Algérie

"Il n'existe pas de plan de préservation contre les inondations"



Liberté : Les inondations qui ont ciblé samedi plusieurs villes du pays prouvent, encore une fois, que les responsables n'ont pas retenu les leçons des précédentes catastrophes et que l'Algérie ne dispose toujours pas d'une véritable stratégie de prévention contre les inondations, voire tous risques majeurs. Seriez-vous de cet avis 'Pr Abdelkrim Chelghoum : Oui, l'Algérie ne dispose toujours pas d'une véritable stratégie de prévention contre les inondations. Celles-ci sont le résultat des averses saisonnières, notamment automnales, attendues depuis quelques mois déjà. Il est inconcevable que ces inondations touchent les 57 communes de la capitale.
Dans la plupart des quartiers, les routes, les trémies, le tramway... ont été inondés. Le même constat est établi à Blida, à Boumerdès, à Tizi Ouzou..., pour ne citer que ces wilayas. Cela prouve clairement qu'il n'existe pas un plan de préservation contre cette catastrophe naturelle, à savoir les inondations. Pourtant, la loi 04-20, qui prévoit des mesures préventives contre ce phénomène, n'est malheureusement pas appliquée. Pis encore, cette loi est restée dans les tiroirs car les textes d'application ne sont pas encore promulgués depuis le 25 décembre 2004. Ce qui a engendré, depuis cette date, une urbanisation débridée et un aménagement du territoire obsolète où tous les projets ont été édifiés sur des sols non aedificandi (non constructibles). Il faut rappeler que toutes les grandes villes d'Algérie sont traversées par des oueds, mettant en péril la vie des populations.
Rien qu'à Alger, l'on recense 101 oueds. En Algérie, il y a un problème, non pas de gestion des risques, mais de catastrophes, que l'on gère au jour le jour. D'où la nécessité d'un plan de protection des constructions en zones inondables. Or, cette opération revient plus cher pour le contribuable et le Trésor public. Si ce plan avait été mis en ?uvre auparavant, on aurait réduit de 90% ces pertes en vies humaines et matérielles.
Depuis quelques années, on note en moyenne trois énormes inondations par année à travers le territoire national. Comment peut-on faire face à ce péril permanent '
Cela est un cycle normal de la nature. Il s'agit d'une activité pluviométrique que l'on appelle pluies de convection. Celles-ci, en revanche, s'avèrent dangereuses quand il n'y a pas de mesures préventives en milieu urbain. Et le phénomène ne cesse de s'accroître depuis plusieurs décennies. Le nombre de communes confrontées à des inondations est passé de 400 en 2004 à 850 en 2021. Le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec), un organisme des Nations unies, a identifié 20 points chauds dans le monde et l'Algérie occupe une pole position. Les conséquences du réchauffement climatique sont évidentes et causent des inondations terribles, des vents ravageurs, des incendies de forêt, des températures record... Et notre pays n'est pas épargné.
On constate que depuis la promulgation de la loi relative aux catastrophes naturelles en 2004, à la suite des inondations de Bab El-Oued des 9-10 novembre 2001, que rien n'a été fait pour protéger les personnes et les biens contre ce phénomène. Partagez-vous ce constat '
C'est une honte : sur les 48 chefs-lieux de wilaya, 35 sont inondés chaque année. Ce triste constat doit interpeller les plus hautes autorités du pays. Il faut associer les experts et autres spécialistes, s'appuyer sur leurs orientations et mettre en ?uvre sur le terrain leurs recommandations pour trouver enfin des solutions pérennes. Les travaux de la dernière conférence sur les risques majeurs organisée, il y a quelques mois, par le ministère de l'Intérieur au CIC ont été sanctionnés par une série de recommandations à court, moyen et long termes. Mais depuis, rien n'a été fait malheureusement...
En dépit des dispositions de la loi 2004 qui interdit formellement la réalisation d'ouvrages sur les zones qualifiées de zones non aedificandi, on continue à édifier des ouvrages sur ces zones. Et les dommages lors des phénomènes naturels sont énormes. Pensez-vous que le rôle des pouvoirs publics reste primordial dans ce sens '
La responsabilité des pouvoirs publics dans cette problématique est engagée. Les citoyens occupent des appartements AADL, LPP, promotion privée... dont les promoteurs ont obtenu toutes les autorisations requises pour la réalisation de leurs projets immobiliers. Il appartient donc aux pouvoirs publics de mettre en place des mesures, afin de protéger toutes ces constructions licites, mais édifiées dans des zones dangereuses.

Propos recueillis par : BADREDDINE KHRIS


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