Comme un boomerang, le dossier des harragas algériens
détenus en Tunisie revient au devant de l'actualité avec cette conférence de
presse organisée, hier, à Tunis par les familles de disparus. Un appel de
détresse qui intervient au moment de la visite officielle à Alger du chef de la
diplomatie, Mohamed Kefi. Ainsi, les familles de harragas algériens disparus ont demandé aux autorités
tunisiennes «la vérité» sur le sort de leurs fils, échoués sur les côtes
tunisiennes en 2008 en tentant de gagner l'Europe. Ils ont été portés disparus
depuis, alors que des indices indiquent qu'ils ont été emprisonnés du temps du
régime de Ben Ali, selon des informations recoupées par des ONG algériennes et
internationales.
Kamel Belabed, porte-parole du collectif des familles de harragas disparus en mer de la wilaya de Annaba, avait
indiqué en mars 2009 que des Algériens qui ont tenté la traversée vers l'Italie
sont emprisonnés en Tunisie. Dans un entretien à la presse nationale, il avait
souligné que ‘'en parlant de la
Tunisie, il convient de citer le cas de 68 harragas partis il y a deux mois. Nous savons qu'ils sont
en Tunisie, mais rien ne filtre. Nous avons eu la preuve formelle de leur
détention, mais, officiellement, les gens ne veulent pas en entendre parler. Auparavant,
nous avions des présomptions, mais aujourd'hui, nous avons des certitudes. Cela
dit, l'Etat est mieux placé que nous pour enquêter sur le sujet. Quand nous
avons demandé une enquête parlementaire, c'était pour inciter nos
parlementaires justement à intervenir auprès de nos voisins pour pouvoir
s'informer. Soutenues par l'association de lutte contre la torture en Tunisie, une
dizaine de familles essentiellement originaires d'Annaba se sont rendues lundi
à Tunis pour une conférence de presse.
«Nous réclamons aux autorités
tunisiennes l'ouverture d'une enquête sérieuse pour découvrir la vérité», a
déclaré Radhia Nasraoui, la
présidente de l'association de lutte contre la torture en Tunisie, qui défend
la cause de quarante-trois familles.
Le 8 octobre 2008, 39 jeunes
Algériens, trois Tunisiens et un Marocain partis d'Annaba pour tenter de gagner
clandestinement l'Italie se sont échoués sur les côtes tunisiennes près de
Tabarka, à environ 150 km
à l'est de leur point de départ. Témoignages accablants, à ce niveau des
parents de ces ‘'disparus''. «Mon fils m'a appelé et il m'a dit qu'ils avaient
été arrêtés par la garde maritime tunisienne», a affirmé Abdelnasser
Chemami, le père d'un des jeunes algériens, brandissant
comme les autres parents présents la photo de son enfant. Les familles des
naufragés ont assuré avoir ensuite été convoquées par les autorités tunisiennes
de l'époque, qui leur ont dans un premier temps promis que leurs enfants
seraient bientôt libérés. Mais ils n'ont ensuite jamais eu de nouvelles de
leurs proches. Moncef Choukri,
de l'association tunisienne contre la torture, estime que «ces jeunes ont sans
doute été arrêtés au nom de la lutte anti-terroriste» menée par l'ex-président
Ben Ali. Les ONG tunisiennes ont interpellé le nouveau ministre de l'Intérieur
Habib Essid, «dans l'espoir que les nouvelles
conditions après la
Révolution dans notre pays puissent aboutir à la vérité sur
cette affaire dramatique». Mais «le ministère nous a répondu n'avoir aucune
information», a déclaré Mokhtar Trifi,
président de la Ligue
tunisienne de défense des droits de l'homme. «Je ne suis pas au courant de
cette affaire», a déclaré le porte-parole du ministère de l'Intérieur Mohamed Hichem Moueddeb. Le nombre de 300
harragas qui croupiraient actuellement dans les
geôles de centres de rétention tunisiens a, à maintes reprises, été avancé par
des ONG internationales militant pour la défense des droits des migrants. Ces
ONG ont même fait état de l'existence de 11 camps d'enfermement secrets en
Tunisie dont la réalisation a été financée par l'Italie, en contrepartie de sa
coopération dans la lutte contre l'immigration clandestine. Une coopération
instituée par deux accords bilatéraux dont le premier remonte à 1998. Un dossier
de plus à mettre dans le panier des contentieux algéro-tunisiens
à régler au plus vite.
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 12/07/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Yazid Alilat
Source : www.lequotidien-oran.com