L'Algérie qui
connaît le thermalisme depuis l'antiquité et qui par chance s'est dotée, dans
les années soixante dix, d'un maillage en structures thermales de standard
respectable, ne semble plus s'intéresser à ce patrimoine. Loin devant, nos
voisins ont su fructifier cette manne céleste avec beaucoup moins de moyens.
S'il est vrai que l'injure du temps est pour une grande part dans la
décrépitude du bâti et qu'il faille pour sa réhabilitation, inscrire de grosses
opérations financières, il n'en demeure pas moins que l'entretien quotidien
fait dramatiquement défaut. S'il n'est probablement pas, représentatif du
standard des autres établissements, le complexe de Hammam Righa
dans la wilaya de Ain Defla, est l'archétype d'une
gestion apparemment chaotique. On semble se complaire dans une situation de wait and see
mortifère. Il y de cela trois ou quatre ans déjà, on pensait que seuls les
bungalows étaient déglingués pour cause d'incivisme des curistes.
Malheureusement l'hôtel « Zaccar », fleuron de ce complexe, n'est pas mieux
loti. Dès la réception et en dépit de l'affabilité du personnel en tenue de
ville, on est saisi par la froideur des lieux. Le mobilier vieillot donne au
vestibule, un air ringard sans aspérités. Le parquet, fait pourtant de daleaux
de marbre aurait pu, avantageusement, être poli par une ponceuse mécanique. Les
luminaires en plastique rouge et chrome datant de la première mise en service,
délivrent une lumière blafarde de vieille garde provinciale. Les points
lumineux sont assurés par des ampoules de faible ampérage. L'enregistrement des
clients se fait encore sur un rustique registre à deux ou trois mains. Le
comble de l'inconséquence méprisante, est cette attente injustifiable de près
d'une heure, qu'ont subi un vieux couple et un jeune homme pour avoir leurs
chambres respectives. La raison qui semblait évidente pour les maîtres des
lieux, était le retard pris par un groupe organisé pour libérer les lieux. Le
chef de la réception motivait ce couac par le statut particulier du groupe et
dont l'entreprise employeuse est liée au complexe par convention. Ce qui
voulait dire en filigrane, que le particulier devrait, peut être, repasser.
L'unique ascenseur, étrangement bruyant, est conduit
pas un groom qui détient, seul, la clé. On monte, mais on dévale les six étages
dans la descente pour cause d'aphonie du téléphone de la réception. Pour
accéder aux chambres plongées dans la pénombre, il faut deviner où se trouve le
commutateur de la minuterie. Tout le monde sait, pourtant, que le marché
foisonne de gadgets électriques. On oublie que dans ce contexte, la majorité de
la clientèle est vieillissante et qu'elle a besoin, parfois, d'assistance. Les
prix qui d'ailleurs, n'ont rien à envier à ceux pratiqués dans les sites
hôteliers de bien meilleur standard, n'incitent pas à la joie. Leur
acquittement est exigé à la remise des clefs avec le séquestre de la pièce
d'identité.
Les chambres
spacieuses, aérées et ouvrant sur de larges balcons, gagneraient à être
débarrassées du bric à brac inutile: table de
décharge incrustée d'un vieux poste de radio muet, immenses abats-jour
de salon en guise de lampe de chevets, armoire éventrée, stores roulants
grippés. Le chauffage central, lointain souvenir du complexe, est suppléé par
des radiateurs à résistances électriques bouffeuses d'énergie. Les salles d'eau
qui sont certainement, les raisons sociale et économique du thermalisme sont la
plaie de l'établissement. Point d'eau courante : ni chaude, ni froide. Le tour
d'eau brulante est assuré par deux lâchers quotidiens
de quelques heures chacun. Les sanitaires, sans couvercle, ni chasse d'eau, dégagent
leurs relents fétides. Le remplissage des jerricans est laissé à la charge de
la clientèle. La restauration est certainement, la seule activité qui sauve
l'édifice du naufrage. Le petit déjeuner, peut encore être servi dans la
chambre si on se donne la peine, de braver l'escalier raide et sombre. Le soir
venu, c'est le cloître obligatoire : pas âme qui vive. Le chiche éclairage
extérieur n'incite pas à la flânerie pédestre. Les clameurs du week end se sont tues avec le
départ des visiteurs occasionnels. Qu'en est-il, en matière de loisirs, pour
les curistes au long cours qui y séjournent pendant trois longues semaines ?
Si jadis, le
complexe était dans la quiétude, il ne l'est plus maintenant. Les retombées des
émeutes de janvier 2011 et qui ont généré la déliquescence du marché, ont vite
investi ce supposé lieu de villégiature. Cerné de toutes parts, ses abords
deviennent pratiquement inaccessibles pour l'automobiliste. Les gargotes, à
l'hygiène douteuse, ont fleuri autour de cet établissement de cure. Peut-on,
honnêtement, s'enorgueillir de posséder des joyaux architecturaux dans un
environnement bidonvillisé par les barons de l'informel ?
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Posté Le : 12/01/2012
Posté par : sofiane
Ecrit par : Farouk Zahi
Source : www.lequotidien-oran.com