Algérie

«Il faut du courage politique pour abolir la peine de mort»



«Il faut du courage politique pour abolir la peine de mort»
- Le groupe de travail, dont vous faites partie, vient de finaliser le projet du premier protocole africain contre la peine de mort qui sera proposé pour l'adoption au prochain Sommet de l'UA. Pouvez-vous nous parler des grandes lignes de ce document 'C'est un protocole qui vise l'abolition de la peine de mort. Il vise, d'abord, dans son article 1er, l'abolition de la peine de mort et demande aux Etats de s'engager sur cette voie. Cet article est donc plus important. L'article 3 stipule aussi que tous les pays qui ratifieront ce protocole et dont les législations prévoient l'application de la peine de mort doivent observer un moratoire.Cela en attendant d'implanter ce moratoire dans leurs législations ou de les réviser. Ce qui est également important dans ce document, c'est la disposition finale qui prévoit qu'une ratification de 15 Etats suffit pour l'entrée en vigueur de ce protocole. Actuellement, nous avons 19 Etats abolitionnistes et je pense qu'ils adopteront ce protocole. Ce qui reste est la ratification et l'intégration de ce protocole dans l'ordre interne.Cela doit suivre un cheminement, parce que pour beaucoup d'Etats, ce protocole ne va pas avoir une applicabilité directe, même si dans la plupart des pays, il y a le principe de la supériorité des traités sur la loi interne. Ils doivent retirer, dans le code pénal notamment, les dispositions qui portent sur l'application de la peine de mort. Certaines Constitutions prévoient aussi ce genre de peine, donc il faut procéder à leur révision. Tout cela est un processus qui suivra la ratification de ce protocole par chaque Etat africain.- Y a-t-il des mesures contraignantes pour les pays africains afin de les obliger à appliquer ce protocole 'Tout Etat qui ratifie ce protocole est obligé de l'appliquer. Ce ne sont pas des directives, un guide ou une observation générale. Nous avons opté pour un instrument contraignant qui obligera les Etats à respecter l'article 1er. C'est-à-dire l'abolition de la peine de mort. Ce qui est important aussi est le suivi de la mise en ?uvre de ce protocole ; parce qu'il y aura toujours parmi les pays qui ratifieront le texte ceux qui auront besoin de plus de temps pour réviser leurs législations.Le processus interne est important et c'est là où il faut impliquer les parlementaires de manière qu'ils puissent prendre en charge l'élaboration des projets de loi. Au niveau interne, les sociétés civiles et les commissions nationales des droits de l'homme ont un rôle consultatif en matière de ratification.- Pour justifier leur refus d'abolir la peine de mort, les pouvoirs en Afrique, y compris l'Algérie, évoquent le poids de l'opinion publique et la contrainte de la religion. Comment contourner cet argument 'La plupart des pays africains, qui n'ont pas aboli cette peine ou qui ont adopté un moratoire, qui est une position de «ni oui ni non», doivent entreprendre un travail de proximité pour expliquer cette question aux populations. D'abord, il faut commencer par casser le tabou qui empêche tout débat sur la peine de mort. Dans beaucoup de pays, on n'ose pas aborder ce sujet ; la société civile est craintive et n'est pas mobilisée, alors que les institutions étatiques sont frileuses.Il faut un courage politique, car c'est une question de société. Le droit à la vie est important. Il faut avoir le courage d'en parler et de créer les cadres du dialogue qui permettront aux populations de comprendre pourquoi les Etats doivent aller vers l'abolition de la peine de mort. Pour ce qui est du poids de la religion, je pense qu'il faut placer des imams ouverts autour d'une table pour expliquer ce que prévoit la charia et son interprétation extensive concernant la peine de mort. Il faut que ce soit des penseurs de l'islam capables de fournir des réponses aux blocages des populations concernant ce sujet. Il faut également comprendre qu'il y a des alternatives à la peine de mort.


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