Algérie

Il n?y a pas de régions sans avenir...



Il n?y a que des zones sans projet ! Ce postulat, s?il venait à être démontré, serait un principe à mettre à l?indicatif du Dr Rachid Benaïssa, ministre délégué au Développement rural, invité du forum de la télévision, lors de la soirée de vendredi dernier.Il semble apparemment et selon la vision des plus hauts décideurs, que cette option semble faire son petit bonhomme de chemin. Avant d?aborder ce sujet de portée nationale et de grande profondeur prospective, impliquant pas moins de 23 secteurs d?activité, il y a lieu de faire remarquer que le vis-à-vis du ministre, soit une partie de la presse nationale, péchait par l?absence de grands rédacteurs capables de rehausser le débat de plusieurs crans. La relative jeunesse du panel journalistique, l?immaturité professionnelle aidant, a fait que le débat était à l?avantage du membre du gouvernement. On a de ce fait « localisé » les difficultés gauchement rapportées. Il aurait été judicieux de faire précéder ce débat d?un nivellement préalable pour la mise en avant des enjeux d?une telle démarche. L?on me dira alors pour quelle raison ne l?aurait-on pas fait pour les autres secteurs qui se sont succédé bien avant ce jour ? Faut-il rappeler et selon les propos de l?invité, que ce programme multisectoriel présenté au président de la République aurait été qualifié de projet d?Etat. Ce programme dont la mise en oeuvre pour le moyen terme nécessitera une enveloppe de 23 milliards USD, qui pourrait évoluer jusqu?à 80 milliards pour le long terme, renseigne sur la visée structurante d?un monde considéré jusqu?ici comme tertiaire. C?est dire toute l?ampleur de l?enjeu socio-économique à la mesure des ambitions politiques d?intégration dans une économie mondiale sans perdition de l?âme nationale. Rachid Benaïssa avance même un néologisme approprié qui est la «glocalisation». Le cas d?Etienne Dinet alias Hadj Nacereddine (1) a été la meilleure démonstration pratique de cette vision, que le ministre a eu l?heur de mettre en avant quand, à la fin de l?émission, l?animatrice la soumit au rituel des questions-réponses.On présume et si c?est bien compris, que la mondialisation ne doit en aucun cas gommer les repères socioculturels du terroir, mais que ce dernier s?approprie les bienfaits de celle-ci en les intégrant dans sa manière d?être.Une difformité neuronale fait que nous n?envisageons de grands desseins de développement qu?aux méga-structures administratives; c?est ainsi que notre Soraya nationale est tombée à deux reprises dans l?escarcelle du trappeur.Une première fois en faisant remarquer que le département du Développement rural n?a pas de prolongement territorial (directions de wilaya) en éludant inconsciemment les directions des services agricoles, et une deuxième fois en déniant au ministre la possibilité de parler du logement rural, volet qu?elle réserverait au ministre de l?Habitat lors de son passage sur le plateau. Exclusivisme quand tu nous tiens !Si l?absence du prolongement territorial du département est structurellement perçue, c?est déjà une reconnaissance de l?appropriation du projet par des divers partenaires, wilaya, daïra, commune, société civile, paysannerie etc. L?on aura remarqué sur le même plateau que le staff ministériel était réduit à quelques cadres, le reste était constitué de membres de la société civile, Scouts Musulmans etc.C?est dire le peu de cas dont il est fait de la machine bureaucratique. Quant au parallèle-raccourci qu?on prend pour trouver une quelconque similitude entre le logement rural et l?ex-village agricole, cette perception est à notre sens biaisée. La différence entre les deux options est opposable à celle qui différencie le logement individuel du logement collectif. La deuxième particularité du premier sur le second, réside dans le fait que pour l?un, on construit soi-même et que pour l?autre il est construit par un tiers. Décidément, il apparaît de toute évidence que l?intégration serait un vain mot dans l?esprit de beaucoup de têtes dites pensantes. On ne semble croire qu?au nombre au détriment de l?intelligence du management moderne où la structure matérielle prend peu de place pour céder le pas au savoir-faire, la pertinence et la cohérence.Cette soirée télévisuelle de grande portée didactique, malgré le temps imparti habituellement consacré, a semblé très courte. Le développement