Disons-le sans
prudence aucune: Nicolas Sarkozy a de grandes chances d'être réélu au mois de
mai prochain et ils seront des millions à pleurer de rage de ne pouvoir lui
dire «maintenant, tu peux te casser…». Bien sûr, la campagne électorale ne fait
que commencer et François Hollande reste en tête des sondages. Pourtant,
certaines tendances qui se dégagent ne peuvent qu'inquiéter celles et ceux qui
n'en peuvent plus d'une présidence aussi brouillonne que ploutophile
sans oublier, en restant gentil, la personnalité pour le moins clivante du locataire du Palais de l'Elysée.
Il y a d'abord le
fait que François Hollande, candidat du Parti socialiste en particulier et,
qu'on le veuille ou non, de la gauche en général, reste inaudible et incapable
de renouer avec la dynamique porteuse qui était la sienne à l'automne dernier
lors des primaires de sa formation politique. L'homme a
beau multiplier les déplacements et les attitudes mitterrandiennes, y compris
dans sa manière de parler et de se tenir face à un auditoire, il semble faire
du surplace. Une impression accentuée par l'image de sérieux qu'il tente de se
bâtir comme en témoignent son visage émacié – conséquence d'un régime
alimentaire drastique – et les couleurs sombres (et ternes) de ses costumes et
cravates.
C'est un fait,
François Hollande souhaite visiblement mener une campagne sérieuse et digne, à
la mesure des enjeux et de la symbolique républicaine du poste qu'il convoite.
Et c'est peut-être là son erreur tactique. Car, en face, l'UMP
de Nicolas Sarkozy est en train de durcir le jeu et se livre à un véritable tir
d'artillerie lourde contre lui. Face à une droite belliqueuse, déchaînée et
parfois même hystérique, Hollande a, pour le moment, opté pour la retenue,
estimant peut-être qu'il s'agit de la meilleure attitude à tenir, l'honneur
d'un candidat à la présidence de la République française n'étant pas de rouler
dans le caniveau.
Mais dans un
contexte médiatique où les petites phrases ont bien plus d'impact électoral que
les programmes et les propositions, on peut tout de même se demander si l'héritier
de Mitterrand et de Jospin (oublions la parenthèse Ségolène Royal) ne ferait
pas mieux de mobiliser ses troupes pour qu'elles rendent coup pour coup et
qu'elles cognent aussi fort que leurs adversaires. A ce sujet, la situation
rappelle l'élection américaine de 2004 lorsque le camp de Bush multipliait les
attaques violentes et outrageantes contre John Kerry. Pour son malheur, ce
dernier a cru jusqu'au bout que l'intelligence et la clarté de son discours
suffiraient à le faire élire. Une leçon retenue par Obama
dont l'équipe électorale de 2008 comptait quelques bouledogues chargés de
rendre la monnaie de sa pièce aux républicains.
Bien entendu, il
faut aussi pouvoir être capable de répliquer. Face à une Nadine Morano qui, chaque jour ou presque, fait offense aux
pauvres poissonnières à qui on la compare, il faut avoir aussi du muscle et du
répondant. Et c'est un fait qu'ils ne sont pas nombreux dans l'équipe de
François Hollande à vouloir se colleter avec les hurleurs de l'UMP (parmi lesquels l'ineffable Frédéric Lefebvre, vous
savez ce grand intellectuel dont le livre préféré serait « Zadig et Voltaire
»…). Plus grave encore, les quelques grands bretteurs de la gauche, on pense
notamment à Jean-Luc Mélenchon, ont plutôt tendance à diriger leurs lames
contre François Hollande plutôt que de s'en prendre à leurs vrais adversaires.
Et cela amène à
évoquer un autre point parmi les handicaps actuels du candidat socialiste. Il
est évident que cette élection présidentielle de 2012 n'est pas comme les
autres. Pour la gauche, elle est un rendez-vous crucial qui doit mettre fin à
une série de trois échecs successifs (1995, 2002 et 2007) et qui doit empêcher
la droite de finir par se convaincre, comme c'était le cas avant l'élection de
Mitterrand, que le Palais de l'Elysée lui revient de droit. Mais si cette
élection est importante c'est aussi parce qu'il s'agit d'empêcher la réélection
de Sarkozy. Le « tout sauf Sarkozy » qui est dans tous les esprits à gauche (et
un peu au centre) devrait logiquement mener à l'union sacrée. Or, il n'en n'est
rien. La gauche reste divisée en prévision du premier tour et c'est ainsi que,
doucement mais sûrement, se prépare un remake du 21 avril 2002 où Chirac et Le Pen (père) avaient éliminé Jospin. Il y a encore quelques
semaines, les journalistes politiques évoquaient le scénario d'un duel Hollande
– Le Pen (fille) pour le second tour de la
présidentielle. Ils en sont aujourd'hui à décrire un scénario inverse,
catastrophique pour la gauche (et la
France) où le président sortant affronterait (avec la
certitude d'être réélu) la chef de file de l'extrême-droite française.
Par ailleurs, la
montée en puissance, du moins telle qu'elle se traduit dans les sondages, de
François Bayrou est une mauvaise nouvelle pour François Hollande. Elle signifie
que des électeurs du centre mais aussi de droite, déçus du sarkozysme,
préféreront voter pour le Béarnais plutôt que pour le candidat de la gauche.
Or, Hollande risque d'avoir besoin de ces voix dès le premier tour. Et il n'est
même pas dit qu'il puisse bénéficier de leur report dans le cas où il se
retrouverait face à Sarkozy au second tour. En 1981, Mitterrand, certes aidé
par la trahison de Chirac, avait remporté le scrutin en attirant à lui une
partie des voix de droite (celles des déçus de Giscard). C'est l'exploit que
Hollande doit réaliser tout en faisant le plein à gauche. Il lui reste près de
trois mois pour y arriver en musclant et en enflammant sa campagne. A défaut, la France et les Français
rempileront pour cinq années de plus avec Sarkozy. Cinq années de trop…
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Posté Le : 12/01/2012
Posté par : sofiane
Ecrit par : Akram Belkaid: Paris
Source : www.lequotidien-oran.com