«L'eau ne dort pas: elle fait seulement semblant...» Kurzas«Tu vois! Je te l'avais bien dit! Il ne faut pas attendre l'inspiration jusqu'à ce qu'elle vienne à toi! Elle est si capricieuse qu'elle peut te faire attendre longtemps. Elle se fait désirer, la garce! Il faut la chercher là où elle se terre, l'attrapper et la prendre à bras-le-corps pour la serrer jusqu'à ce qu'elle cède. Et elle ne donne que ce que tu possèdes déjà en toi! Donc, pas besoin de la remercier! Juste lui donner un nouveau rendez-vous galant pour le jour prochain. Il faut oser simplement. Tu as choisi l'eau, c'est bien! Tu es rentré dans ton sujet et tu nous as entraîné dans le merveilleux et l'ordinaire, le poétique et le prosaïque: c'est un mariage réussi... Il ne te reste plus qu'à aborder un autre problème!», m'avait dit mon ami Lounès en étalant le journal entre une assiette de sardines grillées et un verre de bière. «Je n'en ai pas terminé avec l'eau! Puisque j'ai mis le doigt sur ce sujet, il va me falloir exploiter ce précieux gisement jusqu'au fond! Figure-toi que plus je pensais à la manière d'aborder le problème, plus les images de l'enfance s'imposaient à moi. Je suis arrivé à cette conclusion que partout où que j'aille, quel que soit le régime qui gouverne, il y a toujours une distribution inégale des ressources. Même l'eau, qui est une providence du Ciel, n'échappe pas à cette règle universelle. Enfant, je ne me suis pas posé la question: pourquoi les missions catholique et protestante, l'école qui était habitée majoritairement par des instituteurs français, recevaient l'eau courante à domicile alors que les indigènes étaient obligés d'aller à la source' C'est simple! Les Gaouris, en creusant un puits sur la place du village, juste au-dessus de l'immense frêne qui domine le village, (d'ailleurs, si ce frêne a atteint une telle taille à nulle autre pareille, c'est parce que ses puissantes racines pompent directement dans la nappe et que de l'autre côté du sentier pierreux il y a le premier cimetière du village...) ont capté la généreuse nappe dans laquelle baigne tout le village, pompant une partie de son eau qui est redistribuée trois cents ou cinq cents mètres plus haut à partir du château d'eau qu'ils ont construit au niveau de l'emplacement de l'ancien camp romain. Etant jeune, je ne recevais pas cela comme une injustice, parce que dans ma tête d'indigène, je ne voyais pas les épouses si joliment fardées de nos instituteurs faire le va-et-vient tous les jours jusqu'à la fontaine. Cela pourrait porter préjudice à la puissance de la science qu'ils sont venus nous enseigner. D'ailleurs, ce sont eux qui nous ont appris que ce n'est pas un miracle si on jouit d'un tel privilège, mais parce que tout simplement une immense couche d'argile souterraine, placée là par l'ingénieuse nature, fait tout simplement barrage à cette nappe qui vient de cet immense château d'eau qu'est le Djurdjura. Et cett couche fait à peine un kilomètre et demi de largeur:à l'est, après le ravin, c'est la sècheresse et à l'ouest après la dernière petite source qui marque l'ancienne limite du village, l'eau devient rare. Et depuis, je me suis toujours demandé pourquoi les puissants pouvoirs publics qui ont géré cette région après le départ des Turcs, n'ont pas pensé à construire un petit barrage sur ce ravin profondément encaissé entre la montagne aux corbeaux et la colline au château d'eau. Cela aurait permis d'irriguer la plaine qui s'étend au sud de l'oued et servi à alimenter le petit village d'à côté qui avait profité d'une complicité avec les aurorités locales pour tenter de détourner la source principale qui alimente le ravin. Cela a failli déclencher une guerre entre les deux villages. Finalement, la raison a triomphé. Et la source principale est revenue à sa fonction première: alimenter le ravin dont l'eau se déverse dans l'oued.»
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Posté Le : 04/12/2013
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Selim M'SILI
Source : www.lexpressiondz.com