Algérie

Gilbert Quellec, ancien soldat français, revient en Algérie: «J'ai fait le chemin pour demander pardon»


Gilbert Quellec n'est plus ce jeune homme de 20 ans, le fusil à l'épaule, parti combattre les «fellagas» au nom de sa patrie, la France, mais un homme qui, 60 ans plus tard, se repent et décide de revenir en Algérie pour un acte de réconciliation et demander pardon car, comme il le dit si bien : «J'avais 20 ans et je ne savais pas vraiment pourquoi j'étais là-bas?»Sa décision de fouler à nouveau le sol algérien et d'accomplir son acte de repentance a précédé celle de son président, Emmanuel Macron, envers la famille de Maurice Audin, en demandant pardon à Josette Audin, la veuve du militant communiste partisan de l'indépendance de l'Algérie, torturé et tué par l'armée française en 1957, dont le corps n'a jamais été retrouvé. Un acte de repentance suivi par l'annonce également de l'ouverture des archives françaises relatives aux disparus de la guerre d'Algérie. D'ailleurs, un site internet a été mis en ligne juste après l'annonce d'Emmanuel Macron : 1000autres.org, comme mille autres Maurice Audin, qui recense les noms d'un millier de personnes disparues depuis la bataille d'Alger.
Gilbert Quellec, dans son témoignage paru avant-hier dans Le Télégramme, raconte son expérience de jeune appelé dans cette guerre abominable à laquelle il a participée. Il raconte la belle Algérie, un pays magnifique. «Je me souviens aussi de ce pays, magnifique, avec ses lumières, son désert extraordinaire?».
«On n'avait rien à faire en Algérie»
Mais de son voyage, en plus des regrets, ce qui en ressort, c'est surtout sa forte conviction que c'était une guerre inutile. «Je pense qu'on n'avait rien à faire en Algérie. C'était un conflit inutile. Tous mes amis le disent». De son projet de revenir en Algérie, ses amis anciens combattants le dissuadaient de le réaliser. «Je parlais de mon projet avec les anciens combattants et ils me disaient de ne pas y aller? Mais j'ai finalement trouvé des compagnons de route qui avaient le même désir : deux anciens des Landes et un autre Morbihannais, Jean Richard, de Séné. Et puis, j'avais avec moi mes deux gardes du corps : ma fille et mon petit-fils de 18 ans», dit-il. L'ancien soldat, qui était chauffeur dans la région d'Oran, s'était déjà retrouvé en première ligne. Il insiste sur le fait qu'il n'a jamais tué personne. «Mais je n'ai jamais tiré sur quelqu'un. Un jour, un commandant qui avait repéré une patrouille m'a demandé de prendre à revers un groupe et de le rabattre vers l'oued (rivière). Il a ainsi été mis hors de combat. C'est ce qui m'a valu d'être décoré», ajoute-t-il. Durant son voyage en Algérie, Gilbert Quellec et ses compagnons ont visité le monument aux morts de Khemis Miliana, où ils ont été accueillis chaleureusement. «On a été accueillis avec chaleur. Nous avons expliqué ce que nous faisions là. On entendait : «soyez les bienvenus»? Partout, des gens désireux de venir parler avec nous, d'écouter. Un homme, dont le père était mort pendant la guerre, a pris le temps de nous montrer le monument aux morts où 109 Algériens figurent? D'autres voulaient entendre notre histoire. J'ai été invité à manger le couscous le jour de mon anniversaire, le 12 mai, que j'ai fêté là-bas. C'était tout bonnement incroyable», relève-t-il. Mais les atrocités commises par l'armée française en Algérie le rattrapent quand il visite avec ses compagnons une «maison de torture» à Beraoun, accompagnés par Salah Benamar, un ancien moudjahid. «Un homme, Benamar Salah, nous accompagnait. Il avait été torturé sur place. Il y avait là les cachots, la corde pour pendre, la baignoire où les têtes des gens étaient plongées, la gégène et un puits pour jeter les cadavres. À l'époque, je ne savais pas que tout cela existait. Je pense qu'il n'y avait pas de salle de torture au fort de Lamoricière. Là, tout ça? C'était trop. On s'est mis à pleurer. Benamar aussi. Et on s'est pris dans les bras?». Gilbert Quellec n'a pas fait juste un voyage, il en est revenu différent et plus convaincu que jamais de l'inutilité de cette sale guerre et de la nécessité de le faire savoir autour de lui.
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