Algérie

HAWA : un deuil, une blessure différente



HAWA : un deuil, une blessure différente
Dahbia est fille unique. Peut-on dire d'une grand'mère qu'elle est unique ' Quoi qu'il en soit elle l'est devenue à  la suite de la mort de son frère dans les maquis durant la guerre d'indépendance. Elle se rappelle bien comment les moudjahidine ont mis à  l'épreuve Ahmed son frère en 1956 : «ils lui avaient demandé vu son jeune âge, 16 ans, d'abattre un ennemi de l'indépendance et de rapporter son arme. Il le fit. En rapportant l'arme du harki il fut accepté dans les rangs de l'ALN». Depuis il n'est jamais revenu».Ce qu'elle n'arrive pas à  oublier c'est la recherche du corps de son frère par Fadhma sa mère une fois la fin de la guerre d'indépendance. «On a su qu'il n'était plus de ce monde le jour où les avions militaires français ont bombardé la forêt de Mizrana où se trouvait le contingent des maquisards dont faisait partie mon frère. Ce jour-là ma mère avait eu un pressentiment. Quand les avions ont survolé notre village dans la région des Ifflissens, j'avais alors 13 ans, elle me confia sa crainte de ne plus revoir Ahmed vivant. »Une grande partie des membres de la section a été tuée. Fadhma n'eut de cesse de penser à  ramener le corps de son fils pour l'inhumer au cimetière du village. Dès l'annonce du cessez-le feu en mars 1962, elle prit la résolution de se mettre à  la recherche des tombes des chouhadas dont faisait partie Ahmed. «Avec une amie elles partaient à  l'aube dans la zone où a eu lieu le bombardement aérien. Des jours durant elle questionna, chercha, erra dans la montagne et dans la forêt jusqu'à ce jour où elle découvrit la quinzaine de tombes des chouhadas. «Un des rares survivants nous a montrés l'emplacement où mon frère et ses compagnons ont trouvé la mort et enterrés à  la hâte».Fadhma, personnage charismatique, respecté par tout le village a pu sans passer par la voie légale donner une inhumation décente aux compagnons de lutte de son fils et à  Ahmed. «Quand les habitants de notre hameau sont tous partis pour habiter des maisons construites à  l'époque par l'APC, dans le cadre de la reconstruction des zones d'habitations détruites par l'armée française, ma mère est restée la seule au hameau jusqu'à la fin. Elle n'a pas versé une larme, ne s'est jamais plainte de son deuil. Sa blessure est restée intérieure et je reste encore marquée par ce courage dont elle a fait preuve jusqu'au stoïcisme. Elles étaient ainsi les vieilles montagnardes pétries dans l'ascétisme».


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)