Honaïne : Un site archéologique qui fait parler

L’ex-responsable du musée de Tlemcen (de 1989 à 2007), Brahim Chennoufi, est revenu sur la controverse des deux hypothèses du site historique de Dar El Imam, selon lesquelles le site était un lieu de résidence pour certains, et pour d’autres un grand bassin. Ayant une grande expérience dans l’archéologie et une parfaite maîtrise de la gestion du patrimoine historique et culturel de Tlemcen, l’ex- chef de la circonscription archéologique de Tlemcen (comprenant les wilayas de Sidi Bel-Abbès, Aïn Témouchent et Tlemcen) a bien voulu exprimer son analyse sur certaines incertitudes et hypothèses avancées par les uns et les autres. « A ma connaissance, le site de Dar El Imam de Honaine n’a pas fait l’objet de fouilles archéologiques systématiques encore moins de sondages de reconnaissances. Cela dit, il ne peut y avoir de fumée sans feu. A mon avis, la mémoire collective ne peut retenir cette appellation s’il n’y avait pas une habitation d’un certain imam. D’autre part, les structures émergeant du sol sous les pins et leurs dispositions formant un rectangle autorisent l’hypothèse de l’existence d’un bassin.

Il y a quelque temps, moi-même effectuant une observation, j’y ai reconnu une gravure sur une couche de gypse montrant des voiliers avec des rames. Je daterai cette œuvre durant la présence espagnole à Honaine vers 1553-54, date pendant laquelle ils ont mis à sac la ville portuaire médiévale, qui a participé au développement de Tlemcen grâce à son commerce très florissant avec l’Europe du Sud. Cette gravure inédite est exécutée sur un panneau de gypse d’environ 35 cm sur 70 cm. Ce panneau se trouve sur la face extérieure du muret Nord-Est », a-t-il indiqué.

Pour consolider son analyse sur ces deux hypothèses différentes, l’ex-conservateur en chef du patrimoine archéologique, historique et muséal de Tlemcen a précisé que «l’une n’exclut pas l’autre. Il se peut que le bassin en question se trouve proche ou contigu à Dar El Imam. Toutefois, seules des fouilles archéologiques systématiques pourraient fournir les éléments de réponse justes de l’occupation de ce promontoire élevé qui sans aucun doute était dédié particulièrement au contrôle maritime puisque sur le site existe encore une tour appelée tour espagnole, des vestiges de murs et de tours de pisé à l’endroit où des sondages sont supposés se dérouler ». Par ailleurs, Brahim Chennoufi a abordé les époques florissantes des Zianides et de l’interrègne mérinide aux 15e-16 e siècles. « Les Almohades, Mérinides et Zianides avaient construit le port, le système défensif de la ville ainsi qu’une fortification, la casbah qui dominait le port. De ces occupations successives, subsistent notamment l’enceinte de la ville portuaire faite de tours et de murs en pisé percés de portes, à savoir Bab el M’dina, Bab Essanoun, Bab el Bhar et Bab Nedroma. A l’intérieur de la ville, des campagnes de fouilles archéologiques menées par A. Khelifa ont permis de mettre à jour les restes d’habitations jugées cossues par les matériaux de pavage utilisés et les puits dont était dotée chaque maison ».

Il va sans dire que de la préhistoire jusqu’à l’époque moderne, de nombreux vestiges et monuments parsèment le territoire de la wilaya, témoins des différentes civilisations qui s’y sont développées. Les recherches archéologiques permettent d’apporter un lot de découvertes archéologiques pour enrichir le patrimoine historique et peuvent aussi fournir des documents et des détails de grande importance qui content l’histoire de plusieurs localités de la wilaya, pour la connaissance du passé. « Les traces des peuples qui vivaient dans notre pays il y a fort longtemps sont là, quelque part, juste sous nos pieds, il suffit parfois de creuser. C’est pourquoi les résultats de fouilles archéologiques font rêver, surtout quand les découvertes sont plutôt enrichissantes et rares ». K.B