Algérie

Homicides conjugaux: Ce que ne disent pas les chiffres



Bien que les données d'homicides conjugaux soient souvent exactes, par le fait qu'ils sont suivis automatiquement par des enquêtes sécuritaires, le sujet reste peu analysé par les spécialistes en la matière. C'est le constat qui a été fait par Dr I. Bekkouche, de l'Académie algérienne de développement des sciences médico-légales, lors de la tenue d'une journée d'études sur « la prise en charge des femmes victimes de violences. Réalités et perspectives » à l'amphithéâtre des urgences de l'hôpital Mustapha Bacha, jeudi dernier. Une rencontre organisée par le réseau Wassila en partenariat avec l'Académie algérienne de développement des sciences médico-légales.La conférencière a affirmé lors de son intervention qu'en matière de violence physique, les services médico-légaux enregistrent annuellement plus de 6.000 consultations, avec un nombre important de femmes violentées. Mais, dit-elle, les chiffres ne reflètent guère la réalité puisque certaines femmes ne se rendent pas aux structures sanitaires et refusent de déposer plainte contre leurs agresseurs. Par contre, affirme-t-elle, les données sur les violences conjugales, notamment celles génératrices d'homicides, sont le plus souvent exactes par le fait que les enquêtes soient déclenchées automatiquement. Elle regrette le fait que les homicides conjugaux soient peu analysés. En se référant au registre homicides intrafamiliaux, homicide conjugal et à une étude rétrospective intrafamiliaux de 2020 à 2022, la conférencière a affirmé que sur 1.377 autopsies effectuées sur trois ans, 112 autopsies concernent des homicides. «Nous avons donc 3 homicides par mois ». Et sur ces 112 homicides, 17 d'entre eux sont des homicides intrafamiliaux et 10 sont des homicides conjugaux. En précisant que les homicides conjugaux représentent une moyenne de 8,93% sur le total des homicides. Et pour éviter l'amalgame des chiffres, elle a tenu à préciser qu'il y a une différence entre l'homicide conjugal et le féminicide. «Le féminicide est un homicide qu'on peut dire spécifique où la femme est tuée parce qu'elle est tout simplement de sexe féminin, par contre l'homicide conjugal est un homicide intrafamilial, c'est un meurtre impliquant des partenaires ou des ex-partenaires intimes». Les résultats de l'étude rétrospective présentée par Dr Bekkouche font ressortir que 80% des victimes d'homicides conjugaux sont des femmes. L'âge des victimes touchées tourne autour de 20 et 40 ans. Pour ce qui est des victimes de sexe masculin, deux hommes ont été victimes d'homicide, l'un âgé de 33 ans et l'autre de 78 ans.
Et de préciser que selon l'étude, sur les 10 homicides conjugaux, 3 femmes sont d'Alger, 3 autres victimes des femmes algériennes tuées et rapatriées de France vers l'Algérie et deux autres femmes victimes d'homicide conjugal en Belgique et rapatriées vers leurs pays d'origine.
La conférencière a cité la France en précisant que les résultats d'une étude nationale sur les morts au sein des familles réalisée en 2016 a fait ressortir que sur 165 homicides, 15,94% étaient des homicides conjugaux. Un pourcentage qui est plus important par rapport à notre pays.
La conférencière a affirmé que généralement les cas d'homicides conjugaux sont très médiatisés, mais ils ne sont pas tellement analysés, notamment par rapport à l'existence d'antécédents de violence, antécédents psychiatriques, pression sociale ou bien le statut social des deux partenaires. Elle dira qu'informer et sensibiliser, c'est toujours bien, mais ce qui est beaucoup plus intéressant c'est de mettre en place des mesures de prévention de la réitération de violences. Le Dr Bekkouche dira que la sensibilisation n'est pas l'affaire seulement du secteur médical ou de la justice, mais aussi de l'éducation notamment à l'université. L'on doit sensibiliser davantage les universitaires sur la nécessité de signaler des actes de violence commis contre les femmes et les inciter à déposer plainte en cas de violence.


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