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Histoires vraies Charlotte est une grande fille (3e partie et fin)



Histoires vraies                                    Charlotte est une grande fille (3e partie et fin)
Résumé de la 2e partie - Charlotte explique à son voisin, Hervé, pourquoi elle séquestre sa s'ur Thérèse...
Hervé hoche la tête.
' Pour la chambre, Thérèse a refusé. Alors j'ai commencé à me révolter. J'ai refusé de me lever, et même de manger. C'est là que mon beau-frère est devenu violent. Il s'est mis à me battre plusieurs fois par jour. En fin de compte, quand ils ont vu que je ne leur obéissais plus comme une gentille petite fille, ils ont pris contact avec un de nos cousins psychiatre pour me faire interner. J'ai été placée en observation dans un service psychiatrique, qui a bien été obligé de me relâcher au bout d'un mois.
A ce moment de son récit, la dame éclate en sanglots. C'est à partir de là, explique-t-elle que son calvaire a commencé. Sa s'ur la tenait recluse dans sa chambre, et elle ne lui donnait à manger que des choses qu'elle, Charlotte, détestait depuis toujours. Elle n'avait plus le droit de sortir ' même pas celui de regarder la télévision. A la boutique, quand les clients demandaient de ses nouvelles, on leur répondait : «La pauvre petite est malade, pour nous c'est un grand poids...»
Hervé se tortille sur sa chaise de cuisine :
' Et ça a duré longtemps '
' Neuf ans, répond Charlotte. Jusqu'à leur accident, en 1986.
' Quel accident '
' Un accident de voiture. Un jour qu'ils étaient partis faire une course, en me laissant seule, enfermée à la maison, ils ont eu un accident sur l'autoroute. Mon beau-frère est mort, Thérèse est restée paralysée des jambes.
Charlotte s'interrompt pour faire un large sourire.
' J'ai enfin pu commencer à me venger, dit-elle. Il y a cinq ans.
' Vous voulez dire que vous séquestrez votre s'ur depuis cinq ans ' Mais c'est horrible !
' Où est l'horreur ' Cette saleté m'a bouffé ma vie, m'a exploitée jusqu'à la corde, m'a battue comme un âne, a essayé de me faire passer pour folle avant de m'enfermer pendant dix ans dans un cachot. Moi, je me contente de la nourrir sans lui adresser la parole et de la bâillonner quand je m'absente, ce qui est d'ailleurs très rare.
' Mais, dit Hervé, elle est sale et maltraitée...
' Elle est traitée comme elle le mérite. Et pour ce qui est de la saleté, permettez-moi de vous dire qu'elle n'a jamais été propre.
' Il faut la placer dans une maison de retraite, dit Hervé.
' Occupez-vous-en, puisqu'elle vous intéresse. Moi, je ne lèverai pas le petit doigt pour elle.
En prononçant ces mots, Charlotte éclate en sanglots. Des sanglots syncopés, douloureux, insupportables. Hervé en profite pour se retirer. Il a un certain nombre de démarches à accomplir auprès des services sociaux.
' Si je peux vous donner un conseil, dit-il en sortant, c'est de la rendre un peu plus présentable. Sinon, on risque de vous faire des difficultés...
' D'accord, dit Charlotte. Merci.
Hervé a fait son devoir.
Thérèse a été placée dans une maison de retraite. Charlotte a vendu la boutique de fleurs et, après deux ans de solitude, elle est morte dans l'appartement où elle n'avait connu que le malheur.


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