Qu'est-il en train de se dessiner pour le Maghreb séculaire et séculier ' Dans une Tunisie en proie à ses propres convulsions politiques depuis qu'elle a inauguré le «printemps arabe» en janvier 2011 en faisant tomber Ben Ali et un Maroc en apparence plus tranquille avec un gouvernement dirigé par un islamiste depuis novembre 2011, l'avenir de l'ensemble maghrébin continue d'être appréhendé- de l'étranger- à travers un prisme devenu intrigue interrogative : c'est quoi cette Algérie qui n'a même pas été effleurée par le vent des révoltes arabes ' Les Algériens, dans leur ensemble, ne boudent pas leur plaisir, eux qui ont échappé à une fausse révolution et son cortège de malheurs. Le pouvoir, de son côté, heureux de l'aubaine, consolide habilement le statu quo et trouve les ressources nécessaires pour surfer avec une certaine maestria sur l'écume d'une vague qui ressemblerait davantage à une mousse de bulles de savon n'était la régression que son ressac laisse partout dans son sillage.Les grandes capitales occidentales, qui ont porté sur les fons baptismaux les islamistes partout où ils les ont aidés à récupérer les révoltes populaires, en Tunisie, Libye, Egypte, et actuellement en Syrie, ne manqueront pas de tirer bientôt les enseignements qui s'imposent, de leur engagement en faveur d'un changement qui commence à leur échapper. En Syrie, les événements actuels et les débordements du conflit vers l'aire compliquée d'une géopolitique porteuse de graves menaces ont commencé à indiquer de quoi sera fait demain : une petite troisième guerre mondiale «par pays interposés», selon l'expression du secrétaire général de l'ONU. Dans l'autre versant du monde arabe, sur son flanc ouest, les manifestations populaires consécutives à un petit film haineux mais sans consistance sur l'islam n'ont pas manqué d'édifier Washington et ses alliés européens sur la vraie nature des pouvoirs islamistes.À Benghazi, réputé fer de lance de la rébellion qui a abattu le régime de Kadhafi, les autorités n'ont pas été en mesure de protéger le consulat des Etats-Unis d'un assaut d'un groupuscule islamiste, au soir du 11 février 2012. L'ambassadeur américain et trois de ses collaborateurs y ont été tués. Il s'en était fallu de peu pour que la représentation américaine à Tunis connaisse le même sort face au déchaînement des Salafistes contre lesquels le gouvernement islamiste n'avait pas donné de consignes précises pour ne pas s'aliéner leur soutien contre les «laïcs» et les modernistes que Ghannouchi veut éliminer du paysage politique tunisien.C'est bien que Hillary Clinton se soit félicitée que les autorités algériennes aient bien protégé les édifices diplomatiques américains contre des débordements qui, de toute manière, n'étaient pas à craindre, Ali Benhadj n'ayant mobilisé dans son fief de Kouba que quelques dizaines d'islamistes venus exprimer une «colère toute politique» contre l'insidieux film en question. Par contre, on voit mal où veut en venir la Secrétaire d'Etat quand elle ajoute que l'Algérie «a beaucoup à gagner en adoptant les changements qui s'opèrent autour d'elle, et nous avons constaté certains progrès». Elle sait, pourtant, parfaitement, que les législatives de mai dernier ont déjoué tous les pronostics en consacrant une sévère défaite des islamistes algériens que, eux les Américains, voyaient prendre le pouvoir par les urnes, à l'instar des islamistes tunisiens et marocains.
La vérité, bien réelle, c'est celle d'un reflux net et incontestable de l'islamisme politique en Algérie, consécutif à une tragédie sans pareille vécue pendant une décennie entière du fait d'un terrorisme qui, quoi qu'on dise, est fondamentalement islamiste. Il ne faut pas avoir la mémoire courte, tout le long de cette sanglante décennie, les Etats-Unis, dirigés alors par un certain Bill Clinton, avaient décrété un embargo total contre l'Algérie pour ses approvisionnements en armes, y compris le matériel adapté à la lutte anti-terroriste. Il faudra qu'un jour, la première puissance mondiale s'explique (mais après des dégâts incommensurables) sur cette contradiction doctrinale qui leur fait adopter deux positions différentes vis-à-vis d'un même phénomène. Ils sont pour les «djihadistes» en Syrie, qu'ils arment en sous-main, mais sont pour l'éradication des mêmes groupes terroristes en Algérie et dans la zone du Sahel. Peut-être y seront-ils aidés dans cette voie de la résipiscence par la vidéo du chef des islamistes tunisiens, qui est en train de faire un «buzz» sur la toile. Toute la duplicité de Rached Ghannouchi l'«islamiste modéré» et son projet intégriste pour la Tunisie sont dans cet enregistrement absolument sidérant.Si c'est de ce modèle que doit s'inspirer l'Algérie pour être en phase avec son environnement régional, d'après Madame Clinton, elle serait mieux avisée d'attendre l'échéance tunisienne du 23 juin prochain. En effet, et sans doute pour faire oublier les déboires que lui a valus une petite mais lourde cassette, Ghannouchi a dû personnellement donner son accord à ses ouailles du gouvernement pour en finir avec les man'uvres dilatoires et fixer à cette date les élections législatives et présidentielles pour sortir la Tunisie de la transition. Avec la Libye voisine qui n'en a pas fini avec ses trublions salafistes surarmés, il sera alors possible d'évaluer plus objectivement le régime politique qui conviendra le mieux aux pays du Maghreb. Le pouvoir algérien pourrait alors se faire violence et organiser des élections sur mesure pour en faire sortir une majorité islamiste.
A. S.
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Posté Le : 14/10/2012
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : A Samil
Source : www.latribune-online.com