Algérie

Haro sur la liberté de la presse



La liberté de la presse a été conquise de haute lutte en Algérie. On ne compte plus les journalistes qui l?ont payée de leur vie ou de leur liberté. Pour les Algériens et les Algériennes de plus en plus nombreux à lire la presse indépendante, celle-ci constitue le seul véhicule d?accès à la connaissance vraie des réalités quotidiennes de leur pays ainsi qu?à la perception étrangère des évolutions et des transformations qui affectent notre société. Grâce au journalisme d?investigation, de plus en plus de scandales, de délits, d?abus de droit et d?autorité sont mis au jour. C?est par le travail opiniâtre d?investigation, mené en particulier par les journalistes d?El Watan, que la presse algérienne contribue, plus que tout autre profession, à consolider les minces acquis démocratiques de notre pays. Au moment où est ressentie fortement la nécessité d?un élargissement des espaces de liberté afin que nos journalistes puissent exercer leur mission, à l?abri des menaces et des pressions, d?où qu?elles viennent, on ne peut qu?être indigné par la condamnation qui vient de frapper le directeur d?El Watan Omar Belhouchet, et le chroniqueur Chawki Amari, deux éminents journalistes, doués d?un sens élevé de l?éthique et unanimement respectés en Algérie et à l?étranger. Aucun défenseur des libertés ne peut se résigner au rétrécissement des espaces de droit chèrement acquis par les représentants de la profession, a fortiori au moment où notre pays est engagé dans la voie de la libéralisation des champs médiatique et audiovisuel. Pour le surplus, chacun sait jusqu?à quel degré des hommes comme Omar Belhouchet et Chawki Amari n?ont eu de cesse de défendre l?Etat algérien, ses institutions et ses représentants, chaque fois que ceux-ci ont été injustement mis en cause aussi bien en Algérie qu?à l?extérieur de nos frontières. En toute circonstance, ils étaient en première ligne, à l?instar des autres journalistes d?El Watan, pour défendre nos institutions et leur crédibilité. Chaque Algérien doit leur en donner acte. Enfin, l?émoi qui saisit les hommes et les femmes de liberté devant la condamnation infligée à Omar Belhouchet et Chawki Amari participe d?un paradoxe saisissant. Alors que notre pays est censé montrer la voie aux autres Etats arabes dans le domaine de la liberté d?expression et alors que la censure officielle semblait rebrousser chemin, voilà que des magistrats viennent brutalement remettre en cause ce qui semblait être une évolution inexorable, c?est-à-dire une liberté de l?information totalement affranchie des servitudes et des contraintes du passé. Comme toute profession, celle de journaliste possède ses règles qui font notamment obligation aux journalistes de vérifier leurs sources et de s?interdire toute diffamation contre les personnes. Il ne semble pas qu?en l?espèce ces règles aient été transgressées, si peu que ce soit, par Omar Belhouchet et Chawki Amari. De façon indubitable, El Watan est connu pour respecter scrupuleusement les lois d?airain de la profession : exercice du droit de réponse, vérification et confirmation des sources, rectification des erreurs de fond, etc. L?audience considérable acquise par ce grand quotidien n?est pas un effet du hasard. C?est de s?être toujours confirmé à l?éthique journalistique la plus exigeante qu?El Watan doit aujourd?hui d?être autant lu en Algérie qu?à l?étranger. En tout état de cause, une peine de prison ferme à l?encontre de Omar Belhouchet et Chawki Amari constitue une injustice inadmissible et intolérable. Elle est une véritable régression de l?etat de droit qui doit pouvoir continuer à cheminer, en dépit de tous les obstacles placés sur sa route. Même si personne de sensé ne peut imaginer un instant que cette peine puisse être effective, tant la démesure a été atteinte, le fait qu?elle ait été prononcée justifie d?ores et déjà une refonte totale du code de l?information et l?abrogation des dispositions répressives à l?encontre des journalistes. L?auteur est : Professeur de droit, Avocat à la cour


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