Algérie

Histoires vraies Ennemis intimes (3e partie)



Résumé de la 2e partie - Ce qu'il y a de surprenant c'est que La Bizeux et Le Carret vivaient comme un vieux couple qui s'observe, et la haine leur servait d'amour...
Donc la Bizeux est sortie de chez elle, affolée, tandis que quelques têtes apparaissaient aux fenêtres voisines. Presque aussitôt, Carret a hurlé une menace du genre : «Rentre chez toi ou je t'envoie du plomb quelque part.»
Curieux comportement. Voulait-il vraiment tirer ' Voulait-il seulement faire peur ' Ou bien criait-il n'importe quoi ' Il reste qu'en vieux chasseur expérimenté il a épaulé rapidement et tiré sur sa voisine, exactement comme il l'aurait fait pour un canard sauvage.
Il y eut alors un drôle de silence. Un témoin a vu la silhouette de la victime, en robe de chambre, tournoyer lentement et battre l'air de ses longs bras avant de s'effondrer derrière la haie. Cette haie d'épineux qui servait de frontière entre les deux jardins depuis si longtemps. Ce même témoin a donné l'alerte en téléphonant aux gendarmes. Mais, lorsque la voiture est arrivée, le père Carret était rentré chez lui toute lumière éteinte et volets fermés. Il avait certainement eu le temps de constater la mort de son ennemie, car, à la première injonction des gendarmes, il a hurlé derrière ses volets :
«Enterrez-la comme un chien, c'est tout ce qu'elle mérite !»
La lune éclairait parfaitement les lieux. Deux hommes en uniforme, penchés sur le corps de la vieille femme, représentaient pour Carret des cibles parfaites. Et cette fois il a tiré sans sommations, blessant un gendarme à l'épaule. En rampant derrière la haie, les deux hommes réussirent péniblement à regagner leur voiture.
L'affaire prenait des proportions jamais vues dans le village. Ce forcené de soixante-seize ans, enfermé chez lui, avec des munitions et de quoi se nourrir longtemps, peut tenir en échec une petite année. Surtout le père Carret. On sait qu'il fabrique ses cartouches de chasse, on sait qu'il a au moins deux fusils, sans compter ceux qu'il a pu dissimuler après la guerre. On sait qu'il accumule les provisions, par goût, par peur d'en manquer, par gourmandise. On sait aussi qu'il est malin, entêté et que les tentatives de dialogue ne mèneront à rien.
La première des choses à faire, c'est un repli stratégique. Ensuite, pour ne plus être pris pour cible, les gendarmes installent un gros projecteur qui illumine la maison afin d'éblouir le tireur.
La réaction de l'assiégé ne se fait pas attendre, il tire au hasard sur le projecteur et réussit à l'atteindre. C'était malheureusement le seul de la brigade. Si la lune n'était pas si lumineuse, si les gendarmes avaient la moindre grenade lacrymogène... Mais dans ce petit pays ils n'ont pas l'habitude des révolutions. Et il faut réclamer du matériel à la ville la plus proche : plus de cinquante kilomètres. Cela prend du temps. Et pendant ce temps le chef de la brigade essaie de parlementer. Première tentative au téléphone. Le père Carret décroche et reconnaît la voix :
«Le diable t'emporte !»
C'est sa formule habituelle.
«Soyez raisonnable, Augustin, sortez et venez vous expliquer. On ne vous fera pas de mal.
' Personne peut me faire du mal ! Et la victime c'est moi ! Faudrait pas l'oublier.
' Justement, venez vous expliquer.
' Tu me prends pour un imbécile ' Tu crois que je connais pas l'astuce ' Ça me rappelle les Allemands, tiens ! (A suivre...)


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