Algérie

Histoires vraies L'exécution (1re partie)


Histoires vraies
                                    L'exécution (1re partie)
L'Indien est debout, dans sa prison, le dos au mur et les bras croisés. Il regarde le shérif, bien en face, de son regard noir, et demande d'une voix calme :
«Tu as peur, shérif '
' C'est toi qui devrais avoir peur, Silas.
' Peur de mourir ' Ce n'est rien, mourir ; c'est vivre qui est plus difficile. Regarde-toi, tu vis et tu as peur. Tu es blanc et tu as peur. Moi je sus Indien, je vais mourir et je n'ai pas peur.
' Silas, écoute, sois raisonnable, je te donne un cheval, des vivres et la liberté !
' Shérif, tu m'as condamné pour meurtre, tu dois m'exécuter.
' Et ta femme, et ta fille '
' Ne me parle pas d'elles. Les femmes survivent à toutes les catastrophes, et ma mort n'est qu'une petite catastrophe.
' Je vais parler à tes amis, Silas, ils te feront évader malgré toi si je le veux.
' Parle-leur, shérif. Ce que tu veux, ils s'en moquent maintenant. Il est trop tard, il ne fallait pas faire mon procès. Il ne fallait pas me condamner à mort.»
Le shérif Pursley, cinquante ans, regarde son prisonnier avec rage :
«Quel âge as-tu, Silas '
' Cinquante-quatre ans...
' Et quel âge a ta femme '
' Vingt ans, et mon enfant trois ans. Tu vois, je sais compter comme toi. Mais j'aurais pu te dire le nombre de lunes depuis ma naissance, si tu étais Indien.
' Tu sais compter, tu sais parler, tu sais lire aussi tu comptes beaucoup pour ta tribu, tu seras peut-être un chef plus tard, réfléchis à ma proposition.
' Tu me donnes des arguments de Blanc, shérif. Tu crois me donner l'envie de vivre avec ça ' Il y a trois mois, j'étais un assassin et je devais mourir !
' La politique change...
' La tienne, pas la mienne. Maintenant va-t'en. Et crève de peur, ça m'est égal. Moi, je mourrai tranquille.»
Le shérif Pursley referme la porte de la cellule, en grognant des insultes. Ce maudit Indien se moque de lui. Mais à quel jeu joue-t-il ' Il faudra bien que l'exécution ait lieu, un jour ou l'autre. Washington ne comprendra plus, si pour la quatrième fois, le département demande l'ajournement. Il n'y a plus d'arguments légaux, et la grâce est impossible à présent.
Le shérif a peur. Peur pour sa peau. Cette histoire est politique, personne n'a l'air de s'en douter en haut lieu. Le gouverneur s'en moque, il est loin, mais lui, Pursley, il est là. La réserve d'Indiens est proche et il ne s'agit pas d'un western inventé par Hollywood, mais d'une exécution pour meurtre.
Le shérif Pursley est une grande gueule et un froussard. Ce n'est pas un méchant homme pour autant, il ne représente pas forcément le vilain Blanc, caricatural, qui déteste les Indiens et ne pense qu'à les écraser. Tom Pursley manque peut-être d'intelligence et de courage, c'est tout ce que l'on peut honnêtement lui reprocher pour l'instant, ainsi que d'avoir une grande gueule.
S'il n'avait pas hurlé haut et fort qu'il allait mettre de l'ordre dans cette fichue réserve et se mêler des élections de la tribu, il n'en serait pas là. C'est-à-dire sur la route de la ville, galopant chez le gouverneur, avec la terreur de voir surgir à chaque instant une armée d'Indiens pour lui faire la peau.
Chez le gouverneur on le fait attendre. Un domestique stylé détaille avec mépris son pantalon froissé, sa chemise tachée de sueur et l'infâme chapeau graisseux qu'il tourne entre ses doigts. S'il n'était pas shérif de Wilburton, Pursley n'aurait même pas le droit d'essuyer ses bottes sur le paillasson du gouverneur.
«Dites au gouverneur que c'est urgent ! C'est à propos de l'exécution !
' Son Excellence est occupée, shérif...
' Je m'en fous ! Quand il aura toute une tribu d'Indiens sur le dos, il n'aura plus le temps de s'occuper d'autre chose. Va le chercher, larbin, ou j'y vais moi-même !» (A suivre...)
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