Algérie

Grève des médecins résidents: La santé attend toujours d'être décrétée



Quarante-huit heures après l'installation de la commission intersectorielle et à la veille de sa première réunion, les médecins résidents ont envahi l'hôpital Mustapha pour scander encore plus fort leurs revendications. Ils étaient près de 1500 représentants de plusieurs wilayas qui se sont donné hier le mot pour submerger l'hôpital Mustapha et enfoncer davantage le piquet de grève. Le sit-in d'hier, ils l'ont voulu probablement pour forcer la main aux responsables et les obliger à lâcher du lest en réglant leurs doléances. Pour paraître plus forts, les rangs des médecins résidents se sont même élargis, hier, aux dentistes et aux pharmaciens qui se sont mis eux aussi en mode « grève ». Le discours de dimanche dernier de Mokhtar Hasbellaoui n'a donc pas fait tilt dans les esprits des grévistes qui refusent de décolérer. Ils étaient venus hier très tôt à Mustapha, se sont organisés en « carrés - wilayas » pour montrer qu'ils sont nombreux et tenaces. Pour changer un peu, ils entrecoupaient leur sit-in en plein milieu de Mustapha par des marches autour des services tout en scandant divers slogans. Ils ne pouvaient prétendre à une virée hors hôpital parce que le dispositif sécuritaire qui a été déployé pour la circonstance était tellement lourd en hommes et en matraques (brigades antiémeutes) qu'il rappelait le temps des tragiques années du terrorisme. Un nombre impressionnant de casques bleus, tenues et équipements bien solides, s'étaient mis en faction devant les entrées de l'hôpital ainsi qu'à travers toutes les ruelles adjacentes, avenue Hassiba Benbouali comprise. C'est dire que les pouvoirs publics n'ont pas lésiné sur les moyens de répression pour maîtriser un mouvement de contestation qui pouvait ne pas avoir d'envergure si les responsables du secteur de la santé n'avaient pas traîné en longueur avant de daigner lui accorder une oreille d'écoute.C'est bien après de longues semaines que le ministre de la Santé et de la Réforme hospitalière a décidé d'installer la commission intersectorielle qu'il a chargée de plancher sur les revendications des grévistes. C'est aujourd'hui qu'elle tient sa première réunion. Après s'être défoulés en sautillant au rythme de slogans bien connus, les contestataires s'étaient donné le mot pour passer la nuit à l'intérieur de l'hôpital Mustapha et rester ainsi mobilisés en gardant intacte la ferveur du mouvement. Ils veulent maintenir la pression sur la tutelle et ce, jusqu'à ce qu'ils aient pris connaissance des résultats auxquels la commission aurait abouti à l'issue de sa réunion d'aujourd'hui.
L'on se demande si d'ici au soir, les grévistes n'auraient pas subi la foudre des forces de l'ordre qui, dit-on, ont été instruits de passer à tabac tout récalcitrant ou perturbateur d'entre deux. Une telle consigne leur aurait été donnée au cas où les protestataires auraient essayé de les braver et tenter encore une fois l'aventure de la marche dans la rue.
Depuis plus de deux mois, les établissements hospitaliers du pays, déjà très mal lotis en tous points de vue, peinent à réunir des équipes complètes pour opérer les malades, les passer en consultation ou même accepter de faire prendre en charge leurs analyses par les laboratoires des hôpitaux. C'est à peine si les gardes des médecins résidents sont assurées et encore pas tous les établissements. Le service minimum imposé par la loi en cas de grève, est perçu selon les humeurs et les états d'âme des uns et des autres corps du secteur. Caractériel, suffisant, arrogant pour ne pas déroger à une certaine attitude politique en vogue, le ministre de la Santé aura toutes les peines du monde pour apprendre à ses disciples de garder les pieds sur terre et faire de l'effort de travail - particulièrement dans la santé - un devoir et non une complaisance. Mokhtar Hasbellaoui est bien placé pour savoir que les citoyens se font rabrouer quotidiennement dans des services d'hôpitaux qui excellent dans la forte tête à l'éthique et au serment de la profession. Ceux des responsables qui ont fait actionner la matraque pour brimer les grévistes, à défaut de savoir régler des problèmes, en ont créé d'autres qui sont venus se greffer sur ceux bien nombreux et complexes qui rongent le secteur de la santé dans tous ses travers. Profondément malade, la santé attend toujours d'être décrétée.


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