L’école des surdoués
Le Président de la République a honoré les meilleurs lauréats au bac. Ils étaient plus d’une centaine à recevoir leurs cadeaux dans une ambiance à mi-chemin entre le lycée et l’université. La traditionnelle cérémonie a réuni le gratin du pays ainsi que celui des lycéens qui ont marqué leur sortie du secondaire par un baroud d’honneur particulier: une mention qui n’est pas à la portée de tous. Ils étaient trois à avoir obtenu la mention excellence. Bouteflika leur a rendu l’hommage qu’ils méritaient en leur remettant en personne un présent, symbolique certes, mais chargé d’émotion. Un instant qui marquera la vie de ces jeunes qui en feront un motif de fierté et qui les incitera à redoubler d’efforts pour prouver que la distinction n’a pas le fruit d’un hasard. Ils ont été des milliers à obtenir cette mention magique qui leur permettra de suivre les études dont ils ont rêvé depuis leur enfance. Tous les «mentionnés» n’ont pas été invités mais les absents étaient présents de cœur dans cet espace qui est ou pourrait être l’antichambre de destins nationaux ou universels. En dépit de la présence de 126 supers lauréats, l’assistance n’avait d’yeux que pour cet heureux élu qui a décroché le précieux sésame avec un «vulgaire» 10,40 de moyenne et qui s’est permis de focaliser sur lui les feux de la rampe. Le fait est qu’il ne s’agit pas d’un lauréat ordinaire. Un pied dans l’enfance, l’autre dans l’adolescence, le prodige a obtenu son bac en candidat libre à l’âge de ... 13 ans. Si la performance mérite d’être soulignée -ses camarades de classe rêvent d’obtenir l’année prochaine le BEM- la première question qui vient à l’esprit est de savoir si l’Algérie a les moyens de prendre en charge des surdoués de ce genre. Obtenir le bac en candidat libre au moment où d’autres rêvent de passer en classe supérieure dans un collège est une performance digne de figurer dans le Guinness si toutefois ce genre de livre existe chez nous. Des performances, il y a en à la pelle en Algérie. Des ministres qui battent des records absolus de longévité, des illettrés qui atteignent des sommets insoupçonnés, des campagnards qui débarquent à 14 ans en ville et qui se retrouvent à la tête de fortunes qui dépassent bien des budgets communaux en quelques années seulement, et des professeurs émérites qui se surprennent à envier un marchand de karantika. Dieu fasse que ce jeune Constantinois ait la chance d’avoir des parents aisés qui pourront lui tracer une voie dans un monde où le génie peut se transformer en placement qui produira plus tard une valeur ajoutée. Si le Président a fait le premier pas en honorant ce lauréat exceptionnel, les fabricants de légendes sauront-ils prendre la relève?
Belloumi, Morcelli, Boulmerka, et d’autres champions auxquels Moussa avait ouvert le chemin de la postérité, ont été ignorés. Qui se soucie de savoir qu’en 1984 un Algérien a dû arracher une médaille olympique pour obtenir un F quelque chose? L’hymne national ne retentit plus depuis bien longtemps dans les giga événements planétaires parce que des incompétents n’ont pas admis de voir d’autres noms que les leurs fassent la une des médias mondiaux. Kassamen ne retentira pas pour ce jeune prodige de Constantine parce qu’il n’y a rien à partager. Si on imagine mal un enfant-adolescent bénéficier d’une bourse d’études à l’étranger, le fait est qu’il existe ailleurs des établissements qui s’occupent de ce genre de «malades». Car il faut être malade pour obtenir son bac à 13 ans dans un pays où des locataires de cette tranche d’âge sont exclus de l’école depuis longtemps. En attendant, notre prodige peut se consoler en préparant sereinement le BEM qu’il est censé passer l’année prochaine.
Miloud Horr
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Posté Le : 23/07/2008
Posté par : sofiane
Source : www.voix-oranie.com