Algérie

«Hors-la-loi» fait un tabac à Oran



Les Oranais ont enfin pu découvrir le long-métrage de Rachid Bouchareb. C'est mercredi dernier en fin d'après-midi que le film a été projeté pour la première fois à Oran. La salle qui a abrité la projection, à savoir la cinémathèque d'Oran, était archicomble. Beaucoup de gens, en effet, ne trouvant pas de places assises, se sont résignées à rester debout pendant deux longues heures pour ne rien rater de cette première oranaise. Avant la projection du film, une minute de silence a été observée à la mémoire du comédien Larbi Zekkal, décédé il y a quelques jours, et qui devait être présent durant cette première oranaise.

 Normalement, la projection du mercredi ne devait concerner que les « invités » de la cinémathèque. Aussi, en plus de la présence d'acteurs dans la salle, tels Chafia Boudraa, Ahmed Benaïssa, Louiza Nehar, Mourad Khan et Mohamed Djouhri…, on a pu aussi compter la présence d'un grand nombre de journalistes, de représentants d'associations culturelles et de la société civile, et même la présence d'institutions étrangères représentées par les directeurs respectifs du centre culturel français et de l'Institut Cervantès. Bref, d'une manière générale, tout le « gratin » d'Oran a répondu présent à ce rendez-vous. Le lendemain jeudi, lors des deux séances de projection, celles de 14h30 et de 17h, la cinémathèque était également archicomble. Les deux séances se sont déroulées à guichets fermés ! Du jamais vu dans cette salle où, bien souvent, hélas, les spectateurs sont comptés sur les doigts des deux mains. Il y avait dans la salle des personnes des deux sexes, des jeunes et des moins jeunes et même des octogénaires qui ont voulu découvrir ce film. A voir ce tableau, il ne serait pas exagéré de dire, par une sorte d'effet papillon, que le film « Hors-la- loi » pourra réconcilier les Oranais avec les salles obscures : désormais, la balle est dans le camp des autorités locales et culturelles. Il faut savoir que si, en Algérie, le film est projeté en tout et pour tout dans une poignée de salles, en France, c'est dans pas moins de 400 salles que le film est disponible.

 Pour quelle raison alors « Hors-la-loi » est-il disponible à Oran ou à Alger, tandis que dans une ville de moindre importance, à défaut de salle de cinéma ouverte, les habitants en sont privés ? Mais ceci est un autre débat…

 Pour revenir au film, comme cela a été dit et redit, à le voir, on se rend compte que la polémique qui a suscité tant de débats outre-mer n'a concerné, tout le long du long-métrage, que les six premières minutes, où Bouchareb a relaté les tragiques évènements de Sétif. Pour le reste, il faut bien dire ce qui est: le réalisateur, pour avoir mis à nu le régime colonialiste, n'a pas pour autant été tendre avec le FLN et ses dérives autoritaires. En vérité, pour ne pas parler de saga, par ce film, Bouchareb a voulu s'offrir le plaisir de réaliser une sorte de « Il était une fois l'Amérique » à la sauce algérienne : l'histoire de trois frères chassés de leur terre natale, l'un s'engageant en Indochine, l'autre prenant la tête d'un mouvement révolutionnaire, et le troisième se complaisant à gagner sa vie dans les cabarets de Pigalle, n'ayant presque cure du devenir de son pays d'origine. Le destin de ces trois frères sera scellé par l'amour qu'ils portent à leur mère, magnifiquement interprétée par Chafia Boudraa. A la fin de la projection, les avis ont été partagés, d'aucuns ont franchement adoré le long métrage, d'autres y ont mis quelques réserves, d'être un petit peu décousu, de passer directement d'une époque à une autre, de façon quasi systématique. Les critiques ont donc surtout compris le côté technique du film. Autre rôle à saluer, celui de Bernard Blancan qui a interprété le colonel Faivre, résistant pendant la Seconde Guerre mondiale et devenu par la suite un opposant farouche à toute idée d'indépendance algérienne. Ce personnage incarne une infime minorité de résistants français qui ont aussitôt fait de comprendre le danger de la vermine nazie, mais qui, hélas, ont ensuite été aveugles sur les injustices de l'empire colonial.




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