Il fait la «fortune» des uns et le malheur des autres Tabagisme : le désastre sanitaire

Sonnette d'alarme - La lutte contre le tabagisme, ou la guerre du feu, se rallume à chaque fois qu'un cardiologue se prononce sur l'une des maladies du siècle : le cancer dans toutes ses formes.
Au nom de la santé publique, la société s'attaque au tabac. Ce tueur camouflé derrière un rideau de fumée, malgré les 42 milliards de chiffre d'affaires, dont presque la moitié va au Trésor public. On dénombre quelque 45 000 décès annuellement, selon une source au niveau du ministère de la Santé publique.
Les décisions portant interdiction de toute publicité, directe ou indirecte, pour le tabac depuis plusieurs années et l'augmentation du prix des cigarettes ont trouvé un public majoritairement favorable certes, mais aussi des incorruptibles. Quand en 2008 cinq professeurs en cardiologie remettaient au ministre de la Santé leur rapport dans lequel ils avaient préconisé de sévères mesures pour lutter contre ce qu'ils appellent «le désastre sanitaire algérien», ils étaient tellement méfiants qu'ils avaient remis aussi des copies au président de l'Assemblée populaire nationale (APN). Pour notre interlocuteur «nombre de responsables fulminent lorsqu'on parle de santé publique, ils rétorquent : liberté individuelle et encore plus, lorsque le problème de prise en charge des cancéreux est évoqué.
Un non-sens criant», clame celui qui est l'initiateur d'un groupe de réflexion sur les méfaits du tabagisme et la responsabilité des pouvoirs publics. Il explique que le tabac est responsable de 15% des décès dans notre pays. «Environ 34 000 décès sont dus au cancer et 13 000 autres aux maladies cardiovasculaires chaque année», dit-il. C'est aussi le constat que fait un professeur en médecine au Centre Pierre-et-Marie-Curie (CPMC), auteur d'une étude sur un gène particulier, appelé le P53, qui est associé à certaines formes de cancer du poumon particulièrement fréquent chez les fumeurs. Ce gène représente, selon notre interlocuteur, «la première cause de décès par tumeur chez l'homme». Chez la femme, explique-t-il aussi, «il est plus fréquent que le cancer du sein».
En outre, selon l'un de ses confrères du service de cardiologie de l'hôpital Parnet à Hussein-Dey, «le nombre des cancers de la bouche, du pharynx et du larynx a doublé en dix ans en Algérie, alors que 2% seulement de ces tumeurs apparaissent chez les non-fumeurs».
Au laboratoire du Centre national de la médecine sportive (CNMS), actuellement spécialisé en cardiologie, un technicien supérieur de la santé explique, de son côté, que «le tabac est à l'origine d'environ la moitié des cancers de la vessie chez l'homme, le quart chez la femme. Il est aussi la cause de leucémies et de tumeurs du pancréas».
Au niveau du même hôpital, un cardiologue explique les méfaits de la fumée : «Elle irrite les voies respiratoires et provoque une diminution du calibre des bronches.» Selon lui, la bronchite chronique liée à la consommation de tabac «est un véritable fléau en Algérie».