Algérie

Histoires vraies


Histoires vraies
Résumé de la 1re partie - La nuit, la cohabitation devient insupportable...
Après le dîner, il faut pousser la table, la mettre debout contre un mur et sortir les lits ou ce qui en tient lieu : un matelas à deux places, roulé pendant la journée, pour Raymonde et son jeune amant, des lits de camp pliables pour les garçons.
Les conditions quasi bestiales de cette promiscuité ne sont pourtant pas ce qu'il y a de plus insupportable. Il y a pire.
La loge, comme toutes les autres, est fermée par une porte-fenêtre et le règlement de copropriété stipule que son rideau doit être ouvert nuit et jour pour permettre de surveiller les allées et venues des locataires. Dans la pratique, cela signifie que ces mêmes locataires peuvent plonger le regard à tout instant dans la pièce. Raymonde et les siens sont comme des animaux dans un zoo, des poissons dans un aquarium...
C'est dans ces conditions que grandit le petit Georges. A l'école communale de son quartier, il n'est pas bon élève ; ses devoirs, en particulier, sont des plus médiocres. Il faut dire qu'à la maison, il n'est pas dans les conditions idéales pour les faire. Il traîne beaucoup dans les rues, aussi. Il fait partie d'une bande de gamins qui s'amusent sur le trottoir. Raymonde le lui reproche.
' Pourquoi est-ce que tu es toujours dehors ' Des locataires me l'ont encore fait remarquer...
Georges hausse les épaules et ne répond pas. Il n'ose pas dire qu'il reste dehors parce que habiter dans la loge le dégoûte et surtout lui fait honte. Oui, il meurt de honte de coucher tous les soirs dans ce qu'il n'appelle plus que «l'aquarium».
Automne 1954... Georges Garnier a quinze ans. Il vient de rentrer en classe pour ce qui doit être normalement sa dernière année. Il a raté son certificat d'études l'année précédente mais, cette fois, il espère bien l'avoir. Après, il ne sait pas ce qu'il fera. Il voudrait entrer en apprentissage quelque part et surtout être logé sur place. N'importe quoi lui conviendrait, même un taudis, même un placard, pourvu qu'il y ait une vraie porte. A ce moment-là, il se sentira enfin comme tout le monde. Il pourra vivre !
Mais en attendant, il a une année entière à tenir et les conditions de vie dans l'«aquarium» ne se sont pas arrangées, loin de là. Raymonde Garnier a maintenant cinquante ans. Sylvestre est toujours à ses côtés. A trente ans, il n'a jamais rien fait de ses dix doigts. Non seulement ses exploits dans la Résistance étaient imaginaires, mais il s'est révélé comme un alcoolique notoire. Il vit aux crochets de Raymonde, ce qui n'empêche pas cette dernière de lui conserver toute sa tendresse. Faut-il préciser que Georges ne nourrit pas les mêmes sentiments à l'égard de celui qui, dans le foyer, tient la place du père ' Raymonde Garnier manifeste également beaucoup d'affection pour son petit dernier, Joël, sans doute à cause de son état de santé. Il n'est décidément pas normal. Joël est débile léger ; il a bien plus de mal à suivre en classe que Georges lui-même et il a des crises de somnambulisme, ce qui donne le charme supplémentaire qu'on imagine aux nuits dans l'aquarium...
Toutes ces épreuves accumulées finissent par rendre la vie totalement insupportable au jeune Georges. Il n'en peut plus et sa scolarité s'en ressent ; ses résultats sont médiocres, ce qui le contrarie plus encore : il voit s'envoler la perspective du certificat d'études et de fuir l'enfer familial. Alors, il devient amer, puis violent. (A suivre...)


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