Algérie

Hôte de l'association SDH



C'est un Mohamed Mouleshoul, Yasmina Khadra, détendu, séduisant, presque séducteur, qui a visité les différents ateliers du local de l'association Santé Sid El Houari. Avec humilité, il a prêté son ouïe et son attention au guide qui s'est chargé de lui faire découvrir cette association et surtout ses réalisations et ses projets. A la fin de sa visite, qui a duré plus d'une heure et demie, le directeur du Centre culturel algérien à Paris a pris la parole, en tant que candidat à la future présidentielle, devant des journalistes et des membres de SDH. Dès le départ, il s'est montré élogieux par rapport aux jeunes, ses hôtes, en annonçant : « Ça me fait découvrir un rêve ». Et de risquer une comparaison : « Alors que les milliardaires d'Oran ignorent ce qu'est le mécénat ». Pis encore : « Ils n'ont rien apporté à la culture ». Leur ingéniosité se limite « à investir dans l'immobilier », a ajouté l'auteur de « Qu'attendent les singes », son prochain roman devant sortir en avril prochain. Sur les motivations qui l'ont amené à vouloir s'engager dans l'aventure des présidentielles, question revenue sur la bouche de plus d'un de son auditoire, Yasmina Khadra avancera au moins trois raisons. L'une, presque sibylline, a un rapport avec son dernier ouvrage actuellement sous presse, « c'est mon personnage qui m'a interpellé en me disant : tu me fais faire des choses impossibles, alors que toi t'es assis à ton bureau ». Il faudra donc attendre la sortie de ce roman pour élucider la question. Une autre explication, laissant la voix davantage militaire qu'à l'homme de lettres, se résume dans cette phrase : « Pour légitimer ma survie, je sens le besoin de servir mon pays ». Là l'ex-officier de l'ANP se remémore ses « frères d'armes » tombés au champ d'honneur lors de la lutte antiterroriste. Auparavant, il signalera que la plupart des personnalités étrangères qu'il a rencontrées lors de ses périples à travers le monde lui ont presque suggéré de « faire quelque chose » pour le pays. Sans s'y étaler, il écartera d'un revers de la main les « racontars » faisant du candidat Yasmina Khadra un lièvre, chargé de mission par le DRS ou l'armée. En tous les cas, il ne semble pas considérer la présidence comme une sinécure. « Je suis en train de tourner le dos à mon bonheur en m'engageant dans les présidentielles », dira celui dont le prochain roman est déjà sollicité par les libraires dans quarante pays, signe de sa notoriété universelle. Son programme politique, il se ramasse en ceci : « Participer à transformer l'Algérien en citoyen ». Pour le candidat Mouleshoul, l'Algérien est de plus en plus démissionnaire. C'est ce qui explique « l'encanaillement », vieux de cinquante ans, dans lequel se débat la société algérienne. Certes, il estime que le pouvoir, qu'il ne citera à aucun moment, est responsable et porteur du désordre ambiant « puisqu'il n'a même pas un agenda pour fonctionner à partir d'elle ». En plus « il a chaptalisé les masses ». Ce qui ne dédouane aucunement les citoyens, de plus en plus frileux et démissionnaires. « Il n'y a pas de tyran en fin de compte, il est le produit de nos lâchetés », soulignera-t-il. Ou encore : « La démission du peuple est plus grave et plus coûteuse que les affres du terrorisme que nous avions enduré ». Remarquons que le discours de Mohamed Mouleshoul n'use pas des catégories politiques standards. Le plus souvent, il se réfère à une phrase écrite dans un de ses romans. Toujours concernant son programme politique, il révèlera que les initiateurs de la démarche dite « Nebni » avancent une série de propositions sur le plan économique et social à reprendre en cas de nécessité. « C'est un signe de la générosité typiquement algérienne », lance-t-il. Répondant à une question concernant le rôle qu'il attribuera à l'armée, institution d'où il est issu, il aura cette réponse : « Elle n'aura pas à être la garante de la Constitution, mais s'occupera de la sécurité des frontières ». Autrement dit, aucun rôle politique.A ce propos, et cette fois-ci c'est le militaire ayant enrichi son expérience par la rencontre des décideurs au niveau de ce monde qui s'exprime, il affirmera que l'Algérie est menacée dans son existence même. Sans reprendre à son compte l'idée du complot ourdi, il expliquera cette menace de la manière la plus simple : « Actuellement, l'Europe, dans le cadre du nouveau monde qui se met en place, se construit. Si elle considère que l'Algérie doit faire partie de son espace vital, on risque d'être recolonisés ». Par ailleurs, il soulèvera un autre risque qu'encourt le pays : l'institutionnalisation de la violence. « Eu égard à la décomposition morale et sociale que nous vivons, l'Algérie risque de s'acheminer vers des expériences semblables à certains pays de l'Amérique Latine ». Il comparera cette violence au Brésil, une puissance économique émergente, à une tumeur difficile ou impossible à extirper.En parlant de l'Algérie et des Algériens, Mohamed Mouleshoul comparera feu Mohamed Arkoun, mort et enterré au Maroc, à une comète. « Peut-être dans cinquante ans ou un siècle que l'Algérie produira un autre Arkoun », dira-t-il. Peut-être une invitation à revisiter cet islamologue de génie.




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