rural, maître mot de ce débat, a introduit, contrairement aux sentiers battus de la redondance, une terminologie jusque-là peu usitée, qui fait irruption dans le discours politique : renouveau rural, proximité, accompagnement, projet en partenariat. La réintroduction d?adages populaires, tels que « r?fig kabl ettrig » (chercher le compagnon avant la route à prendre) ou « emchi ourah machi goudamou » (ne le précède pas, suis-le !) sont d?une savoureuse fraîcheur dans le contexte. Lavoisier avait décidément bien raison !A la candide question d?un journaliste relative à la ruralisation de la ville, le ministre ne lui opposera que cette sentence : « la ville doit perdre son artificiel attrait pour un naturel rayonnement ». En Europe certains produits d?origine rurale, tels que les fromages par exemple, ont donné à leur cru, un label mondial. Tant il est vrai, qu? il est des cas de l?espèce où le produit intégré a fait la réputation de la zone rurale où il était manufacturé, tel l?exemple de Mostefa Ben Brahim pour le matériel agricole ou Birtouta pour l?aviculture ou encore N?gaous pour l?arboriculture. Ceci était le fait de l?initiative gouvernementale, l?inversion de la tendance devrait être de l?initiative privée. Il est des concepts à rectifier dans l?inconscient collectif, tel que celui d?accoler la ruralité exclusivement au travail de la terre. Sur les 1.541 communes que compte le pays, 970 communes sont réputées rurales ou à potentialités rurales à valoriser. Elles seraient à vocation agricole à seulement 39%. L?objectif générique de la promotion de la ruralité dans sa connotation moderne, est d?abord la fixation de la population, plus de 90% des communes qui ont connu un exode massif lors des turbulences vécues par le pays, sont en phase de reconstitution de leur bassin démographique.L?approche de fixation économique et de bonification des ressources aussi bien humaine que matérielle est soutenue par des mécanismes d?appui intitulés : Projets de proximité de développement rural intégré (PPDRI).C?est dans cet espace que les cellules d?animation rurale trouveront toute leur plénitude. Constituées de cadres administratifs, d?élus et de la société civile (personnalités influentes, associations et bénéficiaires), ces entités débureaucratisées limitent elles-mêmes leur champ d?action à l?encouragement et l?accompagnement de projets individuels, familiaux ou collectifs porteurs et c?est déjà le début de l?appropriation. Quelque 3.960 projets identifiés en 2007 sont en phase de maturation, une première tranche vient d?être lancée cette année. Ils ont nécessité un financement de 5 milliards USD. Cette approche novatrice où l?implication des bénéficiaires conditionne et la pertinence et la pérennité du projet, peut produire un phénomène d?aspiration centripète de l?espace rural valorisé, à partir des bassins périurbains à genèse semi-rurale ou rurale. L?interactivité induite par cette approche aboutirait sans nul doute au triptyque : ruralité à assumer, potentialités à valoriser, avenir à construire. La population rurale touchée par ces mécanismes serait déjà de l?ordre de 6.000.000 dont 70% constitués de jeunes. L?édification du processus reposera d?abord sur les potentialités juvéniles, notamment les diplômées d?entre elles. Il est généralement de coutume dans l?imaginaire collectif et selon le ministre, que la population rurale ne serait constituée que de vieux paysans enturbannés; loin s?en faut, c?est ainsi que la deuxième ligne générationnelle est présentement ciblée. La femme rurale qui n?est souvent pas prise en compte est en bonne place dans les projections économiques de ce renouveau. A la question de l?animatrice, qui était en fait une contre-vérité, et qui s?interrogeait sur l?absence de gros investissements en milieu rural, le ministre n?a eu que cette réponse : « C?est vous qui le dites !... Allez du côté de Aïn Témouchent ou de Sidi Bel Abbès, beaucoup de nationaux revenus de l?étranger s?y sont établis ». Les exemples de fixation économique des populations foisonnent, la vallée de la Soummam, les Ziban, le Hodna et bien d?autres régions sont devenues, grâce à l?initiative individuelle, souvent accompagnée par les services de l?Etat, de véritables pôles attractifs dans l?agriculture ou l?agro-alimentaire.Cette homérique aventure, est-elle une chimère ou bien une laborieuse réflexion adossée à une analyse pointue scientifiquement éprouvée d?ordre socio-économique et anthropologique, et c?est le moins que l?on puisse en attendre ? Il est certain, selon les propos tenus, que l?