Algérie

Grève nationale dans la fonction publique



« Le gouvernement nous répond par le matraquage » Tout en condamnant le recours à la violence, les syndicats autonomes ont tenu à rappeler que le mépris affiché par les pouvoirs publics à l?égard des fonctionnaires ne va pas ébranler leur mobilisation. Aujourd?hui, plus que jamais les libertés syndicales en Algérie sont en danger et le droit de grève, selon les initiateurs du mouvement de débrayage de trois jours, est remis sérieusement en cause. La preuve palpable de cet état de fait a été vérifiée hier sur le terrain à travers l?ordre donné par les pouvoirs publics de matraquer les manifestants. En effet, des éducateurs, des pédagogues, de simples fonctionnaires ont été hier humiliés, violentés, tabassés par les forces de l?ordre. Ces dizaines de personnes, venues de divers horizons et de plusieurs régions du pays pour exprimer leur désarroi devant le mutisme et l?indifférence du gouvernement et pour rendre visibles leur mécontentement et leur précarité, ont été dispersées de manière musclée. « Nos collègues ont été interpellés par les policiers et emmenés de force au commissariat. Ils ont été traités comme de vulgaires délinquants. Leur crime est d?avoir revendiqué leur droit. Le droit à une vie décente et le droit à l?expression », s?est indigné hier M. Lemdani, membre de l?intersyndicale de la Fonction publique. Abondant dans le même sens, M. Merabet, porte-parole de la Coordination nationale des syndicats autonomes de la Fonction publique, a qualifié, lors d?un point de presse, d?« acte ignoble l?agression des fonctionnaires ». Tout en « condamnant le recours à la violence dans un pays qui se dit respectueux des valeurs démocratiques », M. Merabet a rappelé que « le mépris affiché par les pouvoirs publics à l?égard des fonctionnaires algériens ne risque pas d?ébranler d?un iota leur mobilisation parce qu?ils sont déterminés à aller jusqu?au bout ». « Dimanche, on s?est rendus au Palais du gouvernement dans l?espoir d?être reçus par M. Belkhadem qui ne cesse de marteler que les portes du dialogue sont ouvertes, en vain. Hier, un autre groupe a voulu se rassembler devant cette même institution pour réclamer un droit de regard. Il a été malheureusement accueilli par des insultes et la matraque. Ceci est très grave », a déploré M. Merabet qui estime que le gouvernement s?est inscrit dans la logique du mépris et de la répression. Revenons au mouvement de grève de trois jours déclenché par les deux structures syndicales. Celui-ci est qualifié par ses animateurs de « satisfaisant ». Il a été suivi à hauteur de 85% à tous les niveaux et ce en dépit d?une large campagne de déstabilisation, d?intimidation et de menaces menée par le pouvoir en place pour décourager et démobiliser les fonctionnaires. Aujourd?hui, les syndicats autonomes ont tracé leur plan d?action. Ils comptent faire leur autocritique pour corriger leur insuffisance et mieux préparer la riposte. L?enjeu pour eux est de mettre en place les mécanismes pour asseoir cette dynamique syndicale. « Le pouvoir veut nous réduire au statut de mineur et de syndicat sectoriel, mais en ce qui nous concerne, nous allons nous battre pour consolider notre unification et pour concrétiser le pluralisme syndical en Algérie », a soutenu le docteur Yousfi. En ajoutant : « Notre combat est jeune et permanent. Nous allons vers la création d?un syndicat fort ou bien d?une confédération.Toutefois, aujourd?hui, nous devons pallier une situation d?urgence. Actuellement, nous estimons que les libertés syndicales et le droit de grève sont bafoués, il faut donc se battre et mettre en ?uvre une stratégie pour arracher ces acquis », a tonné M. Mériane. De l?avis de M. Lemdani de l?intersyndicale, la bataille doit être menée aussi bien pour revendiquer une grille de salaire conséquente que le droit à la grève. Notre interlocuteur juge inquiétant le silence du gouvernement. « Nous avons paralysé durant trois jours plusieurs secteurs sensibles et le gouvernement n?a pas réagi dans le bon sens. M. Belkhadem prêche le dialogue et nous accuse d?être des aventuriers, mais lorsqu?on s?est présentés de manière pacifique chez lui pour justement discuter, il nous a réservé un accueil des plus ??chaleureux??. Y a-t-il un pays où ses hauts responsables ordonnent de passer à tabac ses éducateurs ? », s?est interrogé M. Lemdani qui est persuadé qu?il y a un recul des libertés syndicales et que le gouvernement doit remédier à cela. Dans ce même contexte, docteur Merabet schématise cette situation en rappelant que le ministre de tutelle les a reçus deux fois pour exposer leurs préoccupations et en parallèle il les a traînés cinq fois devant les tribunaux pour avoir exposé leurs revendications à travers un droit garanti par la Constitution, à savoir la grève. « Nous n?avons pas besoin d?être redressés, mais plutôt d?être concertés », s?est exclamé le porte-parole du syndicat des psychologues. Par ailleurs, face au comportement du gouvernement qui ne fait qu?envenimer la situation, les vingt syndicats ont décidé de radicaliser leurs actions. « Certains veulent carrément une manifestation dans la rue afin de mettre nos responsables devant leurs responsabilités, d?autres ont proposé un mouvement de protestation d?une semaine. Nous allons tous consulter nos bases et nous déciderons de la démarche à suivre. Une chose est sûre, nous n?allons pas faire marche arrière », avertissent les membres de la coordination et de l?intersyndicale.


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