Algérie

Hamidouche M'hamed : «Le rôle principal de la Banque centrale est celui de maîtriser l'inflation»



Hamidouche M'hamed est expert financier international-Le gouverneur de la Banque d'Algérie, Mohamed Laksaci, a démenti, jeudi, lors d'un point de presse tenu à Alger, les informations selon lesquelles les placements de l'Algérie en devises étrangères ont subi une importante décote en 2009, du fait de la crise financière internationale. S'il est vrai que les placements en bons du Trésor américain sont sûrs et garantis par la FED, quel serait l'impact de la crise de la zone euro sur les placements en titres souverains européens '
Le marché obligataire de la zone Europe dépasse les 16 milliards de dollars et il est réparti entre le secteur financier avec 53%, puis le secteur public 38%, et le reste est partagé entre le secteur non financier et les administrations. De mon point de vue, c'est un marché qui dépasse largement les capacités de pas mal de pays. On peut citer le cas de l'Irlande et de la Grèce où les défauts de paiement étaient envisageables. Par contre, d'autres pays se trouvent dans des situations pareilles, mais ont bénéficié de la confiance des marchés, c'est-à-dire lancer des obligations à court terme pour rembourser celles qui arrivent à maturité tels que l'Italie, l'Espagne, le Portugal et la Belgique, tandis que d'autres pays juste à la limite tels que la France, le Royaume-Unis et l'Allemagne.
D'une façon générale, la situation évoluera en fonction de la croissance économique. La Commission européenne a estimé, par exemple, que la croissance du PIB pour la zone euro en 2012 atteindrait difficilement les 0,3%, contre 0,5% précédemment, alors que d'autres institutions et organismes envisagent le pire telles que Citi-Group qui envisage la récession, en prévoyant un ralentissement de 1,3% pour toute la zone euro. Ces perspectives rendront les conditions du marché plus difficiles (la tendance haussière du coupon : l'intérêt perçu par le détenteur de l'obligation) et ce qui compliquera une fois de plus la situation des placements en Europe, y compris les placements souverains. D'une façon particulière, les placements et le risque qu'ils encourent dépendront de la zone de placement et de la politique de rigueur envisagée, et je crois que le pays le moins risqué est celui qui réduit les dépenses au lieu d'augmenter les taxes.
-Serait-il vrai, d'après vous, que le transfert, par la banque centrale algérienne, des dépôts mis dans des banques commerciales vers des banques centrales sous forme de titres souverains, a été «motivé par des besoins de rendement» ' Les titres souverains sont-ils à l'abri de toute crise financière et économique '
En théorie, cela est vrai, lorsqu'on calcule les rendements et les risques en utilisant des modèles, par exemple le Modèle d'évaluation des actifs financiers (Medaf), on prend comme hypothèse que les dettes souveraines ne portent aucun risque.
Cependant, si on regarde l'histoire, on se rend compte que dans le passé, des placements de ce genre (exemple la disparition de la Russie tsarine), et en pratique même les AAA des agences de notation ne sont pas garantes, car aucun pays n'est à l'abri d'une crise, d'autant plus, certaines études avancent qu'à la fin de ce siècle, on assistera à la naissance de 4000 états, de ce fait, un placement qui dépasse sept ans devient risqué. Si on revient au rendement, les rendements (intérêts perçus) ont baissé en 2010 par rapport à 2009, car selon les chiffres communiqués, ces placements ont procuré pour la Banque d'Algérie 4,74 contre 4,6 milliards de dollars respectivement en 2009 et 2010, soit un rendement autour de 3,16 et de 3,09%.
-Le débat au sujet des placements de l'Algérie avec le gouverneur de la Banque d'Algérie relance à nouveau la polémique sur la transparence de ces investissements financiers du pays, puisque le gouverneur de la Banque d'Algérie a refusé, une fois de plus, de détailler les placements en différentes monnaies étrangères. Est-ce un défaut de transparence ' Autrement, quelle est votre lecture à ce sujet '
Pour les détails des placements, ceux-ci peuvent être déduits selon les informations relatives aux taux d'intérêt médian suivants : les T-bills ne dépassant pas un an et les TIPS indexés sur le taux d'inflation ne concernent pas notre cas de figure, car ce sont des placements de moins d'un an, pour les T-notes, entre 1 et 10 ans, alors que les taux d'intérêt oscillent entre 0,23%, 0,90% et 2,01% lorsque leur maturité est respectivement de 2 ans, 5 ans et 10 ans.
Pour les T-bonds (placement supérieur à 10 ans), le taux est autour de 3,09 %. Avec ces informations, je crois qu'on peut avoir une idée sur nos placements. Dans le cas de la zone euro, c'est-à-dire l'autre moitié des placements de l'Algérie, je vous donne à titre indicatif les taux d'intérêt des obligations du Trésor français 2,21% sur sept ans, 2,77% sur 10 ans et 3,34% sur 20 ans, alors que les obligations de l'Allemagne sur 10 ans procurent un intérêt de 1,68%. Je crois qu'on rentre dans une logique du couple rendement et de risque qui n'est pas une des prérogatives de la Banque d'Algérie ni d'aucune Banque centrale au monde. Et de mon point de vue, ni la loi sur la monnaie et le crédit 90-10 du 14 avril de 1990 ni les ordonnances qui ont modifié cette loi, à savoir la n° 01-01 du 27 février 2001 et la n°11-03 du 26 août 2003 n'ont permis à la Banque d'Algérie de faire des placements qui restent le rôle des opérateurs intervenant dans le marché interbancaire. Par contre, la Banque centrale a pour rôle principal de maîtriser l'inflation à travers la régulation du marché interbancaire et monétaire.
Au lieu de s'intéresser au rendement, il était préférable de consolider le bilan de la banque d'Algérie par l'acquisition de l'or, une opération qu'a réalisée l'Arabie Saoudite lorsque le FMI a vendu une partie de ces réserves.
Certes, beaucoup de voix diront que la FED est intervenue en 2008 pour l'achat des dérivés financiers, récemment la Banque centrale européenne a acquis des obligations de la Grèce, mais ces types d'intervention sont justifiés, car l'objectif était celui d'éviter des crises systémiques.


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