Le corps sans vie de l'enseignant universitaire et militant des droits de
l'homme et du Mouvement social et démocratique (MDS), Ahmed Kerroumi, âgé de 53
ans, disparu depuis mardi 19 avril, a été retrouvé, hier, vers 12h30 au siège
du parti MDS situé au Plateau.
C'est un membre de la fédération du MDS d'Oran qui a fait cette découverte
tragique alors qu'il se rendait au siège pour récupérer le cachet du parti dans
le but d'officialiser un communiqué sur cette disparition et le rendre public.
Aucune information n'a filtré sur les causes du décès. La dépouille a été
transférée vers 16 heures à la morgue pour une autopsie. " Toutes les
hypothèses sont ouvertes ", nous dira le représentant du MDS, M.Kateb,
lors d'une conférence de presse animée dans un café près du siège du parti,
" et c'est l'enquête qui doit faire éclater la vérité.
Nous laissons les institutions
républicaines faire leur travail et personne n'utilisera cet évènement pour
entraîner notre résolution et poursuivre notre combat ". " Tout le
monde est consterné par cette perte collective. Nous restons mobilisés et
vigilants pour que les institutions républicaines concernées exercent toutes
leurs responsabilités jusqu'à ce que la lumière soit faite sur la perte d'Ahmed
Kerroumi. Il s'agit là de la crédibilité de ces institutions républicaines
", ajoute M.Kateb.
Choqué et bouleversé après avoir vu le corps inerte allongé par terre
dans un bureau à l'intérieur du siège, le représentant du MDS qui est aussi ami
du défunt a vite fermé la porte et alerté la police de cette découverte. Il
était 13h50, devant le siège du MDS, trois amis et militants avec le défunt au
parti ainsi que deux membres de la ligue des droits de l'homme et membres de la
coordination pour le changement et la démocratie (CNCD) attendent devant la
porte. Les agents de police étaient à l'intérieur pour voir le corps. Ils
avaient interdit l'accès à toute personne étrangère. Les visages étaient pâles.
La nouvelle a été tellement brutale que personne ne trouvait ses mots et ne
réalisait encore ce qu'il venait d'apprendre.
Encore sous le choc, les amis du défunt, abattus, ne savaient pas comment
annoncer la nouvelle à son épouse, très inquiète de la disparition de son mari
depuis cinq jours. On peut se préparer à toutes les situations sauf à celle de
faire l'oiseau de mauvais augure et annoncer la mort de quelqu'un à sa famille.
Le choix a finalement opté sur un de ses amis et compagnon de lutte depuis de
longue date. C'est en traînant le pas avec les larmes aux yeux que l'ami du
défunt se rend avec un autre ami au domicile de la famille. Arrivés à
destination, c'est le fils du défunt qui ouvre la porte. Calme et souriant, il
fait monter les visiteurs sans poser de question sur la raison de la visite.
Devant la porte de la maison, c'est la sÅ“ur de l'épouse du défunt qui accueille
les deux visiteurs, sans se douter un instant qu'ils étaient venus annoncer la
mauvaise nouvelle. Il a fallu peu de mots et beaucoup de courage pour pouvoir
articuler cette phrase qui tue: " Ahmed est mort ". " Non,
dites-moi autre chose. Ce n'est pas vrai. Ahmed ne peut pas mourir ", crie
en pleurant cette proche de la famille.
En une fraction de seconde, les cris des femmes qui étaient présentes au
domicile envahissent toute la cité. L'épouse du défunt était au commissariat
pour demander des nouvelles de son mari. Nous la rejoignons au commissariat
pour lui annoncer la mauvaise nouvelle. L'ami du défunt avait déjà accompli
cette mission difficile. Une fois alertée, Mme Kerroumi ne pouvait plus tenir
sur ses pieds. Ses voisins et membres de sa famille la tenaient par les deux
bras pour la ramener à la maison. Du commissariat au domicile, elle avançait en
traînant les pieds par terre, ne réalisant pas encore que son mari était mort.
" Ahmed n'est pas mort. Il est encore vivant ", criait avec peine et
amertume cette mère de deux enfants. "Il était mon frère et mon mari. Il
est parti et m'a laissée seule. Ce n'est pas la mort qui me fait peur, mais la
trahison ", ne cessait de répéter l'épouse du défunt.
Très choquée par l'évènement, elle n'avait plus les forces de remonter
chez elle. " Je resterais dehors. Je ne peux pas monter dans cette maison
où était Ahmed. Laissez-moi, je ne peux pas voir de nouveau cette maison
", criait encore Mme Kerroumi devant la porte de l'immeuble. Ses voisins
sont sortis pour la consoler et la soutenir. Mais le langage des larmes était
plus fort et rien ne pouvait consoler cette famille après la perte de l'un de
ses membres. D'un courage de fer et une bravoure de femme combattante, l'épouse
du défunt a tenu ses enfants dans ses bras dans la rue. Elle ne cessait de les
embrasser afin de les rassurer en leur murmurant, " Ahmed n'est pas mort.
Je suis là moi et c'est vous toute ma vie maintenant ". Elle hurlait à ses
voisins qui voulaient l'emmener de force à la maison, " je n'ai pas perdu
la raison. Je suis consciente et je resterai debout sur mes pieds avec mes
enfants ".
Elle fut ensuite conduite jusqu'au siège du MDS où le corps de son mari
était encore allongé. Mais elle n'a pas pu le voir. Les agents de police lui
ont interdit l'accès. Sa venue a été un moment émouvant qui a secoué toute la
foule qui était amassée devant le siège. Des militants du parti, des collègues
du défunt, des étudiants, les journalistes. Tous étaient sur les lieux dans ce
moment tragique.
La voiture du défunt n'a pas été retrouvée. Selon l'ami qui a retrouvé le
corps, aucun signe d'infraction n'a été remarqué lors qu'il a ouvert la porte
du siège et aucune odeur de décomposition n'a été sentie en découvrant le corps
du défunt. Tout le monde attend maintenant les résultats de l'enquête menée sur
cette mort tragique de cet enseignant universitaire qui n'a fait que semer la
joie autour de lui. C'est ce que tous ceux qui l'ont connu témoignent.
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Posté Le : 24/04/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Mokhtaria Bensaâd
Source : www.lequotidien-oran.com