Algérie

Freedom Now


Freedom Now
Par Maâmar FarahVendredi matin, un soleil blafard se lève sur Soweto. Dans le lisse chuchotis du matin, une voix, plus forte que les autres, crie : «Il est mort !», suivie d'un long silence puis d'un vieux chant d'esclaves africains, repris dans les chaumières et les palais. Et, contre toute attente, les dames, les demoiselles, les jeunes et les vieux se sont mis à danser, en longues processions bigarrées. Ici, on n'a pas besoin de porter le noir pour exhiber son deuil. La tristesse est dans le cœur. Elle est dans le firmament. Elle est dans la mer et la montagne. Elle est dans la roche debout à Robben Island. Les dames, les demoiselles, les jeunes et les vieux ont des tenues bariolées, comme le drapeau du pays... Vendredi matin, l'Afrique du Sud se réveille presque sans son cœur palpitant ! Sans ce souffle régénérateur, puissant, vital, qui a haleté près d'un siècle, comme un vent d'espoir courant sur la savane et les ports, sur les vallons et les hameaux, pour dire aux exclus : «battez-vous avec les armes de la conviction ! Battez-vous et restez debout, vous défendez une cause juste et les causes justes finissent toujours par gagner !»Vendredi matin, l'Afrique du Sud se lève presque sans soleil ; les visages des Blancs et des Noirs, des métis et des Indiens, ceux des chrétiens et des musulmans, des juifs et des athées, ont la même couleur abstraite et les mêmes yeux vides et saturés de chagrin ! Celui qui a rassemblé les cœurs et les espérances autour des mêmes ambitions patriotiques, celui qui a offert sa vie pour son peuple et sa nation, celui qui a donné un sens profond aux valeurs d'amour, d'humilité et de pardon, ce brave grand-père au cœur d'or, vient de prendre le chemin de l'exil définitif. Loin, plus loin que la halte de Robben Island, fouettée ce matin par un étrange vent qui fracasse les vagues contre les récifs et dresse les chevelures des arbres sur leur tête. S'il est revenu de sa prison pour rebâtir la légende, court-circuitée par la bêtise humaine mais jamais interrompue, les Sud-Africains savent qu'il ne reviendra pas cette fois-ci.Il est parti, Madiba ! Il est parti rejoindre sa petite fille aimée et tous ces militants anti-Apartheid dont les corps, fauchés par les balles racistes ou mutilés par la torture, ont jalonné le long parcours de la libération. Mandela a été un combattant acharné mais aussi le symbole d'une certaine manière de lutter contre la tyrannie et l'ordre injuste des ségrégationnistes. Il a prèné la non-violence comme le grand Mahatma Gandhi et, on l'a vu, ça peut rapporter gros, même si, souvent, seule la force déloge les tyrans !Ce samedi matin, le vent se calme et le soleil pointe ses rayons sur les gratte-ciel de Johannesburg. Sur Robben Island, une petite pluie se met à tomber. Un immense arc-en-ciel balafre le ciel incertain. Les gens lèvent la tête et reconnaissent tout de suite les couleurs de leur drapeau. Ce sont les couleurs de la joie et de l'espérance. Alors, les dames, les demoiselles, les jeunes et les vieux ont souri : il n'est pas mort Madiba !


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