Il y a 69 ans, le Groupe des 22 se réunissait à Clos-Salembier Le jour où tout a basculé

Publié le 25.06.2023 dans le Quotidien l’Expression
Par Amirouche Yazid

Il y a 69 ans se tenait la réunion historique du Groupe des 22. Celle qui se prononça pour le déclenchement de la lutte armée, un certain 1er Novembre 1954. Abritée par la modeste villa de Lyes Deriche, sis au Clos-Salembier (El Madania actuellement), la réunion a tracé la voie à suivre. Issus de l'Organisation spéciale (OS), les 22 se sont prononcés «pour la révolution illimitée jusqu'à l'indépendance totale».
Un principe qui donnera lieu, quatre mois plus tard, au déclenchement de la révolution de Novembre. C'est qu'il n'a fallu ni faste ni une présence pléthorique pour forcer le cours de l'Histoire.
Une modeste villa et un groupe de militants armés de conviction et d'engagement ont suffi pour forcer le destin de l'Algérie en lutte. Personne ne savait ce qui allait s'y passer. Les plus avisés des militants savaient seulement qu'une réunion des cadres Scouts allait se tenir quelque part dans le quartier.
C'est ce qu'a affirmé Noureddine Chabane, moudjahid, longtemps directeur du Centre culturel d'El Madania, après l'indépendance. Incontestablement, c'est cette réunion qui tracera la voie de la révolution.
Elle a permis de dépasser les hésitations et d'effacer les divergences entre différents courants du Mouvement national. Il fallait donc libérer le Mouvement national de son impasse pour qu'il enclenche la libération du pays. Ce qui sera acté à l'occasion de cette réunion, minuscule par la taille, mais qui sera d'un grand impact sur le chemin de la liberté. Et le devenir de toute une nation. Mais pourquoi la réunion des 22 était-elle cruciale? Pour la simple raison qu'elle a consacré le principe de la lutte armée.
Il est vrai que ce sentiment de la nécessité de passer à la lutte armée était partagé au sein des Algériens au lendemain de la sauvagerie des évènements du 8 mai 1945. Il n'a pas été cependant catalysé politiquement pour sonner le déclic.
C'est justement la réunion historique du Groupe des 22 qui a donné corps à la prise de conscience libératrice du pays. Elle a marqué une rupture avec les modes de lutte. Et c'est à partir de cette réunion qu'a été entériné le choix de la lutte armée. Ce choix a conforté la création du Comité révolutionnaire d´unité et d´action (Crua), trois mois plus tôt. L'importance de la réunion du Groupe des 22 ne se limitait pas cependant au fait d'avoir retenu le principe du passage à la lutte armée. Cette réunion a doté également la révolution des Algériens des instances et structures nécessaires pour la lutte armée.
En matière de structures, les participants ont retenu le principe d´organiser la lutte armée en divisant le territoire national en cinq circonscriptions. Elles deviendront les cinq wilayas. Il s'agit des wilayas d´Alger, Constantine, Oran, les Aurès, et de la Kabylie. Elles ont été placées sous les responsabilités respectives de Rabah Bitat, Didouche Mourad, Larbi Ben M´hidi, Mustapha Ben Boulaïd et Krim Belkacem.
Les participants ont également arrêté d'autres modalités liées, notamment au financement de la lutte et à l'approvisionnement en armes. Et devant le déséquilibre des forces en présence, il fallait mettre en place le mode de guerre le plus adapté.
Ce qu'a tracé la réunion des 22. Faisant suite à cette réunion, une autre se tiendra en octobre 1954.
Elle verra la transformation du Crua en Front de Libération nationale, avec son aile militaire: l´Armée de Libération nationale.
Et c'est dans ce contexte de maturation de l'esprit de la lutte qu'interviendra le 1er Novembre 1954 marquant le passage à l'action armée. C'était le grand écho de la réunion des 22.