Algérie

Histoires vraies


Histoires vraies
Mario Danielli, quinze ans, rentre chez lui, dans une jolie villa d'une rue élégante de la banlieue de Milan. Le jeune homme sort du lycée. D'habitude, c'est un trajet qu'il accomplit en quelques minutes, mais cela fait près d'une demi-heure qu'il hésite, qu'il fait demi-tour aux abords de la villa et revient de nouveau sur ses pas...
Mario Danielli est frêle pour son âge. C'est un blondinet aux yeux bleus. Il n'y a pas besoin de l'observer longtemps pour se rendre compte qu'il s'agit d'un être timide et dominé.
Enfin, il se décide... Tête baissée, les yeux rivés sur le sol, il pousse la grille du jardin et sonne à la porte. Il serre contre lui son cartable, qui contient la raison de sa peur, de sa pani-que : sa composition de mathématiques.
C'est sa mère qui lui ouvre. Elle l'embrasse sans dire un mot. Mario n'en est ni étonné ni rassuré: sa mère ne dit jamais rien. Mais déjà, dans la salle à manger, une voix impatiente retentit.
' C'est à cette heure-là que tu rentres ' Viens un peu par ici !
Mario Danielli obéit comme un automate. Il sait qu'il n'y a rien à faire. Il aimerait de toutes ses forces être ailleurs, mais c'est trop tard...
Devant la table, où il terminait son déjeuner, Giuseppe Danielli, son père, le considère fixement.
C'est un homme massif, très brun, qui paraît plus que ses quarante ans.
' Alors ' D'où viens-tu ' Tu as encore été traîner dans les rues, c'est ça '
Mario Danielli bafouille :
' Oui... Enfin non.
Et puis, il se lance à l'eau :
' J'ai le résultat de ma composition de maths...
D'une main tremblante, il sort la copie annotée de rouge. Son père la lui arrache et pousse un rugissement :
' Deux sur vingt... Avant-dernier ! Mais tu es le pire des bons à rien, tu es pire que tout !
Angela Danielli tente timidement d'intervenir :
' Ne te mets pas dans des états pareils, Giu-seppe. Le petit se rattrapera la prochaine fois...
Mais son mari ne l'entend pas.
' Tu ne passeras même pas ton bac ! Tu seras renvoyé du lycée avant. Et ne compte pas sur moi pour te mettre dans un collège privé. Tu iras au travail tout de suite, en usine ou ailleurs... En attendant, monte dans ta chambre. Tu resteras à la maison tout le week-end, tu réviseras tes maths...
La tête basse, Mario gagne sa chambre. Il estime s'en être tiré à bon compte. Au moins son père ne l'a pas battu.
Quant à Giuseppe Danielli, une fois sa colère passée, il médite sur la difficulté d'être père et l'ingratitude des enfants en général. Ce n'est pourtant pas faute de crier. Il n'y a que cela que Mario comprenne... Enfin, lui, au moins, malgré tous ses défauts, il n'est pas comme les autres. Avec les principes qu'il a reçus, il sera un homme sain. Ce ne sera pas un de ces petits voyous à cheveux longs qui courent les rues, en cette année 1968...
Et Giuseppe Danielli sait de quoi il parle. Il est juge pour enfants au tribunal de Milan. Un magistrat d'ailleurs connu. pour sa sévérité et ses principes. Giuseppe Danielli est très confiant dans ses principes. Il n'imagine rien d'autre en dehors d'eux. L'imagination n'a jamais été son fort.
Que sait-il vraiment dans le fond, de son fils, Giuseppe Danielli ' Sa fonction ne requiert aucune aptitude spéciale en psychologie. Pour être juge pour enfants, en Italie, il suffit de se présenter au concours administratif et de répondre à des questions de droit. C'est tout.
Giuseppe Danielli n'a jamais été choqué de voir Mario rentrer couvert de bleus quand il était plus jeune. A sa femme qui s'en inquiétait, il répondait :
' C'est normal. Un garçon est fait pour se battre. (A suivre...)


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