Algérie

Histoires vraies L'illusionniste (2e partie)



Résumé de la 1re partie - Jean M. que les policiers sont venus arrêter, tient un journal sur lequel il mentionne tous ses faits et gestes...
Elle va revenir en effet. C'est une petite vendeuse, qui habite une pension de famille. Elle était partie voir ses parents, elle ne va croiser le chemin de Jean que pour une journée. Le temps de faire ses valises. Mais c'est une tragédie stupide, car elle va en mourir. Si elle avait pris ses valises il y a quinze jours, si elle n'était pas reparue, elle ne serait pas morte. Elle n'aurait jamais su qu'un jeune fou s'était mis à l'aimer au point de vouloir la tuer d'une rafale de mitraillette.
Ce jeune fou, qui est-ce ' Peu de gens le savent. Mais on peut lire son casier judiciaire : «Quinze jours de prison pour détention d'arme et vol. Trois mois pour cambriolage dans une épicerie.»
Il écrit sur son cahier : «Ma réputation de gangster est faite.»
Gangster ' Pauvre gosse. Il est maigre, il a le c'ur fragile, et il boit pour oublier qu'il a peur de la vie, de la solitude, et de tout ce qui tourne dans sa tête. Autour de lui, ni affection, ni soins. On le met en prison, il en ressort, et personne ne s'aperçoit qu'il délire, qu'il est malade, qu'il se prend pour Pierrot-le-Fou.
Il a un père bienveillant et brave, une grand-mère qui lui a passé tous ses caprices. Il aurait pu comme d'autres faire autre chose que de la prison pour vol. Mais c'est un vantard et un orgueilleux, qui a passé son enfance à admirer les gangsters. Qui s'est aperçu que, dans son cerveau fragile, cette admiration prenait des proportions inquiétantes et dramatiques ' Personne.
Ce garçon a atteint la folie par petites étapes, silencieusement, à l'insu de tous. Une mère, peut-être, aurait pu découvrir cela, l'éviter, ou faire sans le savoir un contrepoids à ces idées saugrenues. Peut-être, s'il en avait eu une.
Mais il est trop tard, de toute façon. Cet amour démesuré qu'il voue à une jeune fille inconnue va faire exploser sa vie.
Minuit à nouveau, fin octobre 1949. Jean se lève.
Il sait que la jeune fille est chez elle pour la nuit et qu'elle doit repartir le lendemain. Il sort de sa chambre avec sa mitraillette. Il traverse le couloir de la pension de famille et frappe à sa porte. Elle n'ouvre pas. Il reste tout seul dans le noir, devant cette porte close. Avant de quitter sa chambre, il a écrit sur le petit cahier d'écolier :
«Le roman d'amour est terminé. Je regarde une balle de 9 millimètres posée devant moi sur la table. Un jour peut-être elle me trouera le c'ur. Je me vois par instants perdu dans un de ces gangs parisiens ou marseillais, mais ce n'est qu'une illusion, une vague d'illusions que je n'ai connues que dans les films de gangsters joués au cinéma, et qui ébranlent les cerveaux de tant de jeunes gens en quête d'aventures. Pour moi, une chose est certaine maintenant. La vie n'est pas un film. Je n'ai pas l'envergure de ces durs, comme Pierrot-le-Fou, Giner ou Attia. Je suis persuadé que je serais devenu quelqu'un si j'étais allé à Paris, et si j'avais roulé dans une voiture dernier modèle. Mais les choses n'en sont pas là. J'en suis loin. Je ne suis qu'un demi-sel, tout juste bon à rêver d'exploits.»
Il a écrit cela. Et maintenant il frappe à la porte de la jeune fille à nouveau. Elle n'ouvre pas, mais se lève pour faire de la lumière. Peut-être pour alerter quelqu'un. Mais il n'y a personne, Jean le sait. Tout le monde est sorti, ce samedi soir. Pour tourner le bouton de la lumière, elle doit passer devant la porte. Et le tueur fait feu, à travers la porte. Puis il rentre chez lui, pour écrire :
«Je l'ai eue. J'aurai tout fait pour qu'elle ne soit pas à un autre. Maintenant il faut mourir. (A suivre...)


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