Algérie - A la une

Histoires vraies L'envoûtement (5e partie et fin)



Histoires vraies
 L'envoûtement (5e partie et fin)
Résumé de la 4e partie - a est accusée par les villageois d'avoir incité Fulvio à commettre ce crime...
Le policier l'emmène. Ensemble, ils traversent la foule des habitants de Corbello qui se sont attroupés devant la ferme pour assister à l'événement. Entre deux sanglots, Pia leur lance des injures et même des malédictions. Elle semble vouloir les transpercer de ses yeux noirs... Il faut reconnaître que, si elle n'est pas sorcière, en ce moment, elle en a tout l'air !
L'officier Mazzola n'en apprendra guère plus au cours de son enquête. Fulvio a bien tué sa tante pour la raison qu'il a dite : parce qu'il pensait qu'elle avait envoûté sa belle-mère.
Celle-ci l'a-t-elle incité à commettre le meurtre ' C'est possible, mais ce n'est pas certain. Y a-t-il eu quelque chose entre eux ' Ça s'est déjà vu dans ces campagnes. Tous deux jurent que non, mais une chose est sûre, c'est que Fulvio subit fortement l'influence de Pia...
C'est cette affaire hors du commun que les juges et les jurés de Rome vont avoir à trancher, le 17 mai 1946. La salle est envahie par des gens dont le moins qu'on puisse dire est qu'ils n'ont pas l'allure d'habitants de la capitale. Ce sont les villageois de Corbello qui ont presque tous tenu à témoigner. Ils ont mis pour la circonstance leurs vêtements de cérémonie. Les costumes et les robes sentent la naphtaline et contrastent avec les mains calleuses et les visages burinés.
Dans le box, les deux accusés, eux non plus, ne ressemblent pas à ceux qu'on voit habituellement. Fidèle à son tempérament, Pia Signorelli semble prête à bondir. En tout cas, on sent bien qu'elle se défendra farouchement. Quant à Fulvio, au contraire, il est étrangement calme. De temps en temps, il a même un léger sourire. On sent que depuis son acte, il a retrouvé la paix.
Et commencent alors les débats, qui figurent parmi les plus surprenants des annales judiciaires italiennes. Dans la région de Corbello, un dicton affirme qu'on n'est tenu de dire la vérité que si l'on a les deux pieds sur terre. Et les villageois qui sont venus pour accabler la sorcière vont le mettre en pratique.
' C'est Pia qui a tué la première Mme Signorelli. Elle m'a dit un jour : «Ça n'a pas traîné avec le sort que je lui ai lancé.»
Rugissement de Pia :
' Tu viens de lever le pied ! Pose ton pied par terre !
' J'ai vu Pia qui embrassait Fulvio dans le champ après les moissons.
Nouvelle intervention de l'accusée :
' Tu as levé le pied !
A la fin, le président, qui a renoncé à faire comprendre aux villageois la gravité d'un faux témoignage, est obligé de faire constater par le greffier que les témoins gardent bien leurs deux pieds sur le sol pendant leur déposition...
Et, à l'issue des débats, Fulvio Signorelli est condamné à vingt ans de prison. Pia, quant à elle, est acquittée.
Fulvio a accueilli le verdict avec le même calme qu'il avait manifesté jusqu'alors et il a lancé à sa belle-mère un regard où on lisait une sorte de vénération.
Dans le fond, c'étaient les paysans de Corbello qui avaient vu juste, avec leur intuition primaire. Pia Signorelli, la «sorcière», était bien responsable du geste meurtrier, en tournant la tête du malheureux Fulvio. Elle avait agi sans le vouloir et peut-être sans s'en rendre compte, avec une magie bien plus redoutable que les crapauds et les sorts jetés les nuits de pleine lune : son charme de femme.


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)