Algérie

Grandes espérances et désillusions Lu pour vous- « Les miroirs aux alouettes » de Badr' Eddine El Mili


Grandes espérances et désillusions                                    Lu pour vous- « Les miroirs aux alouettes » de Badr' Eddine El Mili
Stopha, au lendemain de l'indépendance. Des lendemains qui chantent sont l'espérance de ce jeune constantinois qui s'éloigne de sa ville natale pour s'en aller dans le nouveau monde qu'est Alger. Loin Dar Errih, la maison familiale, éloignés sont les copains et les proches, la cité altière lui ouvre les bras. Pour ne pas rester longtemps « l'étranger » « ivre d'horizons vierges », se lance à la découverte de celle qui le fascine, dont il fera sienne, Alger post- coloniale. Il chaussera ses bottes de sept lieux. De révélation en révélation, Stopha va à la rencontre de ce gisement de nouveaux quartiers avec leurs bâtiments cossus ou non, les rues et artères et les grandes espérances que lui offre à lui ainsi qu'aux jeunes de sa génération cette Algérie nouvelle, libre et affranchie du colonialisme. Tout est fait pour le réjouir notre Stopha, son logis dans le voisinage de la rue Tanger, ses nouveaux copains étudiants, la faculté d'Alger, l'engagement socialiste estudiantin. Tout jusqu'au Grand frère, premier dirigeant du pays indépendant enchante Stopha. Enchanter seulement ' Que non ! C'est de l'admiration ! Alger ne sera pas Alger si le héros n'ira pas s'attabler à « la terrasse de l'Otomatic et de la Cafeteria en souvenir de la Bataille d'Alger ».Tout devient pour le jeune homme une passion constructive « pour une large relance populaire » à l'image de la Chine. Ambitions et chantiers socialistes, rêves internationalistes, des années fastes attendent l'Algérie. N'est-ce pas la réalité ' Il se réfère aux grands hommes historiques Le Che , Castro , Mao, Tito Et Chou En Lai, ces dirigeants qui ont été aux côtés de la Révolution algérienne.Ô Les vertes années de l'indépendance ! Toutefois , si le c'ur du centre-ville battait au rythme des attraits de la reconstruction du pays par le biais de ces étudiants et étudiantes engagés et tournés vers une politique progressiste, Bachdjerah , le quartier populeux , lui regardait vers El Harrach et sa débrouille pour vivre. Alger c'est « le tremplin des goldens boys du socialisme, conseillers du Frère militant ». Ce dernier a été décoré de l'Ordre de Lénine après son voyage à Moscou. Toujours ces sorties sur le terrain pour aller dans les campagnes vers les paysans, apporter leur débordement d'espoir : une Algérie nouvelle. La galaxie rêvée. Voilà la deuxième fracture politique qui arrive : Le Frère militant est remplacé par le deuxième Frère militant. Changement de logis pour Stopha, il tourne le dos à la Rue du Coq pour aller crécher à Hussein Dey. La chronologie des évènements, les grandes dates ayant jalonné l'histoire de 1962, jusqu'au milieu des années 90 sont là dans ce roman autobiographique. Bard' Eddine Mili les rapporte avec ce sentiment de tristesse et de désenchantement toutes les dates et les grands événements de la vie politique et sociale. La mort du deuxième Grand Frère, les autres hommes ayant géré le destin algérien, une nouvelle ère, celle de la violence habillée du verbe sacré s'ouvre « Aouinet el foul et la Médina frondeuse se réveillèrent soudainement barbues, revêtues de l'habit de la sanction...dans le dos de la république les grands turbans aiguisaient les coutelas du grand soir... ». La désillusion ou la tristesse ' Les deux. Mais il reste l'espoir, un sentiment dont l'auteur ne peut s'en départir : « Nous reviendrons un jour dans notre rue. ». La rue c'est Constantine, c'est Alger et c'est surtout l'Algérie dans l'attente de nouveaux printemps.
Leïla Nekachtali
« Les Miroirs aux Alouettes » de Badr'Eddine Mili, Chihab Editions, prix public : 600 DA
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)