Il fut l'un des bâtisseurs de l'école algérienne à Souk Ahras : Merouane Nedjar tire sa révérence

Quand tout le monde languit derrière le lucre et se perd dans les méandres de l'arrivisme et de la prétention, il existera des hommes qui donnent de leur vivant les meilleurs exemples de travail, d'humilité et d'abnégation et lèguent après eux des faits marquants et autres qui disent toute leur grandeur.Quand tout devient dévoyé, fade et remis entre les mains d'une caste qui s'approprie morale et contingences, ces mêmes hommes usent d'un silence éloquent et d'un retrait de seigneur.
Merouane Nedjar fait partie de ceux-là mêmes ne connaissant de la mort qu'une connotation conventionnelle, qui ne sied guère aux souvenirs rapportés çà et là par ces innombrables témoins parmi ses anciens élèves, ses collègues de travail et tous ceux qui ont eu l'occasion de le côtoyer.
Né à Souk Ahras en 1936, Merouane Nedjar, qui vient de tirer sa révérence au début du mois en cours, fut normalien, enseignant depuis l'année 1960, directeur du CEG (Collège d'enseignement général) pour occuper au milieu de sa carrière plusieurs postes de responsabilité, dont celui d'inspecteur d'académie, et ce, dans plusieurs wilayas. La gestion du CEG fut la plus longue et la plus marquante expérience, car c'est là qu'il marquera des générations entières par sa rigueur, son savoir-faire et sa correction.
«On se savait condamnés à ne point faire autre chose qu'étudier, étudier dur et juste chez Nedjar, dont le nom fut longtemps associé au fameux CEG de Souk Ahras», a déclaré l'un des anciens élèves. Celui qui du haut de ses 1,90 m supervisait, scrutait, dirigeait, gérait, savait se taire et faire taire des vérités par souci d'éthique et de déontologie, celui encore qui savait parler et faire parler ses élèves menait depuis des années une retraite paisible ponctuée d'égards et de signes de formules de respect adressées à sa personne là où sa promenade matinale le menait.
Encore, plusieurs dizaines de personnes venaient exprimer leur reconnaissance à l'un des pionniers du secteur de l'éducation nationale, parti sans crier gare pour un monde meilleur. Il serait encore là, tout content de rencontrer tous ces gens, le sourire contenu dans cette austérité coutumière et ce regard lucide qui en disait long sur l'intellectuel qu'il fut.