Selon une dépêche Reuters, plusieurs capitales du monde musulman seraient sur le point d'interdire les jets d'eau. La décision ne serait pas liée à une quelconque contribution au Sommet de Copenhague, mais à une réaction à l'interdiction des minarets dans la très neutre Helvétie. Il s'agit d'une blague, vous l'avez compris, car il se trouve que l'architecture musulmane a plus fait pour la science des jets d'eau que l'énorme jaillissement qui orne le Lac Léman, symbole éventuel des liquidités qui se déversent dans les banques suisses.Je n'ai jamais visité ce pays. A vrai dire, il n'entrait pas dans mes fantasmes. La liste de mes frustrations géographiques est déjà assez pleine de contrées plus expressives. Mais je pense que, même en fin de liste, je le barrerai désormais. J'avais pourtant de la sympathie pour cette petite nation. Enfant, j'ai été fasciné par Guillaume Tell, valeureux bonhomme, capable de planter une flèche dans une pomme juchée sur la tête de son fils. Adolescent, j'ai eu comme première correspondante une Suisse alémanique, Pia, avec laquelle j'ai refait le monde par la Poste. Adulte, j'ai découvert quelques-uns de ses artistes et intellectuels, dont le respectable Charles-Henri Favreau, grand journaliste, intermédiaire informel des accords d'Evian et fondateur du Musée européen de la photographie, venu à Alger, alors sous couvre-feu, quand peu d'étrangers nous rendaient visite.Mais là, comment ne pas être atterré par ce référendum minable, sournois, ségrégationniste et de plus inculte, c'est le cas de le dire. Car qu'est-ce qu'un minaret ' Le mot français vient de l'arabe « manara » qui désignait à l'origine une tour de garde équipée ou non d'un feu de signal, ce qui explique qu'en arabe, le mot désigne encore les phares. Un siècle environ après l'avènement de l'Islam, cet élément d'architecture a pris, dans le corps des mosquées, une fonction pratique d'appel aux prières mais également d'appels profanes, en cas d'urgence notamment. Rien dans les préceptes de l'Islam (le Coran, les hadiths, les exégèses) ne définit le minaret dans sa construction, sa dimension, son style... Seuls les appels à la prière ont été édictés.La meilleure preuve en est que, dans le monde musulman, on trouve toutes formes et styles de minarets adaptés aux architectures nationales ou locales. Cylindriques, effilés et en pointe en Turquie et dans les mosquées d'influence ottomane ; à base carrée surmontés d'un cube réduit à dôme, et même à tuiles romaines, au Maghreb ; à encorbellements au temps des Mamelouks ; d'inspiration moghole en Inde avec fioritures ; avec des allures de pagode dans l'Islam de l'extrême Asie ; en pisé, hérissés de montants de bois dans le Sahel africain, ce qui inspira l'architecte Bouchama pour la mosquée d'Hydra, à Alger, etc. Dès lors, qui empêchaient les Suisses de concevoir des minarets conformes à leur architecture - style chalet savoyard, si ça leur chante -, au lieu de « trivialiser » leur Constitution d'un pareil détail ' Mais il est clair que les minarets n'étaient que prétexte. Guillaume Tell est de retour, mais la flèche est dans l''il de son fils !
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Posté Le : 12/12/2009
Posté par : sofiane
Ecrit par : Ameziane Ferhani
Source : www.elwatan.com