Le vraquier «Arctic Sea»,
retrouvé lundi par la marine russe près de l'archipel du Cap-Vert, dans
l'Atlantique, a été détourné par des pirates. Huit personnes suspectées d'être
des assaillants originaires d'Estonie, de Lettonie et de Russie qui s'étaient
emparés du cargo ont été arrêtées.
Les huit pirates présumés sont interrogés à bord de la corvette russe
anti-sous-marine Ladny, rapporte l'agence Interfax. L'«Arctic Sea», cargo de
4.000 tonnes battant pavillon maltais, exploité par une compagnie finlandaise
et transportant une cargaison de bois, avait disparu dans les eaux européennes
au cours d'une traversée entre la Finlande et le port de Béjaïa, qu'il était
censé atteindre le 4 août. Il n'avait plus donné de nouvelles depuis le 31
juillet, au moment où il a été signalé une dernière fois au large de la côte
française de la Bretagne. «C'était un acte de piraterie et une enquête est en
cours», a déclaré le ministre russe de la Défense, Anatoli Serdioukov. Le 24
juillet, à 20h heure algérienne, dans les eaux territoriales suédoises, «les
assaillants, sous le prétexte que leur embarcation (un canot pneumatique) était
tombée en panne, sont montés à bord de l'«Arctic Sea» et, sous la menace
d'armes, ont exigé une obéissance totale. Par la suite, les assaillants ont
débranché les systèmes de navigation du cargo qui a été contraint de mettre le
cap sur l'Afrique. Ce jour-là, l'équipage a signalé qu'il avait été attaqué par
une dizaine des hommes masqués, se présentant comme des policiers suédois. Ils
auraient fouillé le navire, affirmant chercher de la drogue». «Ces gens (...)
sont montés à bord et, sous la menace d'armes, ont exigé que l'équipage
accomplisse sans condition tous leurs ordres», a précisé Serdioukov.
L'escorteur russe Ladny a libéré
les marins russes sans que soit tiré un seul coup de feu, a rapporté mardi au
Chef suprême des armées Dmitri Medvedev le ministre russe de la Défense Anatoli
Serdioukov. L'équipage de l'«Arctic Sea» se trouve à bord du patrouilleur
Ladny, sa libération s'étant déroulée sans coup férir. D'après le ministre
russe, la quinzaine de Russes composant l'équipage du navire sont sortis de ce
piratage «sains et saufs». Mais l'information a été contredite par la police
suédoise, qui affirme avoir reçu, fin juillet, «des photos envoyées par
l'équipage par e-mail montrant des blessés», après la première attaque du cargo
en mer Baltique le 24 juillet.
Dimanche, la télévision suisse
TSR rapportait que des inconnus avaient exigé une rançon de 1,5 million de
dollars à la société finlandaise Sol Chart Management, propriétaire du navire. Malte a ouvert une enquête criminelle sur la disparition ou le
détournement de l'«Arctic Sea». La Suède et la Finlande sont aussi impliquées
dans l'enquête «sur des faits d'extorsion aggravée». La police finlandaise, qui
assure la coordination de l'enquête, attendait toujours mardi de recevoir des
informations en provenance de Moscou, qui a récupéré l'équipage russe et le
navire. «En ce moment, nous attendons des informations confirmées de la part
des autorités russes... C'est parfois un peu lent avec les autorités russes,
mais je suis certain que nous les recevrons aujourd'hui», mardi, a déclaré un
responsable du Bureau national d'enquête finlandais (NBI), Markku Ranta-Aho.
L'une des pistes suivies est celle de la rançon. «Nous coopérons bien sûr avec
la société» Solchart qui arme l'»Arctic Sea», mais celle-ci n'est pas
suspectée, a-t-il ajouté. Selon la Commission européenne, le bateau a été
attaqué le 31 août. Ce jour-là a été établi le dernier contact entre la police
suédoise et l'«Arctic Sea» alors que le bateau quittait la Manche pour l'océan
Atlantique. Le cargo en subira une autre au large du
Portugal. Deux attaques, une demande de rançon et des mystères...