étude enclenchée en 2003 est actuellement en phase d?exécution. Quels en sont les instruments d?évaluation et les moyens de supervision de cette approche managériale dans un espace réputé enclavé dont les moyens de communication, souvent rudimentaires, posaient à eux seuls une problématique d?inefficience ? Joignant le geste à la parole, le département ministériel, conscient de l?enjeu de la bataille de la communication, notamment celle de l?information extemporanée, crée le logiciel dénommé : Système d?information du programme de soutien au renouveau rural (S.I.P.S.R.R.). Ce système visualise déjà 3.777 projets inscrits dont 700 en voie de réalisation dans 43 wilayas qui ont souscrit au processus. Une foule d?informations circule entre les aires d?intervention et les points focaux. L?échange et la communicabilité rendent le réseau perméable à l?introduction ou au puisage de données. Cette possibilité offerte à l?espace rural de faire part de la difficulté rencontrée, c?est déjà l?ébauche de la résolution de cette même difficulté et l?évacuation définitive du chapelet traditionnel des « inchighalate ». Il restera toujours des enclaves silencieuses où l?assistanat est érigé en règle de conduite, mais l?exemple suscitera l?émulation. L?exercice pratique nous est venu de ce téléspectateur qui faisait état de l?indisponibilité d?eau potable, qu?il était contraint de ramener à dos de baudet, ou encore de ce jeune de T?Kout, au coeur des Aurès, qui disait que sa localité ne bénéficiait d?aucun attribut précédemment évoqué. Ces deux interventions apportaient de l?eau au moulin du membre du gouvernement, elles venaient à point nommé dans la mesure où leur respective préoccupation était véhiculée par courrier électronique et rien que ça ! Ceci ne fit que conforter la conviction que le réseau d?information et de communication interactive constitue l?une, si ce n?est pas la première condition de réussite d?un tel projet. Cet édifice donnerait l?effet d?une construction pyramidale tronquée s?il n?intégrait pas un sommet et c?est ainsi qu?il est envisagé un Système national d?aide à la décision pour le développement rural (S.N.A.D.D.R.). Il était admis jusqu?ici et par tous que la fonction du sommet est de nature décisionnelle, ceci pour le principe, mais l?exigence de la bonne décision n?était pas requise. Cet outil aura le mérite de se prémunir du tâtonnement et de permettre aux décideurs d?appréhender toutes retombées de l?acte décisionnel induit. Cette prise de décision assistée ne peut que prémunir de l?empirisme et de la disparité des réponses à un même objet. Ceci ne peut dénoter que d?une volonté de souscription à une nomenclature normative, outil indispensable à tout système de suivi et d?évaluation de niveau universel. Enthousiasmante par sa démarche presque ludique, cette planification prospective pour le renouveau rural demeure tout de même une des préoccupations majeures de la nation, sachant qu?elle met en jeu l?avenir de près de 14.000.000 de nos concitoyens dont les 2/3 sont des jeunes. Il a été remarqué lors de ce débat, la présence d?un « vieux » correspondant de presse qui a rappelé au ministre ses initiatives heureuses dans la relance du repeuplement camelin et équin. Les résultats de ces deux opérations lancées à la fin des années 80, auraient donné des résultats satisfaisants. On apprend que le cheptel camelin a augmenté de 2,5 fois et équin de 3,5 fois. Le ministre rebondit sur le sujet du cheval pour dire que le barbe s?est « éteint » en 1962, par la volonté de la force d?occupation qui voulait faire disparaître cette race.La preuve en était donnée par la privation de croît de l?étalon offert en 1976 par le président Houari Boumediene au président français, lors de sa visite dans notre pays. Cette tentative faisait partie d?une ultime manoeuvre post-coloniale d?occultation, d?un trait socioculturel de l?Algérie profonde. Et ce n?est qu?en 1989 que cette race est de nouveau enregistrée mondialement.  Note :1- Peintre orientaliste né à la fin du 19ème siècle, issu d?une famille aristocratique parisienne dont la croyance et la culture furent phagocytées par une culture agropastorale bien de chez nous.


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