Algérie

Histoire et moments accélérateurs



La journée du 11 décembre 1960 avait accéléré, indubitablement, l'internationalisation de la question algérienne et son examen au sein de l'ONU. Les septuagénaires et plus s'en souviennent très bien. Les manifestations populaires dans plusieurs villes ont eu un écho déterminant au double plan interne et externe, contribuant ainsi au renforcement des démarches diplomatiques et médiatiques du Gouvernement provisoire à l'époque.Aujourd'hui, la Journée du 11 Décembre est une date choisie pour commémorer le soulèvement populaire. Car, ne pas oublier que les manifestations ont duré plusieurs jours avec leur gros lot d'arrestations et de meurtres commis par l'Armée coloniale, harkis et Unités territoriales y compris, tous ayant été «surpris» par un «Hirak» national.
Si la date du 11 décembre a été choisie c'est, me semble-t-il, parce qu'elle est le moment paroxystique ; moment qui avait vu les quartiers populaires de la Capitale s'enflammer. Le mot d'ordre était simple, percutant et surtout inattendu : « Que le peuple entre en Scène», avec l'occupation de l'espace public dans les lieux les plus emblématiques. Partout au niveau des grandes villes du pays. Partout, c'est le déferlement de la population depuis les piémonts vers les centres-villes. Les autorités militaires maintiennent leurs contingents sur place pour la défense des quartiers européens devant le raz-de-marée populaire. Souvent, sinon toujours, les soldats sortent de la caserne. Les armes automatiques crépitent. Juste après, le 20 décembre 1960, la liste afro-asiatique qui encadre et contrôle la mission d'autodétermination en Algérie est ratifiée, à la majorité, en faveur de la Cause algérienne, avec 63 voix contre 27, et 8 abstentions. À New York, où se déroulaient les préparatifs de la quinzième session des Nations unies, les délégués algériens, engagés dans une bataille pour faire accepter le principe de la tenue d'un référendum d'autodétermination, sous la supervision des Nations unies, trouvèrent que leur mission était devenue facile, grâce aux manifestations de décembre. Krim Belkacem a annoncé qu'il exprimerait, depuis la tribune de Manhattan, sa volonté de faire du chant de « Belcourt», une véritable victoire diplomatique. Le Dien Bien Phu psychologique, politique et diplomatique venait de commencer pour la France militaro-coloniale dont le sort allait être définitivement scellé avec les manifestations populaires des Algériens en France même, à Paris, le 17 Octobre 1961.
Moment paroxystique, disais-je, car juste avant, on avait eu un événement déclencheur assez oublié, hélas. Il est vrai que la «grande» politique ne s'embarrasse pas trop des détails de l'Histoire quand il s'agit de la mettre en scène. Encore plus lorsque les metteurs en scène - pour la plupart- ne savent et ne veulent la lire qu'en diagonale, plus par calculs et précipitation que par ignorance. Répétée, la vision gagne en crédibilité, se retrouve même inscrite et enseignée dans les manuels scolaires et est, par la suite, difficile à corriger. Il en est ainsi pour plusieurs dates, événements et personnages-clés de la guerre de Libération nationale, omis ou «effacés», esquivés ou contournés.
Il est vrai qu'assez naturellement, en Histoire, un grand événement ne manque jamais de chasser le suivant, surtout s'il est encore plus imposant. Il en est ainsi des 20 Août 55 et 56 et il en est ainsi -assez longtemps - des manifestations populaires de Décembre 60 qui ont commencé, en vérité, avant le 11 à Ain Témouchent exactement lorsque le chef de l'Etat français de l'époque, le général De Gaulle s'est rendu en Algérie, le 9 décembre, dans le cadre de la mise en ?uvre de son nouveau projet d'«Algérie algérienne». Les extrémistes «pieds noirs» s'apprêtaient alors à imposer un énorme mensonge, prétendant parler au nom de tous les Algériens. La réponse des Algériens a été très claire et massive. Ils étaient venus pour scander «Algérie algérienne» et «Algérie musulmane». Une première étincelle ! Le peuple venait de choisir de vivre et non plus de subir. Quoi qu'il en coûte.
Ps : Selon l'historien Fouad Soufi, «Lakhdar Bentobal a dit que le GPRA n'avait pas pensé à ce type d'action». Il estime nécessaire, par ailleurs, de préciser que «le mouvement n'a pas commencé dans le quartier de Mohamed Belouizdad, puisque la veille, il y a eu des morts dans une manifestation à Oran avant qu'elle ne culmine dans la capitale où elle s'est terminée par une forte répression des forces coloniales».


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