Une histoire incompréhensible
L'annonce du piratage du cargo «Arctic Sea», retrouvé au large de
l'Atlantique, ne répond pas à d'importantes questions concernant sa mystérieuse
disparition fin juillet, a estimé mardi un expert russe, évoquant une possible
«opération de camouflage». Au cours d'une conférence de presse à Moscou,
Mikhaïl Voïtenko, rédacteur en chef du bulletin maritime russe Sovfrakht, a
évoqué les raisons pour lesquelles le dénouement de cette affaire devait être
interprété avec prudence. «Cette histoire reste incompréhensible si on
l'explique par une attaque qui est l'oeuvre de criminels ou des démêlés entre
des concurrents commerciaux. Elle ne trouve son sens que dans le cadre d'un
conflit entre des Etats», a estimé ce marin expérimenté et expert respecté en
matière de trafic maritime. Ses explications interviennent après l'annonce par
les autorités russes de la découverte du cargo dans la nuit de dimanche à lundi
dans les eaux du Cap-Vert et l'interpellation de huit pirates présumés,
interrogés sur un bateau de guerre russe. Il relève notamment que:
- Une semaine s'est écoulée entre le moment où le cargo attaqué la
première fois (le 24 juillet) et le moment où les premières informations ont
été publiées à ce sujet.
- Il n'y a eu aucun signal de détresse alors que le navire est équipé
d'appareils de communication sophistiqués qu'il est difficile de débrancher
simultanément.
- Aucun des membres de l'équipage russe n'a semble-t-il utilisé son
téléphone portable pour faire état d'une attaque alors qu'ils étaient dans les
eaux suédoises couvertes par les liaisons téléphoniques.
- Les pirates ont réussi à mener le cargo à travers les mers d'Europe
sans être apparemment aperçus.
- Le coût des avions et bateaux de plusieurs pays mobilisés ainsi que les
opérations pour localiser le cargo ont largement excédé la valeur du vraquier
et de son chargement.
- L'Otan a annoncé avoir
coopéré étroitement avec la Russie pour localiser le cargo mais s'est refusé à
communiquer des détails dans le cadre d'efforts conjoints inhabituels. «Si la
Russie était seule responsable, l'Otan ne l'aurait pas soutenue comme ça», a
observé M. Voïtenko. Selon l'expert, plusieurs Etats pourraient être impliqués
dans cette ténébreuse affaire. «Je crois que les Etats impliqués ont trouvé une
solution, tout en décidant de laver leur linge sale en famille». En dépit de
l'enquête en cours, «nous ne saurons jamais ce qui s'est réellement passé»,
prédit M. Voïtenko.
Tallinn et Riga demandent des précisions à Moscou
La Lettonie et l'Estonie ont indiqué mardi avoir demandé à Moscou des
précisions sur leurs ressortissants présumés qui, selon les autorités russes,
figurent parmi les huit pirates arrêtés du cargo «Arctic Sea». «Nous n'avons
obtenu aucune confirmation du côté russe si, et quels ressortissants estoniens
ont été arrêtés dans l'affaire du cargo «Arctic Sea piraté», a déclaré à la
presse le ministre estonien des Affaires étrangères Urmas Paet. «Pourtant, nous
avons contacté le ministère russe des Affaires étrangères, l'ambassade de
Russie, les gardes-côtes russes, Interpol et le FSB (services de sécurité
russes)», a-t-il ajouté. «Nous avons demandé la confirmation officielle de
l'arrestation de citoyens lettons, mais nous n'avons obtenu aucune réponse», a
déclaré à l'AFP le porte-parole du ministère letton des Affaires étrangères,
Gints Jerohimovics. Pour un amiral estonien, Tarmo Kouts, «toute l'affaire du
cargo est bizarre». «Il est difficile de comprendre pourquoi les radars suédois
n'avaient pas détecté le hors-bord qui s'est approché de l''Arctic Sea' dans
les eaux territoriales suédoises», a-t-il déclaré à la presse. «Pourquoi une si
grande opération de recherche a été lancée pour un si petit bateau, appartenant
à des personnes d'origine russe ayant la nationalité finlandaise», s'est-il
interrogé. «L'ordre de recherche a été donné au ministère russe de la Défense
par le président Medvedev lui-même. Qu'est-ce qu'il y avait de si important à
bord de ce bateau pour que trois grands vaisseaux militaires soient envoyés à
sa recherche ?», s'est demandé l'amiral.
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Posté Le : 19/08/2009
Posté par : sofiane
Ecrit par : Amine L
Source : www.lequotidien-oran.com