Idir Bahamid, directeur d'Altus Organisational Development à 'liberté" 'La gestion RH est considérée comme une fonction administrative"

Directeur d'un cabinet de conseil en solutions RH, Idir Bahamid, dresse, dans cet entretien, un tableau des insuffisances de la gestion RH en Algérie et plaide pour la nécessité de mettre en place une nouvelle culture d'entreprise.
'Liberté" : Comment évaluez-vous le marché du recrutement en Algérie '
Idir Bahamid : Le marché est pour ainsi dire tendu et les techniques de recrutement ne répondent pas forcément aux besoins des entreprises. Très souvent, on s'attache à rechercher la personne qui va être la plus adaptée au poste de travail. On recherche l'adéquation personne-poste de travail, quand, en fait, il faut chercher l'adéquation personne-culture de l'entreprise. Le recrutement tel qu'il doit être fait doit s'attacher non seulement à détecter les compétences techniques mais aussi l'adéquation entre la personne et la culture de l'entreprise. Il y a un ensemble d'insuffisance. En Algérie, on a tendance à dire que l'Algérien n'est motivé que par le salaire.
C'est vrai que le salaire est un facteur de motivation essentiel. Mais ce n'est pas le seul facteur de motivation. Des études montrent que la première raison qui fait que des employés quittent une entreprise, c'est la qualité de la relation qu'on a avec son chef direct.
Le résultat est qu'il y a un taux de turn-over effarant dans les entreprise en Algérie. Et cela, c'est des coûts énormes pour les entreprises. Il y a aussi l'inadéquation entre la formation et le marché de l'emploi. Conséquence : les compétences sont rares. En Algérie, on a encore tendance à considérer la gestion RH essentiellement comme fonction administrative plutôt que comme fonction stratégique. Le management stratégique des ressources humaines consiste à mettre en place des solutions et systèmes RH intégrés, cohérents pour produire de la performance et créer un avantage compétitif. Tous les systèmes RH (recrutement, management de la performance, des talents, formation, rémunération) doivent être conçus de manière à produire des efforts coordonnés afin de réaliser les objectifs stratégiques.
Quels sont les services que vous proposez aux entreprises '
Altus est une société qui s'occupe de fournir des solutions en ressources humaines aux entreprises. Parmi ces solutions, il y a le recrutement, la formation, le conseil RH et les évaluations du personnel pour différents objectifs. La mission d'Altus est d'aligner les comportements individuels et collectifs avec les objectifs stratégiques de l'entreprise. C'est-à-dire que, tout ce qu'on fait dans l'entreprise, est destiné à l'aider à réaliser ses objectifs. Tous les efforts individuels et collectifs doivent contribuer à cela.
Ce qui veut dire que la sélection, la formation et toutes les activités de gestion des ressources humaines doivent s'activer dans le même sens. Il s'agit d'identifier ces comportements qui sont essentiels pour l'entreprise et ensuite s'assurer que tout le monde les met en pratique pour réaliser les objectifs de l'entreprise. Et pour cela, tous les systèmes RH c'est-à-dire le recrutement, la formation et les autre systèmes de gestion de la performance etc., doivent être construits de manière à renforcer ces comportements. Pour que tout le monde aille dans le même sens.
De par votre expérience, comment voyez-vous cette approche en Algérie '
C'est une approche qui intéresse même les grandes entreprises à travers le monde.
Je pense que c'est une question qui peut intéresser très fortement les entreprises publiques et privées en Algérie. Ces derniers temps, on se plaint énormément du service public et du manque de qualité de ce service. La seule façon de transformer la perception que les gens ont de ce service est d'opérer des changements fondamentaux au sein de ses services publics.
Et pour cela, il faut changer la culture de l'entreprise. Sans changer la culture de l'entreprise, on peut faire tout les investissements du monde, on peut faire toutes les réformes structurelles qu'on veut, on n'obtiendra pas les résultats qu'il faut. Il faut absolument qu'il y ait des valeurs fortes au sein de chacune de ces entreprises et que ces valeurs soient transposées en comportement et qu'ensuite mettre en place les sytèmes qui permettront de renforcer ces comportements pour que l'ensemble change.
Est-ce que vous sentez qu'il y a de l'intérêt de la part des entreprises pour ce genre de solutions '
C'est un concept nouveau. Les entreprises ne sont pas réticentes à cela. En fait, chez les entreprises tant publiques que privées, il y a un réel désir de changement.
Il y a ce désir, mais concrétiser le désir va prendre un petit peu de temps. Par exemple, la formation telle qu'elle est faite en entreprise est une formation généralement de type classique. C'est-à-dire on communique un savoir mais en fait ce dont l'entreprise a besoin, c'est de développer des comportements qui vont permettre à l'entreprise de réaliser des performances. Il faut des formations utiles pour l'entreprise.
Il s'agit d'une formation qui sera basée sur le type formation-action c'est-à-dire qu'on apprend en faisant des choses. Ça sera basé sur le feed-back et le coaching.
Qu'est-ce qui faudrait pour que cette culture s'installe '
Je pense qu'il faudrait qu'il y ait des modèles d'entreprise qui mènent le changement. Qui soient des exemples qu'on peut montrer dans le domaine du développement des ressources humaines. Certes, il y a des entreprises qui sont performantes aujourd'hui sans nécessairement avoir tout cela en place. Mais cela est temporaire.
Il y a une concurrence de plus en plus grande et qui ne va qu'en s'agrandissant et ces entreprises seront forcées à un moment ou un autre d'opérer les changements nécessaires. Même celles qui sont les plus performantes.
S. m.
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