La banquise se dégèle. Le miroir se brise et les sortilèges s?estompent. Les langues se délient pour inciter à la riposte, à la prise de conscience, à la mobilisation contre les ravages de la drogue, les périls du sida, les dangers de la prostitution, les méfaits de la violence. Et la liste est loin d?être close. Autant de problèmes, autant de tabous, difficiles à transgresser à une époque encore très récente. La censure faisait son ?uvre, orchestrée par des bouffons chargés de fabriquer un monde merveilleux, baigné dans un océan de chasteté, de pudeur échevelée. Aucune souillure ni licence. Point de déloyauté ou de luxure. Partout, des trésors de candeur. D?un olympe inaccessible, une race d?infaillibles qui gèrent et légifèrent, gouvernent sans prévoir et prévenir. Résultat des courses, une société intemporelle mystifiée qui ne s?égare jamais à l?ombre du guide dans sa marche éclatante. S?enracine alors, au fil du temps, une sublimité forgée avec force ruse, duplicité et démagogie. Il n?empêche qu?après les songes, il y a réveil. Et qu?en pareille occurrence, le retour sur terre est brutal. C?est le moins qu?on puisse dire. En rampant avec le « génie » tutélaire des démiurges, la cité découvre les maux qui la rongent. Humaine, trop humaine. Avec ses vices, ses vieux démons, ses dangereux désirs, ses penchants pervers, ses ivresses folles. Les digues vermoulues des étouffoirs volent en éclats. Plus aucune chape de plomb pour taire une réalité aveuglante. Le vivier où prospèrent les rhéteurs vides n?est plus d?aucune utilité pour stigmatiser, calomnier, vociférer contre les « ennemis de tout poil ». Les problèmes ne se règlent pas à l?ombre du silence et du mutisme. En décidant de prendre à bras-le-corps des tourments, en choisissant le parti de tout dire, de tout divulguer à propos des souffles menaçants et contagieux des fléaux qui l?affligent, la société renoue avec la sagesse et viole une coutume dévastatrice. Les juges et les témoins d?une grandeur introuvable doivent tirer l?enseignement adéqua t. Leur panthéon, en tout état de cause, n?est que pièce de musée.
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 04/07/2005
Posté par : sofiane
Ecrit par : M. B.
Source : www.elwatan.com