L'arrivée du mois de ramadhan au cÅ“ur du
mois d'août présentait le défi commercial pour la destination Tunisie de
préserver une partie de sa très forte clientèle algérienne. Pari manqué.
La filière a choisi de garder ses tarifs
de haute saison… et l'offre d'un s'hour en résidence hôtelière pour les
jeûneurs, n'a pas pesé face aux lourdes habitudes coconnières du mois sacré.
Il faudra réagir car le manque à gagner
est criard.
Les visiteurs jouent aux fantômes sur le
bateau balançoire immobile de Carthage Parc. Absents. Et les éléphants
d'Hannibal sont tristement seuls sur l'esplanade de l'entrée. Le vendredi 13
août, 22 h 30 mn, est pourtant un pic de saison pour le parc d'attractions le
plus huppé de Tunisie, collé à la «Medina» de Yasmine Hammamet. Certes l'entrée
à 15 dinars tunisiens (environ 1050 dinars algériens) donnent à réfléchir aux
familles nombreuses. Mais là n'est pas la raison du courant d'air qui circule
sur les terrasses de café, du coup, à peine éclairées dans l'enceinte du parc.
La saison estivale dans le balnéaire tunisien, trépidante jusque-là, a effectué
un atterrissage d'urgence depuis début août. L'arrivée du ramadhan, le 11 août,
a accéléré le départ de dizaines de milliers d'Algériens, de l'arc Hammamet
sud- Nabeul. Les ménages tunisiens de plus en plus nombreux ces dernières
années à profiter des formules de séjour en hôtel, parfois dans le sillage d'un
parent émigré, ont eux aussi quitté les lieux. A Yasmine Hammamet le taux d'occupation
de l'Hôtel Safa, trois étoiles, proche de faire tourner ses 290 chambres du 15
au 31 juillet, s'est divisé par plus de trois à la mi-août. Sa filière de
l'Europe de l'Est, Russes et Polonais en tête, sauve la mise. Ailleurs, à
Yasmine Hammamet, les estivants italiens, espagnols ou français maintiennent
l'activité des commerces. Une moyenne surface a inventé une promotion originale
durant l'été, «25% moins cher pour tout article acheté entre 14h et 16h», le
creux abyssal de la journée ordinaire. Sans «les populations» algériennes et
tunisiennes, la journée entière durant le ramadan, ressemble tout d'un coup à
un 14h-16h.
L'industrie hôtelière a choisi la
continuité
Il n'y a finalement pas eu de promotion à destination des
touristes algériens pour les amener à acheter des séjours en Tunisie durant le
Ramadhan. A Alger, le patron d'une agence de voyages de Didouche Mourad
attendait encore à une semaine du début du ramadhan, que son commercial,
dépêché en Tunisie, lui envoie des tarifs aménagés pour la saison du jeûne pour
la clientèle algérienne. En vain. «Le Sol Azur, 04 étoiles à Hammamet sera à
6400 dinars algériens par tête et par nuit en occupation double et en
demi-pension. Comme prévu depuis le début de l'année». L'industrie du tourisme
tunisienne a choisi de maintenir les tarifs de haute saison pour l'ensemble de
ses clientèles. Un choix marketing que tente d'expliquer, Raouf, un hôtelier
sur place. «Des tarifs cassés pour les Algériens en août à cause du ramadhan
auraient fait reporter à des clients de juillet leur séjour vers août, sans
compter que nous aurions pu avoir des émigrés algériens et tunisiens qui
d'habitude passent par leur agences européennes, utiliser le canal des agences
algériennes. Et puis, il n'est pas certain que d'afficher en août des tarifs de
moyenne saison suffise à décider des familles algériennes à passer le ramadhan
loin de chez elles». Les hôteliers tunisiens ont choisi une autre démarche.
Rendre, en comptant sur eux pour qu'ils le répètent, le ramadhan agréable à
ceux, parmi leurs clients musulmans, qui ont choisi de poursuivre leurs
vacances chez eux : au restaurant du Safa, la chorba et le brik tunisien sont
venus agrémenter un menu subitement devenu moins fade, dès le début du mois
sacré. Les pensionnaires qui le souhaitent peuvent être réveillé pour le S'hour
à trois heures trente du matin… voire prendre des provisions de la table du
restaurant pour la soirée. Pour le reste, tout fonctionne à l'identique pour
les touristes européens : heures des repas, consommation servie à la plage et à
la piscine, alcool… L'industrie du balnéaire tunisien est restée à l'heure de
l'international. Choix conservatoire : c'est la première fois que le ramadhan
empiète le cÅ“ur de la saison estivale depuis que la Tunisie est devenue une
destination de séjour pour de centaines de milliers d'Algériens. Et le manque à
gagner est spectaculaire.
La bulle du balnéaire va-t-elle se
dégonfler ?
Il faudra bien trouver la parade. Ahmed,
un vendeur d'artisanat dans la Médina de Hammamet est sceptique : «la saison
était mauvaise avant même le ramadhan. Les Européens aussi ont manqué cette
année. Je ne sais pas pourquoi». Les effets du chômage sans doute, les
incertitudes sur l'avenir. Les loueurs de maisons à Hammamet et Nabeul, aussi
se plaignent. Le séjour en location a connu une dépression encore plus forte
que celle des hôtels. Moncef, agent immobilier dans la ville balnéaire du Kram
dans la banlieue nord de Tunis s'attend à des étés difficiles : «cela marchait
un peu moins depuis quelque temps, le ramadhan va aggraver la situation». La
bulle du balnéaire survivra-t-elle aux quatre à cinq années où le ramadhan
étouffera la consommation estivale ? A Yasmine Hammamet, des restaurants et des
prestataires de services ont arrêté leur saison avec le début du jeune. Le très
officiel journal La Presse reconnaît «une préoccupante absence de public dans
les festivals d'été». Le lancement de festivals s'était emballé ces dernières
années accompagnant la forte croissance des visites touristiques dans le pays.
La tendance est déjà au tri, le festival de Jazz de Tabarka, en difficulté,
s'est ouvert aux musiques du monde pour ne pas disparaître. La parade aux étés
tronquées qui ont commencé, c'est finalement, le musée Bardo qui l'a peut- être
trouvé. Il a mis la moitié de ses salles en réfection pour le ravalement des
mosaïques. En attendant des étés meilleurs.
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Posté Le : 31/08/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Samy Injar
Source : www.lequotidien-oran.com