C'est ce que les passionnés lecteurs et amis de Mohamed Arkoun ont appris, avec beaucoup de chagrin, jeudi, lors d'une cérémonie d'adieu en hommage à l'intellectuel organisée à la Maison médicale Jeanne-Garnier, dans le XVe arrondissement de Paris. C'est donc avec de la stupeur que les présents à cette cérémonie apprendront que l'Algérie ne verra plus, ne serait-ce qu'une dernière fois, son penseur virtuose ! Cette cérémonie qui a drainé à peine une centaine de personnes n'a été couverte par aucun média mis à part le site d'information Saphir.news ! La présence algérienne ne s'est distinguée que par la venue du directeur du Centre Culturel Algérien, Yasmina Khadra, et un représentant de l'ambassade d'Algérie ! Oui, un simple représentant pour dire au revoir à un penseur qui a marqué son siècle par sa pensée profonde et sa réflexion révolutionnaire sur l'islamologie.
Pour sa part, l'ambassadeur du Qatar, Mohamed Jaham Al Kuwari, un diplomate qui a été visiblement beaucoup plus touché par le décès de notre figure intellectuelle que nos propres représentants, n'a pas hésité à se déplacer pour assister à cette cérémonie afin de dire que Mohamed Arkoun «manquera au monde arabe et au monde occidental».
«Le Professeur jouait un rôle très important dans le rapprochement des civilisations et dans le dialogue interreligieux. On perd vraiment un symbole dont nous avions besoin dans les moments difficiles que traverse le monde arabe. Une voix de l'islam qui combattait l'extrémisme aussi bien musulman qu'occidental», a-t-il confié, nous apprend le site Saphir.news. Â
Le Maroc, lui-aussi, a été représenté lors de cette cérémonie par plusieurs consuls et vice-consuls qui ont tenu tous à partager la peine de la famille de Mohamed Arkoun. Une peine qui, apparemment, n'a pas réellement ému nos autorités. La présence symbolique de l'Algérie pendant cette cérémonie n'a fait donc que nourrir encore davantage les polémiques concernant les relations houleuses qu'entretenait le défunt Arkoun avec les autorités de son pays. D'ailleurs, à ce sujet, Ghaleb Bencheikh, le penseur musulman et animateur de l'émission «Islam» sur France 2, n'a pas hésité à crever l'abcès en déclarant que Mohamed Arkoun en homme libre, «avait des critiques acerbes contre les régimes successifs».
Des critiques et des positions courageuses que Mohamed Arkoun paiera encore jusqu'à la fin de ces jours. Nos autorités, qui auraient pu au moins faire semblant de mettre de côté leurs rancunes et accomplir leur devoir en réhabilitant, à titre posthume, cet éminent penseur, ont persisté à ignorer cet enfant terrible de l'intelligentsia algérienne. Cette deuxième mort de Mohamed Arkoun ne manquera pas d'affliger sa famille et ses amis. Mais là où le bât blesse, c'est ce dernier hommage qui sera rendu à notre penseur au Maroc et non pas dans notre pays ! «Les Algériens voudraient qu'il soit enterré en Algérie. Mais c'est sa volonté et celle de sa femme d'être enterré à Casablanca. Mais là où il va, il est chez lui en tout cas. Je sais que son pays, la Kabylie, l'a toujours acclamé, donc peut-être que c'est une double perte pour eux car ils auraient tant voulu qu'il soit parmi eux»,a déclaré, les larmes aux yeux, le neveu de Mohamed Arkoun.
Saphir.com nous apprend aussi que les pompes funèbres musulmanes IFO El Amen se chargeront de rapatrier le corps du défunt à Casablanca pour célébrer la prière funéraire à la Grande Mosquée Hassan-II. «La compagnie aérienne Royal Air Maroc aurait même émis le souhait de participer aux obsèques en offrant la gratuité du transport», indique encore le site français en citant une source proche de la famille. «Cela s'expliquerait par le fait que le PDG de la compagnie aurait été un élève de Mohammed Arkoun», précise-t-il également.
Face à cette double perte, des intellectuels et des associations algériennes ont décidé de se mobiliser pour appeler à l'organisation de cérémonies d'hommages à Mohamed Arkoun en Algérie. Kiared Karim, responsable de l'association Ouledna, une association cutlurelle, vient de lancer, avec de nombreuses autres personnalités, une pétition sur le Web pour appuyer cette revendication. «Nous demandons également à ce que toutes ces œuvres soient traduites en arabe et distribuées dans toutes les bibliothèques algériennes», explique encore Kiared Karim. Selon notre interlocuteur, un large mouvement de solidarité s'est créé autour de cette pétition et de plus en plus de signatures affluent sur internet.
Il est à souligner que cette initiative bénéficie amplement du soutien de la famille du regretté Mohamed Arkoun. Cette dernière ne demande en réalité qu'une chose : la reconnaissance de l'Algérie à cet inlassable et grandiose intellectuel qui fut, de son vivant, son meilleur ambassadeur dans le monde. Est-ce trop demander ' Â
  Â
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 18/09/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Abderrahmane Semmar
Source : www.elwatan.com