L'exaspération
couve chez les pharmaciens d'officine, qui supportent de moins en moins d'être
transformés en commis de la Cnas qui les surcharge de tâches
administratives fastidieuses. En cause, le système Chifa
et son logiciel, jugé inadapté, qui entrave la mission de service public des
pharmaciens.
Il y a une année
déjà, des structures du Snapo alertaient les différentes
autorités de la santé publique sur la situation chaotique du marché du
médicament, marqué par les pénuries et les ventes concomitantes. Ils
n'hésitaient pas à parler de «déstabilisation économique du marché» avec des
«variations vertigineuses et anormales des prix des médicaments» qui empêchent
de faire des prévisions.
Les pharmaciens
d'officine soulignaient également que les marges bénéficiaires étaient trop
faibles et ne permettaient plus le financement du service public qu'ils sont
censés assumer. Et surtout, les pharmaciens s'estimaient trop encombrés par les
tâches administratives, jugés fastidieuses, qui leur sont imposées par les
caisses de sécurité sociale. «Ce sont des tâches administratives qui se font au
détriment de l'activité du pharmacien», déclare-t-on.
Une année après
ces réclamations, le bureau de la wilaya de Batna du Snapo
vient d'adresser un nouveau courrier aux structures concernées (Conseil de
l'Ordre, Cnas, Direction de la santé…) dans lequel il
constate que les problèmes évoqués une année plus tôt restent de mise. « Au
contraire, l'élargissement de la convention avec les caisses de sécurité
sociale à toutes les catégories d'assurés sociaux, bien qu'étant à sa
conception un outil moderne majeur pour une meilleure santé de la population, risque
de se transformer en véritable fardeau pouvant générer des accidents sanitaires
difficilement maîtrisables, accompagnés de risques de faillite financière des
officines».
De fait, l'annonce
de la généralisation depuis le 1er aout 2011 du système
Chifa à l'ensemble des assurés sociaux a avivé les
appréhensions des pharmaciens. Un récent sondage paru sur le forum des
pharmaciens «Pharmagroupe» donne 80% d'officinaux
mécontents du conventionnement dans sa forme actuelle. Avant même cette généralisation
et alors que le système ne concernait que les seuls malades chroniques, les
pharmaciens s'estimaient trop encombrés par les tâches administratives imposées
par les caisses de sécurité sociale.
Décollage, collage,
scotchage
«La convention actuelle,
c'est comme la mariée à qui l'on impose un mari, le seul qui puisse subvenir à
ses besoins strictement alimentaires : c'est à prendre ou à laisser», disent
certains pharmaciens. «L'officine est devenue une véritable administration qui
baigne dans la bureaucratie. Les malades assistent, lors de la remise de leurs
médicaments, à une série de procédures réalisées par le pharmacien ou son
équipe, qui vont d'une série d'opérations de vérification des ordonnances et
des boîtes, jusqu'au décollage puis au collage ‘scotchage'
des vignettes sur les ordonnances », lit-on dans le forum de discussion de
pharmaciens algériens.
Ces tâches
administratives sont non seulement fastidieuses, mais elles comportent des
risques. Une pharmacienne a vu sa convention résiliée car elle a procédé à une
régularisation d'ordonnance sur des médicaments remis aux malades, mais qui
n'ont pas été remboursés pour absence d'un cachet, d'une griffe ou pour un nom
mal transcrit. D'autres pharmaciens ont risqué la résiliation car ils avaient
rempli des médicaments périmés, alors qu'il leur était impossible de le
détecter avec le logiciel de la Cnas.
Un logiciel
inadapté
En fait, c'est le
système Chifa et son logiciel qui sont critiqués par
les pharmaciens d'officine. Alors qu'il devait permettre un meilleur contrôle
des dépenses, un meilleur accès aux soins et une maîtrise des opérations
administratives et comptables, le système Chifa se
transforme en entrave au bon fonctionnement des officines.
Le logiciel Chifa serait inapproprié. Non seulement il ne répond pas
aux exigences de sécurité des délivrances des médicaments, mais il ne permet
pas une gestion rationnelle et encore moins une substitution par les génériques.
«Le logiciel Chifa rend très difficile le contrôle et le suivi des
opérations qui sont liées au tiers payant» souligne Abdelatif Keddad, rédacteur en chef du Courrier du pharmacien. Le
logiciel de la Cnas ne permet pas de contrôler les
informations basiques sur les médicaments remis aux malades (dates de
péremption, lots, prix). Il ne permet pas de détecter d'éventuelles
interactions médicamenteuses entre les traitements pour les malades chroniques
et les nouveaux médicaments prescrits.
L'autre reproche
est l'alourdissement des tâches administratives liées à la gestion du
conventionnement au niveau des pharmacies. «Ces nouvelles tâches
administratives imposées par les caisses de sécurité sociale aux officines sont
de nouvelles fonctions au niveau de l'officine. Ce logiciel, conjugué à
l'absence de code à barres qui rend les tâches administratives fastidieuses et
lourdes, «empiète sur le temps et l'attention nécessaires pour une prise en
charge optimale des malades», écrit M. Keddad.
En outre, le
logiciel Chifa est réduit à la simple fonction de
facturation et ne permet pas la gestion des stocks et les substitutions, alors
que cela est faisable avec d'autres logiciels de gestion d'officine. Les
pharmaciens ne manquent pas de s'étonner de voir que le code à barres est en
train de se généraliser, alors que le médicament reste l'un des rares produits
à ne pas en disposer. Il est pourtant essentiel.
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Posté Le : 13/08/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Salem Ferdi
Source : www.lequotidien-oran.com