Algérie

HISTOIRE DE TIARET



Alta Network 2007
Dossier « Tiaret de ma jeunesse »
2eme partie : Interview de Clément Aguila



Clément Aguila est un passionné de Photographie et c’est grâce à
cette passion qu’il permet à de nombreux Tiaretiens et Algériens de
redécouvrir l’histoire de cette ville à travers les différents clichés qu’il a
accumulé. Il a ainsi retracé cette histoire dans son ouvrage « Tiaret de ma
jeunesse » qui reprend ces photographies et nous fait replonger dans
l’histoire de cette ville aux influences diverses.

Clément Aguila, qui comme beaucoup a quitté l’Algérie en 1956, a
toujours gardé un fort lien avec sa terre d’origine dont il fait d’ailleurs
souvent la promotion.
Dans cette interview nous essayons de comprendre ce qui l’a motivé à
réaliser ce magnifique ouvrage et de connaître son ressentiment vis-à-vis
de l’Algérie.



Alta Network : Monsieur Aguila, pourquoi cet ouvrage « Tiaret de
ma jeunesse » ?

Dès 17 ans, la photographie est devenue une passion pour moi. Cet
ouvrage était une façon de concilier mon attachement à ma ville d’origine,
Tiaret, et mon principal passe-temps.
En fait j’avais déjà accumulé plus de 2500 photos et beaucoup de
personnes originaires de la ville me demandaient régulièrement des
exemplaires. On ne trouvait que très peu d’éléments sur Internet et la
création de cet ouvrage est vite devenu une évidence.
A la base, la demande venait beaucoup des pieds-noirs mais aujourd’hui il
y a également une forte demande en Algérie.

Depuis quand votre famille était en Algérie ?

Mon père était immigré andalou. A l’origine il était tailleur de marbre à
Macael l’équivalent espagnol de Carrare en Italie. A Tiaret il taillait plutôt
la pierre pour les escaliers, les bordures de trottoir ou les tombes, pour les
cimetières musulman et juif par exemple.

Avez-vous vécu votre enfance dans la diversité ?

Oui j’ai grandi dans une famille modeste et entre européens et
musulmans. Les échanges étaient importants et enrichissants, dans la
cour d’école comme ailleurs. Nous vivions dans une maison où les
musulmans étaient majoritaires. Ce qui fait que mes trois sœurs parlent
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arabe couramment, et moi-même, malgré 4 années d’Arabe dialectal puis
classique, à un niveau moindre.

Tiaret était l’une des rares villes ou l’équipe de football, le Gallia (avant
que ne soit créé la JSMT) était composé à 50% d’européens et à 50% de
musulmans.
D’ailleurs même à la création de la JSMT, des européens ont rejoint
l’équipe musulmane ce qui était plutôt rare à cette époque en Algérie.
Je pense notamment à Chabal, Mico, Dié, Bouyko…
J’ai quitté Tiaret en 52 et l’Algérie en 56, mais je n’ai jamais rompu les
liens.

Vous êtes l’un des animateurs d’une association d’ancien
tiaretiens. Cette association est-elle active ?

Oui nous nous réunissons chaque année à 600 ou 700 entre « copains »
de Tiaret et notre culture commune est réelle et visible, tous nos mots et
nos proverbes arabes en sont la preuve.
Nous partageons tous un attachement à l’Algérie et une situation
commune.

D’ailleurs après toutes ces années, je ne peux pas dire que je me sente
intégré en France.
Culturellement je me sens différent d’un métropolitain. Pendant mon
service militaire en France en 1952, j’ai toujours dit « je suis Algérien ».
C’est à mon retour à Alger en 1953 que j’ai entendu pour la première fois
le terme de pied noir.


Pourquoi ne pas vous réunir à Tiaret ?

Nous nous réunissons souvent dans le sud de la France et en Espagne et
nous ne savons pas s’il y a les structures pour nous recevoir tous à Tiaret.
Par exemple, lorsque nous nous sommes réunit chez Isidore Partouche
que vous avez rencontré pour votre enquête, nous étions 1100.
Cependant des voyages organisés de 20-25 personnes ont été réalisés à
Tiaret, et les retours ont été très positifs.

Suivez-vous l’actualité algérienne ? Que pensez-vous de la
coopération économique franco-algérienne ?

Je lis la presse algérienne tous les jours. En terme économique, la France
a raté le train. L’Italie, la Chine ou l’Espagne ont saisi beaucoup plus
rapidement que la France le potentiel algérien.
Les français hésitent encore et perdent du temps, mais je sais que la
confiance va revenir.
Les entrepreneurs Tiaretiens comme Vieilledent et Ouahnich à Cannes et
Romelli à Istres ont réalisé de belles et nombreuses constructions.
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Leurs enfants ont choisi d’autres voies.
Avec leur proximité culturelle ils auraient certainement participé aux
grands travaux et projets des BTP en Algérie.

Et vous-mêmes, retournez-vous à Tiaret ?

Malheureusement non. Je vais souvent au Maroc pour retrouver l’air
méditerranéen, mais le retour à Tiaret reste une grande appréhension
pour moi, je n’ai pas vécu la guerre et les images de Tiaret 1952 restent
toujours présentes dans ma tête.
Cependant je suis toujours en contact avec les tiaretiens. Ces derniers
consultent d’ailleurs beaucoup le site que mon ami Fes Bouaziz a réalisé et
que j’alimente constamment en documents et photos (ndlr :
www.tiaret.biz) actuellement ce site propose 1800 photos de Tiaret et sa
région.
En ce moment je participe à la réalisation d’un DVD sur « Tiaret d’hier et
d’aujourd’hui. »
Les livres et le site mon permis de retrouver d’anciens amis Tiaretis et de
correspondre avec
de nouveaux et nombreux amis.


Propos recueillis par Mohamed-Chakib Skander pour Alta Network (février
2007)


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