Algérie

Histoires vraies J'avais treize ans (4e partie)



Histoires vraies
                                    J'avais treize ans (4e partie)
Résumé de la 3e partie n Les parents d'Emilie, pour cacher la grossesse de leur fille, font croire qu'elle est atteinte d'une maladie contagieuse. Pour cela elle vit cloîtrée...
On est un enfant soi-même. Je me souviens, je me regardais dans la glace. Je regardais mon corps, j'essayais de comprendre, et je n'arrivais pas. J'avais des nausées, j'avais mal à l'estomac et mal au ventre, je ne dormais presque plus. C'est tout. Quand je repense à cette période, j'ai vraiment l'impression d'avoir été malade, et malheureuse.»
En réalité, Emilie est totalement tenue à l'écart du drame qu'elle a provoqué dans sa famille.
Les parents, affolés, n'ont qu'une idée, effacer la chose. Et comme il est impossible de faire opérer Emilie, ils ont accepté un étrange marché.
Car il faut bien appeler cela un marché.
Un jour, on annonce à Emilie la décision qui la concerne et on ne lui demande pas son avis. Son père ne lui parle plus depuis qu'il a découvert ce qu'il appelle la «saleté» de sa fille. C'est donc sa mère qui lui annonce :
«Tu vas partir dans une clinique. Tu y resteras jusqu'à la fin de ta ''maladie''.»
Car elle dit «maladie» comme si elle pouvait, par cet euphémisme, occulter le fait qu'Emilie est enceinte.
Emilie ne pose pas de questions. Elle sait qu'elle n'en a pas le droit, qu'elle n'est qu'une sale gosse que l'on punit, et qui a bien mérité sa punition. Elle se laisse emmener, toujours par sa mère. Le père ne veut pas participer. Il lui dit simplement, sur le pas de la porte :
«Quand je te reverrai, tout sera fini, et nous ne parlerons plus de ça. Tu n'en parleras plus jamais, c'est compris '»
Emilie a le c'ur gros, et les larmes aux yeux. Elle monte dans un taxi avec sa mère. Elles vont prendre le train, puis un autre taxi qui les emmène à la porte d'une clinique.
Emilie, à dix-huit ans, cherche vainement à se souvenir :
«C'était à M... je crois, une ville inconnue de moi. Mais je suis incapable de situer l'endroit. J'étais comme anesthésiée, et j'avais terriblement peur. C'était la première fois que je quittais ma mère de cette façon. Elle m'a laissée dans un bureau, il y avait une femme assez âgée et une infirmière. Je n'ai pas compris ce que faisait ma mère, elle a signé un papier il me semble et puis elle m'a embrassée sur la joue, à toute vitesse, avant de partir. Je ne l'ai pas revue avant plusieurs mois.»
«On m'a conduite dans une chambre où il y avait la radio et la télévision. L'infirmière m'a dit de ranger mes affaires et qu'elle viendrait me chercher pour une visite médicale. Je suis restée là pendant quatre mois et demi, jusqu'à la fin. Les gens étaient gentils, mais je n'avais pas le droit de sortir et les visites étaient interdites. Même mes parents ne sont pas venus. La plupart du temps je restais au lit, je regardais la télévision, je regardais tout, ça me passionnait, chez nous, nous n'en avions pas.»
Emilie va passer ainsi les derniers mois de sa grossesse honteuse. Dans cette drôle de clinique. Un médecin a délivré un certificat médical pour le lycée. Il y dit qu'Emilie est en maison de repos, mais dans ce curieux établissement, la complaisance va plus loin. Elle va même très loin.
Emilie accouche au début du mois de mai. Elle a à peine senti la première douleur que déjà on l'endort. Elle ne saura rien, ne sentira rien, ne verra rien. A son réveil, le lendemain, elle a beau demander ce qui s'est passé, réclamer sa mère, réclamer l'enfant, on lui répond que par monosyllabes.
Terrorisée, Emilie finit par supplier qu'on lui dise la vérité : «Est-ce que le bébé est mort '»
Elle se souvient à dix-huit ans de son angoisse d'alors. (A suivre...)


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