de l'âge de certaines productions qu'ils proposent. En matière de production cinématographique spécialement, c'est pourtant tout le contraire qui saute aux yeux du téléspectateur à chaque fois que l'occasion lui est donnée, de revoir ou de carrément découvrir un vieux film algérien. Il se rappelle-ou se rend compte pour la première fois- alors que dans une autre vie, son pays faisait du cinéma. En dépit des moyens dérisoires, en dépit d'une formation souvent primaire et surtout en dépit de l'environnement politique des années de plomb, l'Algérie a pu produire des films qui, s'ils n'étaient pas des modèles esthétiques et techniques, étaient quand, même dans les standards de l'art cinématographique. Y compris quand par endroits, les cinéastes participaient à la promotion du discours officiel de l'époque, par contrainte ou par sincère conviction, il y avait toujours des talents et des «détours» expressifs pour le rendre moins lourd et éviter de la sorte de l'éloigner de l'entreprise de propagande, mortelle en tout lieu et en tout temps pour toute production artistique. Tenez, avant-hier, on a eu droit à Vent du Sud. Réalisé par Mohamed Slim Riadh en 1975, le film n'est ni celui qui a eu le plus de succès, ni celui qui a le plus osé, ni celui dont on se rappelle spontanément en évoquant le cinéma de l'époque. Il fallait pourtant le revoir pour mesurer à quel point ,il était en avance sur ce qui se fait... aujourd'hui. Au-delà du fait de nous faire vivre un moment de cinéma de chez nous, dont nous sommes orphelins depuis longtemps, il nous replace devant deux régressions : celle, culturelle, avec une longue période désertique où le pays n'a pas remplacé un seul des acteurs de Vent du Sud, morts ou affaiblis par l'âge. Puis, celle de la société. Ce film n'est pas celui qui a cassé le plus de tabous, pas celui qui a osé un ton ou des scènes de liberté. Mais ce n'est pas sûr qu'il soit bien accueilli aujourd'hui, ne serait-ce qu'en raison de quelques répliques, sur la religion, essentiellement. Quarante-cinq ans après Vent du Sud, le cinéma algérien n'a pas d'autres Nawal Zaâtar et n'a pas d'autres Boualem Bennani. Pire, il n'est pas sûr que ses «cinéphiles, toujours prompts à s'évanouir pour un bout de sein nu, acceptent ce qui se faisait... il y a longtemps».S. L.
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Posté Le : 22/07/2020
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Slimane Laouari
Source : www.lesoirdalgerie.com