Il faisait presque beau en ce vendredi après- midi. La météo avait annoncé des perturbations, un petit vent et même de la pluie. Mais à Staouéli, on a appris depuis longtemps à ne pas faire partie d'Alger quand il s'agit de prévisions météorologiques.En la matière, l'ouest d'Alger fait «cavalier seul», et la nature nous a souvent gratifiés de ces singularités qui font qu'il peut pleuvoir à Baïnem et pas à Aïn Benian. Ou à Aïn Benian et pas à Staouéli.
C'est comme ça, il paraît qu'il pleut toujours là où c'est mouillé. Mais ici, la pluie tombe plutôt là où c'est moins sec.
A Staouéli, il ne pleut pas autant qu'à Alger, mais on a autant peur. Sinon plus peur encore parce qu'on a moins l'habitude. La pluie est déjà problématique dans ce pays, elle l'est encore plus quand elle vous prend par surprise.
A Staouéli, la pluie est souvent une surprise parce que quand la météo l'annonce sur la capitale, on se sent rarement concerné.
Paradoxalement, mais ce n'est plus un paradoxe depuis longtemps, la pluie est aussi problématique que la sécheresse. On se plaint de son absence, on l'attend, on organise même des prières pour qu'elle tombe.
Et quand elle arrive, on entend plus parler des catastrophes qu'elle cause que du bien qu'elle procure à la terre, des récoltes qu'elle sauve et des barrages qu'elle remplit. A Staouéli plus qu'ailleurs, on n'a pas vraiment besoin de pluie.
ça fait longtemps que les orangeraies et les cultures maraîchères ont été bouffées par le béton. Sidi Fredj et ses tentaculaires démembrements, les cités dortoirs et l'autoroute n'ont laissé à la vie que les terrasses d'une avenue à brochettes, à crèmes glacées et à pizzas.
Les tables ont pris la place des arbres pour faire oublier que la mer est toute proche. A Staouéli, il n'y a même plus de poisson.
Il y a la chawarma, l'ennui à ciel découvert et des cafés sans sanitaires. Quand la pluie tombe, les gens rentrent à la maison en même temps que les tables et les terrasses.
Quand il pleut, c'est à la maison qu'il y a plus de danger. Pour les gens, pas pour la tables. Mais on se précipite quand même pour rentrer, un peu comme la grenouille qui plonge dans l'eau pour ne pas se mouiller.
A Staouéli, comme ailleurs à Alger, on panique aux premières gouttes. Pour rejoindre sa chaumière ou pour rejoindre sa voiture, on court sans savoir pourquoi. Une fois au volant, les gens deviennent tous plus dangereux que la pluie.
C'est le danger qui prétend fuir le danger en multipliant le danger. Le péril n'est pas toujours réel. Les avaloirs inexistants ou éternellement bouchés, si.
Les maisons ne tombent pas dans les beaux quartiers. On comprend donc pourquoi les habitants des beaux quartiers qui ont des voitures pour fuir la pluie sont plus pressés que tous les autres. Vendredi, il a plu sur Staouéli et comme de bien entendu, tout le monde a paniqué sur la route de la fuite.
Il y avait de quoi. Quelques minutes pour dépasser Club des Pins, le quartier où il n'arrive jamais rien parce que ce n'est pas un quartier. Après ça le déluge. Plus on s'en éloigne, plus on se pose cette question : quand il pleut, est-ce que l'eau tombe du ciel ou remonte de la terre en explosant le bitume '
Sur la route d'Aïn Benian, une fois Club des Pins dépassé, on n'a pas le temps de répondre aux questions, c'est déjà la noyade.
Slimane Laouari
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Posté Le : 16/11/2013
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Le Temps d'Algérie
Source : www.letempsdz.com