Algérie

Histoires vraies L'odidhem (2e partie)


Résumé de la 1re partie - Mais pourquoi tant de haine envers Claudine Chauvet, cette mère de famille si discrète '
Mme Chauvet et son mari le sergent chef, entourés des trois enfants : Paul l'aîné, Didier et Diane, la plus jeune. C'était le bon temps, celui des permissions du sous-officier et des pique-niques en forêt. Dix fois, dans la scène qui va suivre, Claudine Chauvet va jeter un regard désespéré sur cette image idyllique.
«Où est-il ' demande-t-elle.
' A l'hôpital, répond le brigadier. Mais on ne va pas pouvoir le garder : sa blessure n'est pas grave et dans deux ou trois jours on lui retire ses agrafes.
' Qu'est-ce que vous allez en faire '
' Je ne sais pas, répond le commissaire.
' Asseyez-vous, messieurs, je vous en prie.»
Les deux flics se posent en silence sur le bord d'une chaise. Ceux qui ont connu cette situation, et ils sont plus nombreux qu'on l'imagine, savent l'atroce sentiment d'impuissance, d'injustice, ce mélange de haine et de compassion que les policiers lisent clairement sur le visage sans grâce de la malheureuse.
«Et pourtant, dit-elle, il était bon, vous savez.»
Long regard sur l'unique photo du pique-nique dans la forêt.
« Lorsqu'il était dans l'armée, en Indochine, en Algérie ou en garnison, et qu'il venait passer ses permissions à la maison, nous étions très heureux. D'ailleurs, les enfants l'adoraient.»
Le brigadier, qui a retiré son képi et s'éponge le front avec un grand mouchoir à carreaux comme seuls peuvent en avoir les gendarmes, manifeste sa grande expérience de la vie en déclarant, péremptoire :
«Bien sûr, cela s'est gâté quand il a pris sa retraite !
' Oui... Vous comprenez, quand il était en permission, c'était la joie pour tous. On oubliait les soucis. Mais, dès qu'il était parti, j'avais toutes les responsabilités et notamment les soucis de la construction de cette maison. Il ne s'est jamais rendu compte de ce que cela représentait de difficultés, de démarches, de crédits, d'emprunts, d'échéances. Quand il a pris sa retraite, il croyait qu'il allait vivre au paradis. Au lieu de cela, il a connu nos problèmes. Son salaire de mécanicien était tout juste suffisant. Il me répétait sans arrêt : ''Tu as bouffé mon pognon.'' Mais cela n'était pas le plus grave.»
Le commissaire, dont le regard un peu distrait a depuis longtemps inventorié de fond en comble les quatre murs du living-room, chausse ses lunettes pour mieux voir la photo du sergent-chef au-dessus de la cheminée :
«Il devait être très jaloux, hein ' C'est
cela '»
Sous son air brave, le visage du baroudeur éclate en effet de jalousie : le regard est jaloux, le nez jaloux, la commissure des lèvres est celle d'un jaloux ; l'attitude, le port de tête, tout indique une bonté gâchée, une émotion difficilement contenue par une inquiétude agressive. Bref, ce genre d'homme qui, pour rien au monde, ne voudrait laisser passer une occasion de souffrir.
D'ailleurs, Claudine Chauvet le confirme :
«Oui, c'est cela qui a tout gâché. Il était devenu d'une jalousie maladive.»
Là-dessus, comme elle aperçoit une sorte de perplexité sur le visage des deux hommes, elle a presque un sourire :
«Oui, je sais bien... J'imagine ce que vous pensez : à mon âge et comme je suis. C'est pour cela que je dis que cette jalousie est maladive. (A suivre...)
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